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Crime

11 ans, piégé dans un terminal de l'aéroport de Casablanca

Le garçon s'est vu refuser l'entrée au Maroc, où son père s'est installé après avoir fui le pays. Le père, opposant politique et son fils ont été renvoyés vers la Turquie ce mercredi soir.
Photo par Bashar Jalabe

Un père et son fils, syriens, ont passé trois jours coincés dans l'aéroport de Casablanca, au Maroc, à cause d'un imbroglio juridique. Le jeune garçon de 11 ans s'est vu refuser l'entrée sur le sol marocain — pour absence de visa. Ce mercredi après-midi, ils ont été renvoyés vers la Turquie. Ils essayent de négocier depuis Istanbul afin d'obtenir un visa marocain pour le jeune garçon. Retour sur ces 3 jours bloqués dans un terminal d'aéroport.

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Avant de savoir qu'il allait repartir vers la Turquie, Bashar Jalabe expliquait à VICE News, ce mercredi, « Je suis dans une très mauvaise posture. Il n'y a aucun endroit pour dormir et peu à manger. »

Le père et son fils, Heder, étaient arrivés au Maroc ce lundi matin. « Nous sommes ici depuis 3 jours. Mon fils a froid, on ne sait pas ce qu'on va faire et on est énervés. » S'ils sont désormais retour en Turquie, où ils font face à un futur incertain.

Selon son neveu, Harle Mar, Bashar s'est farouchement opposé au gouvernement syrien, et a donc été forcé de quitter le pays il y a deux ans — laissant son fils à Homs, pour qu'il puisse continuer d'aller à l'école.

La mère d'Heder est morte depuis plusieurs années, il vivait alors avec sa tante en Syrie. Il y a quelques mois, Heder et sa tante ont quitté Homs pour rejoindre Damas, et enfin passer en Turquie.

Bashar est marié à une ressortissante marocaine et réside dans le pays, bien qu'il n'a pas la nationalité marocaine. Il explique qu'il préparait depuis un moment l'arrivée d'Heder au Maroc, mais le processus administratif prend beaucoup de temps.

C'est à ce moment que la tante d'Heder est morte.

Heder Jalabe à l'aéroport de Casablanca. Photo de Bashar Jalabe

Le neveu de Bachar, Mar, un jeune homme de 21 ans qui a fui la Syrie il y a 8 mois, a contacté VICE News pour donner l'alerte sur la situation ubuesque de sa famille.

« Heder n'a plus rien en Turquie, » explique Mar, ajoutant, « Si Bashar retourne en Syrie, il sera tué. »

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Selon Mar, après la mort de sa tante, Heder est resté 15 jours avec une famille syrienne avant que son père ne vienne le chercher. À l'aéroport, en Turquie, on leur avait déjà interdit de monter dans un avion à destination du Maroc.

Mais après des heures de négociations, ils ont finalement pu embarquer. On leur a alors donné un document qui était censé les empêcher de retourner en Turquie pendant 5 ans, selon le neveu de Bashar.

« Bashar voulait emmener son fils au Maroc, pour qu'il y demande l'asile. C'est impossible pour son fils de rester seul en Turquie. Et il n'a plus de famille en Syrie. Mais faire une demande d'asile au Maroc, c'est très compliqué, » poursuit Mar.

Heder Jalabe dort dans l'aéroport de Casablanca. Photo par Bashar Jalabe

Au Maroc, Heder s'est vu refuser l'entrée parce qu'il n'avait pas de visa, explique Mar. Bashar a alors demandé s'il pouvait passer les contrôles de passeport pour aller chercher sa femme. Mais les autorités lui ont alors confisqué son passeport de peur qu'il disparaisse et abandonne son fils dans l'aéroport de Casablanca.

Ce mercredi, le père et son fils ont commencé leur troisième journée dans l'aéroport — ne sachant pas s'ils pourraient entrer au Maroc. Mar a dit à VICE News que les deux dormaient par terre, et que Bashar avait des problèmes d'estomac et cardiaques. Finalement, ils ont embarqué en fin d'après-midi pour la Turquie, et sont maintenant à Istanbul. Ce qu'il va advenir d'eux est incertain.

Leur histoire n'est pas un événement isolé. Plus de 9 millions de Syriens ont été forcés de quitter leurs maisons depuis le début du conflit en 2011. Des histoires comme celle d'Heder, il y en a beaucoup. Des histoires de familles syriennes qui se sont séparées et éparpillées afin d'échapper à la guerre, seulement pour se retrouver confrontées aux nombreux obstacles qui vont avec les demandes d'asile.

Suivez Sally Hayden sur Twitter @sallyhad