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Flic, je suis devenu célèbre après avoir évité de buter un mec qui m’agressait

Ou comment je suis devenu une star nationale juste pour avoir fait correctement mon boulot.
Illustration de John Lee

Josh Hilling est policier à Glendale, une ville située près de Cincinnati. Le 29 mars dernier, il a croisé la route d'un certain Javier Pablo Aleman, alors que ce dernier était en train de déambuler au bord de l'autoroute. Il s'est arrêté pour lui demander ses papiers d'identité. Alors qu'il s'apprêtait à le fouiller, Aleman a sorti un couteau et a tenté de le poignarder. Hilling s'est défendu en lui tirant dessus. Malgré sa blessure, Aleman s'est mis à hurler : « Tue-moi, tue-moi ! »

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Hilling n'a pas tiré et Aleman a survécu. La confrontation a été enregistrée par la caméra que portait l'agent – la vidéo compte des dizaines de milliers de vues et a été reprise par de nombreux médias.

Hilling a ensuite appris qu'Aleman était recherché pour meurtre – on l'accusait d'avoir tué un type à Baltimore. Hilling était flic depuis à peine trois mois quand l'incident a eu lieu. On lui a demandé de nous raconter ce 29 mars en détail.


J'effectuais ma patrouille habituelle. Comme il était 13h30, l'heure du déjeuner, je décidais de choper quelque chose à manger. Alors que je roulais sur une autoroute inter-États à la recherche d'un fast-food, j'ai remarqué un homme qui marchait sur le bord de la route. J'ai prévenu mes collègues que j'allais établir un contact avec ce type via ma radio. Mon intention première était de m'arrêter, de voir où il se rendait et d'essayer de l'aider. En agissant de la sorte, il se mettait en danger, et mettait également en danger les automobilistes.

Je l'ai approché et lui ai posé les questions typiques : Comment vous appelez-vous ? D'où venez-vous ? Pourquoi êtes-vous sur l'autoroute ? Nous conversion se déroulait de manière tout à fait cordiale ; il ne semblait pas excité – ni même anxieux.

Il m'a dit son nom, avant de s'arrêter et de m'en donner un autre. Je lui ai demandé s'il avait des papiers d'identité sur lui ; il m'a répondu que non. Je lui ai demandé s'il avait un numéro de sécurité sociale ; il m'a répondu que non. À ce moment-là, j'ai eu un mauvais pressentiment. Je suis mal à l'aise quand je n'ai pas entre les mains un document qui me confirme l'identité de la personne.

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Il portait un gros sac à dos, donc je lui ai demandé s'il y avait quelque chose dedans dont il voulait me parler. Il m'a répondu que non – il s'agissait seulement de quelques vêtements sales – et me l'a tendu. Je me suis servi de la radio du comté afin de dire à tous les commissariats du coin où j'étais et ce que je faisais. L'homme en a profité pour mettre ses mains dans ses poches. Je lui ai demandé de les retirer. Il s'est exécuté, sans protester. Après ça, j'ai décidé de le fouiller afin de garantir ma sécurité. Je lui ai demandé de poser ses mains sur le véhicule. Je m'apprêtais à le faire monter dans ma voiture. Une fois dedans, il serait sous ma responsabilité, je devais donc être sûr qu'il n'était pas armé. Il n'était pas question de le mettre en état d'arrestation. Je voulais simplement lui donner un coup de main.

Il n'avait pas les mains levées quand je l'ai approché pour la fouille, alors j'ai mis ma main sur son épaule. Il s'est retourné et s'est reculé. Il a soudainement sorti un énorme couteau hors de sa ceinture et l'a brandi. J'ai pointé mon pistolet vers lui. Après m'être concentré, je lui ai tiré dessus au niveau de l'abdomen. Il est tombé à terre. J'ai continué à le menacer avec mon arme tout en reculant afin de créer une distance entre nous. J'ai alors appelé des renforts.

Au cours de ces trois minutes et vingt et quelques secondes, deux moments resteront à jamais gravés dans ma mémoire. Le premier, c'est quand j'ai compris qu'il avait un couteau et qu'il allait essayer de me faire du mal. Mon sang n'a fait qu'un tour ; je mentirais si je disais que je n'ai pas craint pour ma vie.

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Le deuxième, c'est juste après avoir appuyé sur la gâchette. Quelque chose m'a poussé à m'arrêter et à réfléchir, au lieu d'agir dans la précipitation. Que devais-je faire ? J'ai rapidement pensé : Crée une distance entre toi et cette personne – qui essaie de te faire du mal – et appelle à l'aide .

Il criait sans s'arrêter : « Tue-moi. Tue-moi. Tue-moi » et « je vais te tuer ». Je me concentrais non seulement sur lui mais aussi sur le trafic. Les voitures ralentissaient et je lui intimais l'ordre de lâcher son arme et de se coucher sur le sol. En vain.

Les renforts ont débarqué peu après, ce qui a manifestement attiré son attention. À un moment donné, nous avons fermé l'autoroute, mais il n'écoutait toujours pas. Finalement, un policier d'un autre service l'a tasé, le forçant à se coucher. C'est là que nous l'avons emmené en garde à vue.

Après cela, il y a eu une enquête. J'ai dû fournir ma caméra et mon arme de service, qui étaient des preuves. On m'a demandé si j'étais prêt à faire une déposition. Dans l'immédiat, je n'en étais pas capable, mais j'y suis retourné le lendemain de l'arrestation bien plus calme – et plus conscient de la gravité de la situation. C'est là qu'ils m'ont appris que l'homme était recherché dans le Maryland pour une affaire d'homicide.

Je ne savais pas qui était ce gars. Je ne comprenais pas comment la situation avait pu déraper. Je ne savais pas sur qui j'avais tiré, ni comment on en était arrivé là.

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J'avais travaillé vraiment dur pour obtenir un job à plein temps afin de subvenir aux besoins de ma famille. Je ne voulais pas qu'on me l'enlève. Nous vivions confortablement et nous étions heureux. Je ne voulais pas voir tout ça disparaître du jour au lendemain, même si je savais que j'avais fait de mon mieux.

Quand quelque chose comme cela arrive, ça affecte tout l'entourage : les amis, la famille, tout le monde. Une semaine après la fusillade, une conférence de presse a été organisée et ma vidéo a été diffusée. L'attente a été un vrai supplice : avais-je fait quelque chose de mal ?

Quand la vidéo a été publiée sur Internet, elle est devenue virale. J'ai été au centre de l'attention nationale. Cela a été vraiment difficile pour moi : je n'ai pas aimé voir mon nom et mon visage partout.

Le fait est qu'on ne peut pas savoir comment on va réagir dans une telle situation avant de la vivre pour de vrai. J'ai vu beaucoup de vidéos où les agents tirent plus d'une fois. Je ne peux pas justifier leurs actes, mais je peux comprendre l'état de stress dans lequel ils étaient.

Il n'empêche que je dois maintenant vivre avec la culpabilité d'avoir tiré sur quelqu'un. Si je l'avais tué, j'aurais dû supporter ce fardeau toute ma vie.

Ça fera toujours partie de mon identité désormais. Dans vingt ans, la police de Glendale pourrait être mentionnée, et les gens se diront : « Oh, y'avait pas une histoire de flic ayant tiré sur quelqu'un ? T'étais là quand c'est arrivé ? »

« C'était toi ? »