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Burkina Faso

Burkina Faso : Dans la manifestation monstre de ce matin

VICE News est à Ouagadougou, alors que Blaise Compaoré, président depuis 1987, entend modifier la Constitution pour rester au pouvoir.
Photo Pierre Mareczko

On est arrivés dans la nuit de lundi à mardi, à Ouagadougou, la capitale du Burkina Faso. On nous parle de heurts entre jeunes et forces de police. On ne les a pas vus directement. Reste que la ville est tendue à la veille d'une manifestation lancée par les forces politiques de l'opposition.

Depuis une semaine, le Burkina Faso traverse une période de turbulences liée à la décision du gouvernement de ce pays d'Afrique de l'Ouest de présenter un projet de loi visant à modifier la Constitution du pays à l'Assemblée nationale. Le but est d'organiser un référendum qui pourrait permettre à Blaise Compaoré, président depuis 27 ans, de briguer un nouveau mandat lors des élections présidentielles qui auront lieu en 2015. Mais en cas de vote massif des députés ce jeudi pour une telle réforme, le gouvernement pourrait aussi bien se passer du référendum.

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Mardi matin, dès 8 heures les manifestants convergent vers la place de la Nation. Ils arrivent par milliers de toutes les avenues et rues de Ouagadougou. Le départ de la manifestation est prévu à 9h30. Les manifestants se massent à l'appel de Zéphirin Diabré, qui est aujourd'hui le chef de file des partis politiques de l'opposition au Burkina Faso (CFOP).

Le cortège est censé s'ébranler pour marcher un peu plus d'un kilomètre, depuis la place de la Nation, jusqu'au rond-point des Nations Unies. Mais il y a tellement de monde sur le parcours qu'il est déjà plein de manifestants. Cela tient plus du sit-in que de la marche

— Amadou Mahtar Ba (@AMahtarBa)28 Octobre 2014

Des responsables de la manifestation disent à VICE News n'avoir jamais vu ça. La ville est bloquée. Le service de sécurité, des militants de l'opposition, est vite dépassé. Les manifestants sont majoritairement jeunes. Ils tiennent des pancartes rouges, des « cartons rouges » adressés au président Blaise Compaoré. « Il faut que Blaise s'en aille » disent les slogans. « Il faut balayer Kosyam » disent d'autres, des balais à la main, en référence au nom du palais présidentiel de Ouagadougou, Kosyam.

À dix heures, on se retrouve devant une ligne de police antiémeute qui barre une route qui mène à l'Assemblée nationale, là où se jouera cette réforme de la Constitution jeudi. De jeunes manifestants récupèrent des pavés et des pierres qui sont empilés sur les nombreux chantiers de la ville. Ils jettent les projectiles sur les forces de l'ordre. Une rumeur court dans la ville, rapportée par plusieurs manifestants à VICE News, qui dit que parmi les policiers antiémeute on trouve de nombreux mercenaires appartenant à des milices togolaises, ils seraient arrivés depuis peu à Ouagadougou. Pendant une heure les forces de l'ordre reçoivent les pierres sans broncher.

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À 11h, la police antiémeute change de tactique et monte dans des pick-up pour tourner dans la ville, à la recherche des dizaines de barricades montées partout en ville par les jeunes manifestants. Nous suivons à moto pour voir le même scénario se répéter. Les pick-up s'arrêtent devant des barricades tenues à chaque fois par une cinquantaine de manifestants qui sont délogés à grands coups de gaz lacrymogènes. Puis les policiers descendent et poursuivent les manifestants en les frappant de leurs matraques. Nous avons vu beaucoup de blessés (matraques, gaz) parmi les manifestants. L'armée n'intervient pas dans les rues de Ouagadougou.

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Nous sommes allés au quartier général de l'opposition pour rencontrer ses leaders. Sur place, on nous a indiqué qu'ils s'étaient retirés dans un lieu secret pour se concerter sur la marche à suivre demain, veille du jour de vote décisif. Des sources de l'opposition ont indiqué à VICE News que les députés de la majorité ne sont plus à l'Assemblée nationale, ils ont été mis en sécurité dans un lieu lui aussi gardé secret.

À la mi-journée, Ouagadougou est méconnaissable, les rues sont retournées. De gros nuages de fumée s'élèvent des tas de pneus que les manifestants font brûler.

Retrouvez ce reportage de Pierre Mareczko prochainement en vidéo dans l'émission Le Point Quotidien, diffusé tous les soirs à 20h35 sur France 4