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Burundi

Burundi : les putschistes se rendent, leur chef est en fuite

Alors que les forces loyalistes disent être encore à la recherche du leader des putschistes, le président Nkurunziza a annoncé être rentré au Burundi.
Photo World Economic Forum/Eric Miller, via Wikimedia Commons

Vendredi matin, des leaders de la tentative de coup d'État au Burundi ont annoncé leur reddition à l'AFP, deux jours après le début du putsch. Une partie d'entre-eux auraient ensuite été arrêtés par les forces loyalistes restées fidèles au président Pierre Nkurunziza. Le président a annoncé être revenu au Burundi jeudi soir, après être resté bloqué en Tanzanie qu'il avait rejoint pour un sommet international au moment du départ de la tentative de coup d'État ce mercredi. Le président en exercice devrait s'exprimer à la nation ce vendredi, selon la radio RFI. D'après un décompte de l'ONU, plus de 105 000 personnes ont fuit le Burundi vers les pays voisins depuis le début de la crise.

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Je suis au — Pierre Nkurunziza (@PierreNkurunziz)May 14, 2015

Le tweet du président Nkurunziza publié jeudi soir

Le général Godefroid Niyombare, le leader des putschistes, a annoncé sa reddition par téléphone à un journaliste de l'AFP ce vendredi matin, alors que des troupes loyalistes approchaient de sa position. « J'espère qu'ils ne vont pas nous tuer, » a alors déclaré le général Niyombare. On ignore depuis s'il a été arrêté ou non. Selon RFI, citant des « sources officielles », il était en fuite et traqué en milieu de matinée.

— Sonia Rolley (@soniarolley)May 15, 2015

Trois autres leaders putschistes ont, en revanche, été arrêtés ce vendredi matin, a annoncé l'AFP. Il s'agit du porte-parole du mouvement, le commissaire de police Vénon Ndabaneze, du numéro deux des putschistes, le général Cyrille Ndayirukiye, et d'une troisième personne inconnue. « Nous avons déposé les armes. Nous avons appelé le ministre de la Sécurité publique et le ministre de la Défense pour leur dire que nous n'avions plus d'armes, » a déclaré Vénon Ndabaneze par téléphone avant son arrestation. « Ils sont vivants », a assuré un haut gradé de la police, cité par Jeune Afrique. Le correspondant du journal Le Monde rapporte également que le général Ndayirukiye serait vivant.

Cyrille Ndayirukiye arrêté. 'Tu ne sais pas qu'il a été maîtrise? Un soldat puis un officier. 'Il est en vie' selon cette source. — Jean Philippe remy (@jpremylemonde)May 15, 2015

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Dès jeudi soir, le porte-parole Ndabaneze et le général Ndayirukiye avaient admis l'échec du putsch. Avant d'être arrêté, Vénon Ndabaneze avait raconté à l'AFP que les putschistes s'étaient séparés et cachés pendant la nuit de jeudi à vendredi. « Nous avons décidé de nous cacher pour attendre l'aube et nous rendre pour ne pas être tués, » a-t-il affirmé. Cyrille Ndayirukiye avait, selon l'AFP toujours, reconnu que les putschistes avaient « rencontré une trop grande détermination militaire pour soutenir le système au pouvoir ».

La situation dans les rues de Bujumbura est encore floue ce vendredi matin. On ne sait pas s'il reste des militaires putschistes n'ayant pas déposé les armes, ni quel est le rapport de force entre putschistes et loyalistes. Selon la chaîne de télévision iTélé, la société civile aurait appelé à la reprise des manifestations contre la candidature du président au pouvoir à un troisième mandat, qui est la cause de la crise actuelle.

Depuis bientôt trois semaines, les manifestants descendent dans les rues de la capitale Bujumbura pour protester contre la candidature du président Pierre Nkurunziza à un troisième mandat. Les élections sont dans plus d'un mois et le soulèvement s'est progressivement intensifié, jusqu'à la tentative de coup d'État de ce mercredi, malgré la répression brutale de la police qui a fait au moins 22 morts et de nombreux blessés.

À lire : Tentative de coup d'État au Burundi

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Le président Pierre Nkurunziza serait, lui, de retour au Burundi, après avoir laissé planer le doute sur sa situation géographique entre mercredi soir et jeudi soir. Ce mercredi, il s'était rendu à Dar es-Salaam, la capitale tanzanienne, pour un sommet réunissant des chefs d'état de l'Est de l'Afriquen afin de trouver des solutions à la crise qui touche le Burundi. Jeudi soir, un proche du président a annoncé à l'AFP que Pierre Nkurunziza était rentré au Burundi en voiture, par la frontière tanzanienne, et qu'il dormirait « à Nogzi, dans sa province natale ».

Les journées de mercredi et jeudi ont été marquées par de violents combats entre putschistes et loyalistes. Mercredi matin, alors que le général Niyombare annonçait la « destitution » du président Nkurunziza, des manifestations sans précédent atteignaient le centre-ville. Une première, depuis le début du mouvement et l'annonce officielle de la candidature de Pierre Nkurunziza aux élections présidentielles de juin 2015.

Les combats les plus violents qui ont suivi jeudi entre forces loyalistes et putschistes semblent avoir eu lieu à proximité du bâtiment de la Radio-télévision nationale burundaise (RTNB). Au moins trois militaires seraient morts lors de ces affrontements, rapportent plusieurs médias présents sur place. La RTNB, considérée comme l'unique moyen pour s'adresser à la totalité de la population sur le territoire national, était tenue par les forces loyalistes. Entre mercredi et jeudi soir, les putschistes auraient lancé plusieurs assauts sur la RTNB, mais un haut gradé de la police a affirmé jeudi soir à l'AFP que « leur attaque […] a échoué » et que les putschistes étaient « en débandade ».

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D'autres médias privés, comme les radios RPA, Bonesha et Insaganiro ou la chaîne de télévision Télé Renaissance, ont cessé d'émettre, après avoir diffusé des messages des putschistes pendant la tentative de coup d'État. De violents combats ont notamment eu lieu aux abords de la radio RPA, dans laquelle un incendie se serait déclaré, selon RFI.

Trails of blood lie near RPA radio station this morning in — Daniel Finnan (@Daniel_Finnan)May 14, 2015

La communauté internationale a condamné a tentative de coup d'État. Dans une déclaration faite jeudi, le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a « condamné toute tentative d'évincer le gouvernement par la force. » Les États-Unis ont réaffirmé la légitimité du président Nkurunziza, par la voix du porte-parole du département d'État Jeffrey Rathke. « Nous le reconnaissons comme le président légitime, » a-t-il déclaré. Les États-Unis ont également appelé ces dernières heures leurs ressortissants à quitter le pays au plus vite, car la situation sécuritaire se serait dégradée. « L'organisation terroriste des Shebab basée en Somalie a menacé de mener des attaques terroristes au Burundi et pourrait y viser les intérêts américains. » Le Conseil de sécurité de l'ONU et les chefs d'État présents en Tanzanie ont également condamné le coup d'État.

Suivez Matthieu Jublin sur Twitter @matthieujublin