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FRANCE

Calais : 14 migrants à l’hôpital après une bagarre générale

En quelques jours, une rixe entre migrants a fait plus de 20 blessés, un clandestin a été blessé par balle, un autre est mort percuté par une voiture alors qu’il traversait une autoroute.
Photo VICE News / Mélodie Bouchaud

Une bagarre a éclaté entre plusieurs centaines de migrants, à Calais, dans la nuit de dimanche à lundi. La préfecture de Calais, contactée par VICE News ce lundi après-midi, dénombre 21 blessés, dont 14 emmenés à l'hôpital, à l'issue de cette rixe. L'affrontement a eu lieu sur le seul bidonville de migrants autorisé par les autorités : la « new jungle ». Il aurait impliqué des communautés de migrants soudanais, érythréens, éthiopiens et afghans. Une enquête a été ouverte par la police, nous a confirmé le parquet de Boulogne. Cette bagarre opposait des clandestins candidats à au voyage illégal vers la Grande Bretagne.

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« Tout est parti d'une histoire de paquet de cigarette, » nous explique le président de L'Auberge des migrants, une association de soutien aux migrants de Calais, Christian Salomé, contacté ce lundi par VICE News « Ce que nous savons de cette bagarre, c'est qu'un Éthiopien ou un Érythréen, ainsi qu'un Soudanais, ont commencé à se battre, très vite rejoints par des gens de leurs communautés [respectives]. » Plusieurs tentes ou habitations de fortune ont été incendiées, et certains migrants étaient armés de barres de fer, de pierres, ou d'armes blanches, précise la préfecture.

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Dans la même nuit, un peu avant 5 heures du matin, un autre incident a eu lieu, sans lien avec l'affrontement général. Un jeune migrant est mort en essayant de traverser l'autoroute qui relie Calais à Paris. Âgé d'environ 20 à 25 ans, selon la préfecture, il a été percuté par une voiture. Sa nationalité n'est pas encore connue à l'heure de la parution de cet article.

Quelques jours auparavant, dans la nuit de jeudi à vendredi, une autre rixe a fait un blessé par balle, sur un parking d'autoroute. Selon Christian Salomé, des doutes subsistent sur sa nationalité, érythréenne ou éthiopienne. « Les deux communautés sont parfois mélangées et certains ne donnent pas leur véritable nationalité. Il y a souvent un doute, » explique-t-il.

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Cette fois-là, l'objet de l'affrontement serait une lutte de territoire entre réseaux de passeurs, selon une source policière anonyme, citée par le journal régionalLa Voix du Nord. Pour Christian Salomé, « un réseau de passeur, c'est un bien grand mot ; certains migrants veulent juste leur part du gâteau. » Quatre Afghans ont été mis en garde à vue après le coup de feu, puis relâchés faute de preuve. Aucune autre arrestation n'a eu lieu depuis, nous a indiqué le parquet.

« La cause de tout ça, c'est que les gens sont à bout, » estime Christian Salomé. « Dans le cas de la dernière bagarre, de la nuit de dimanche à lundi, il y avait un cocktail simple : peu de camions à cause du week-end [qui permettent d'aller en Angleterre], une concentration de migrants toujours plus grande, des communautés de cultures différentes, et un peu d'alcool. »

L'association estime à 3000 le nombre de migrants qui se concentrent sur les 18 hectares de la « new jungle », le nouveau - et unique - camp toléré par les autorités, qui se trouve à proximité de la nouvelle structure d'accueil de jour pour migrants, le centre Jules-Ferry. Ouvert en janvier 2015, ce centre situé en banlieue de Calais est censé accueillir tous les migrants. Ils étaient livrés à eux-mêmes depuis la fermeture du centre de Sangatte, qui les accueillait entre 1999 et 2002.

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Ce nouveau centre a « un peu amélioré la situation », pour Christian Salomé. « Il y a des douches, des prises électriques pour que les migrants rechargent leur téléphone, et un repas chaud par jour. » Le problème, selon lui, c'est que la concentration de différentes communautés de migrants à un même endroit provoque des tensions. « Avant, chaque communauté vivait séparément. Il y avait plusieurs camps mais aucun n'était toléré. Maintenant, il y a un seul camp toléré, mais il en faudrait plusieurs, » estime le responsable associatif.

Même son de cloche du côté de l'association Salam, un collectif d'aide aux migrants. Une membre, qui n'a pas voulu nous donner son nom, préférant s'exprimer au nom de l'association, fait le même diagnostic : le nouveau centre est utile, mais la concentration de plusieurs communautés génère de la violence. « Jusqu'en septembre, nous prévoyons, une augmentation du nombre de migrants. Ça devrait se calmer ensuite. » En attendant, l'association compte « réparer les dégâts, et apporter des bâches, des couvertures, des tentes. »

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Suivez Matthieu Jublin sur Twitter : @MatthieuJublin