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Changement climatique : Une croisière de luxe fait étape en Arctique

Le paquebot de croisière « Crystal Serenity » a fait escale lundi à Cambridge Bay, un hameau d’environ 1 500 habitants dans le territoire du Nunavut, au Canada. Des centaines de touristes impatients ont été transportées vers la côte.
Photo via Municipality of Cambridge Bay

Grâce au changement climatique, un paquebot de croisière géant fonce à travers le Passage du nord-ouest, autrefois non navigable, amenant pour la première fois un nombre sans précédent de touristes dans des communautés de l'Arctique isolées.

Après s'être faufilé par le détroit de Dolphin — un canal dangereux et étroit qui n'a été cartographié qu'au cours des dernières décennies — le paquebot de croisière Crystal Serenity a fait escale lundi à Cambridge Bay, un hameau d'environ 1 500 habitants dans le territoire canadien du Nunavut, où des centaines de touristes impatients ont été transportées vers la côte.

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Position de Cambridge Bay (via Google Maps)

Des groupes de 200 personnes ont afflué dans le hameau toutes les heures, toute la journée, prenant des photos, posant des questions, regardant des danses du tambour et achetant des souvenirs, selon un membre du personnel du Centre d'accueil de la côte arctique. Les passagers de la croisière ont payé entre 22 000 et 120 000 dollars pour les cabines à bord du paquebot.

Tandis que le paquebot de croisière — le plus grand à s'être frayé un chemin à travers le passage périlleux — a été bien accueilli par les hommes politiques locaux, vantant ses retombées économiques, les climatologues et les groupes environnementaux y ont vu un signe annonciateur de la fonte rapide de l'Arctique. Ces derniers assurent qu'il encouragera des flottes de bateaux à suivre le mouvement.

L'impitoyable Passage du nord-ouest, qui a anéanti la célèbre expédition Franklin dans les années 1840, causant la mort de 129 hommes dont leur capitaine Sir John Franklin, est aujourd'hui un raccourci pour les navires cherchant à traverser l'Amérique du nord. Il a connu ses premiers étés sans glace en 2007. Depuis ce moment-là, des compagnies de croisière examinent le potentiel touristique du canal.

Laverna Klengenberg, la maire de Ulukhaktok, le hameau que la croisière a récemment quitté, a été ravie de la visite du bateau. « C'est merveilleux », a-t-elle déclaré à CBC. « Les gens ont réalisé des danses du tambour, préparant leurs vêtements traditionnels, pratiquant de l'artisanat, participant à des formations pour être guides touristiques, etc. On a été assez occupé, nous sommes heureux de voir ça. »

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Dans un e-mail envoyé à VICE News, Crystal Cruises a assuré que les deux arrêts réalisés jusqu'ici au cours de ce voyage historique ont été des succès et a vanté les « retours extrêmement positifs » des invités et de la communauté Inuit.

Les 900 passagers du Crystal Serenity vont ensuite débarquer à Pond Inlet, une petite communauté Inuit de 1 500 habitants sur l'île de Baffin, où les touristes pourront profiter des vues sur les magnifiques fjords que Dennis Nutarak voit tous les jours.

« Je veux le voir, bien sûr », nous a assuré ce chasseur. Environ 20 bateaux viennent à Pond Inlet chaque année, mais il s'agit de loin du plus gros bateau à être jamais passé par là, suscitant la curiosité des habitants locaux, a-t-il expliqué.

Tandis que la ligne de croisière a vanté les retombées économiques du voyage, Nutarak ne s'attend pas à ce que celui-ci ait un énorme impact économique, parce que les touristes qui visitent sa communauté n'achètent en réalité pas beaucoup de souvenirs — mais ils paient pour assister à des spectacles.

Il a expliqué qu'il accueillerait bien n'importe quelle croisière géante qui suivra le Crystal Serenity. Il ne pense pas qu'elles nuiront aux mammifères qu'il chasse, comme les phoques et les narvals.

Il a aussi déclaré qu'il n'était pas encore inquiet à propos du changement climatique, parce qu'il n'avait pas remarqué de changements spectaculaires, autres qu'un temps étrange de temps en temps, plus de lacs humides et secs, et une banquise plus fragile qu'elle ne l'était auparavant.

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Contrairement au chasseur, les groupes environnementaux sont révoltés par la croisière, l'organisation World Wildlife Fund (WWF) l'ayant qualifié de voyage à haut risque et non viable.

« C'est parce que l'Arctique fond que cette croisière peut avoir lieu », a assuré dans une déclaration Rod Downie, directeur du programme polaire à WWF. « Cette année, nous avons vu la banquise atteindre un niveau plus bas que jamais en juin, alors qu'elle poursuit sa spirale infernale. La perte de la banquise est une mauvaise nouvelle pour les espèces de l'Arctique comme les ours polaires, les morses et les narvals, ainsi que pour la population de l'Arctique. »

« Ce voyage représente un risque de voir des bateaux de croisière de grande échelle manoeuvrer en Arctique. La faune et la flore uniques sont déjà stressées par le réchauffement climatique et la perte de la banquise, l'arrivée de méga bateaux de croisière dans cette partie du monde les pousserait au bord du précipice. »

Mais l'impact environnemental que la croisière aura n'est pas clair. Crystal Cruises s'est adressée à la Commission du Nunavut chargée de l'examen des répercussions pour obtenir l'autorisation de tracer son parcours. La semaine dernière, la Commission a donné son feu vert, déclarant qu'il était « peu probable de provoquer des impacts sociaux et environnementaux négatifs importants ». Ceci malgré de nombreuses inquiétudes signalées par le gouvernement fédéral du Canada et le propre département de l'environnement du Nunavut. Il y a la possibilité que le bateau entre en collision avec des ours polaires en train de nager et l'impact de la croisière sur la banquise.

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Cet article a d'abord été publié sur la version anglophone de VICE News.

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