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Belgique

Des Belges ont secrètement fait sortir 244 chrétiens d’Alep, en Syrie

Un groupe de citoyens belges et des membres du gouvernement ont annoncé ce mercredi la réussite de cette opération discrète commencée en mai et terminée samedi dernier.
Photo via SYRIAN ARAB NEWS AGENCY / HANDOU/EPA

VICE News regroupe ses articles sur la crise migratoire mondiale sur son blog "Migrants"

Un groupe de citoyens belges et des membres du gouvernement ont annoncé en conférence de presse ce mercredi la réussite d'une opération discrète — qui a débuté en mai et s'est achevée samedi dernier — qui a permis de faire sortir 244 chrétiens syriens qui vivaient dans la ville d'Alep (nord-ouest de la Syrie). Les exilés sont passés par le Liban, où l'ambassade belge leur a délivré des visas qui leur ont permis de rejoindre la Belgique pour y demander l'asile. Les derniers sont arrivés sur le sol belge samedi.

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Le psychiatre Peter Adriaenssens, porte-parole du groupe à l'origine de l'initiative, a expliqué que ce collectif, composé de personnes « de conviction et d'obédience diverses » avait tout d'abord alerté le gouvernement belge (sans préciser à quelle date), à propos de persécutions que subissent les chrétiens et la communauté des Yézidis vivant à Alep.

Ce jeudi, VICE News a joint par téléphone Katrien Jansseune, la porte-parole du secrétaire d'État à l'asile et la migration en Belgique. Elle explique que son service a reçu un « appel au secours » de la part de ce groupe de citoyens. « Nous avons alors mené notre propre enquête et nous avons pu mesurer la gravité de la situation » précise-t-elle.

Coincés à Alep, entre différentes lignes de fronts tenues entre autres par l'armée du régime, des groupes loyalistes, rebelles et islamistes « Les chrétiens de la ville n'avaient qu'une seule manière de s'enfuir : rejoindre le Liban » estime la porte-parole.

D'après le journal belgeLe Soir, 160 000 chrétiens vivaient à Alep avant le début de la guerre civile qui a éclaté en mars 2011. Ils ne seraient plus que 50 000 aujourd'hui.

L'opération a débuté en mai et s'est achevée le week-end dernier. Les Syriens qui sont sortis de la ville ont d'abord été identifiés sur le terrain par des relais du groupe belge. Interrogé sur les modalités du choix, notamment sur le fait qu'il ne s'agit que de gens de confession chrétienne, Peter Adriaenssens a expliqué lors de la conférence de presse de mercredi « Nous avons privilégié des jeunes, qui sont venus avec leurs parents, et parfois leurs grands-parents », et ce « afin de leur permettre de retourner à l'école, ou de fréquenter l'université, pour aider leur pays à se redresser quand ils rentreront en Syrie. »

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De mai à juillet, de nombreuses familles ont alors fui la ville d'Alep pour se rendre au Liban, par leurs propres moyens, insiste le groupe. C'est là que le gouvernement belge est intervenu pour les aider.

Dans des conditions gardées secrètes « par mesure de sécurité » comme l'a indiqué Mark Gedeyn, un ancien diplomate belge qui fait partie du groupe, les ressortissants syriens ont traversé la frontière séparant la Syrie du Liban et ont été pris en charge par l'ambassade de Belgique à Beyrouth. Ce jeudi, VICE News a contacté cette ambassade qui n'a pas pu donner de précisions concernant l'opération dans les délais de parution de cet article.

« Nous ne souhaitons pas épiloguer sur l'arrivée de ces personnes au Liban » a indiqué Tine Van Valckenborgh, responsable de la communication au Commissariat général aux réfugiés et aux apatrides de Belgique (CGRA), interrogée ce jeudi par VICE News sur les modalités de traversée de la frontière par les Syriens. La responsable de cet organe seul habilité à accorder le statut de réfugié en Belgique, nous explique que les Syriens concernés ont reçu un visa humanitaire afin de pouvoir voyager jusqu'en Belgique « à leurs frais », précise-t-elle.

Tine Van Valckenborgh insiste également sur le caractère « exceptionnel » de cette opération. « C'est un projet politique du gouvernement, qui a agi en dehors des circuits traditionnels » souligne-t-elle. Dans cette opération, le CGRA n'a pas sélectionné les candidats à l'asile comme c'est normalement le cas. « Nous allons maintenant vérifier si ces personnes relèvent bien du statut de réfugié » indique-t-elle, estimant que « la majorité des demandes seront certainement acceptées. »

Selon elle, cette opération ouvre une « troisième voie » dans l'accueil des réfugiés syriens en Belgique. Depuis le début du conflit, le pays a déjà accordé l'asile à 5 500 Syriens, de toutes confessions, qui se sont présentés spontanément. Par ailleurs, la Belgique collabore avec le Haut-commissariat aux réfugiés de l'ONU (UNHCR) dans le cadre du programme de réinstallation de réfugiés en Belgique qui a accueilli 150 réfugiés en 2014.

Interrogée sur de potentielles nouvelles opérations du type de celle qui vient de s'achever, la porte-parole du secrétaire d'État à l'asile nous répond que « C'est envisageable, mais nous devons toujours étudier les situations au cas par cas avant d'agir. »

Selon un communiqué du UNHCR publié ce jeudi, le nombre de « réfugiés » syriens a dépassé les 4 millions de personnes : « faisant du conflit syrien, la pire crise en près d'un quart de siècle pour l'agence de l'ONU pour les réfugiés. »

Suivez Pierre-Louis Caron sur Twitter : @pierrelouis_c