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Crime

Distribution de weed dans les rues de Portland pour fêter la légalisation du cannabis

Le cannabis est officiellement devenu légal dans l’État de l’Oregon aux États-Unis, ce mardi à minuit. Des militants pro herbe avaient prévu de faire une distribution de weed et de graines de cannabis pour célébrer. VICE News a fait le déplacement.
Photo par Kirsten Luce

Ce mardi, sur les coups de 9 heures du soir à Portland (Oregon), un type qui se fait appeler Pork Chop (pour « Côtelette de Porc ») a passé la tête à travers le carreau de son van en beuglant. Le gaillard faisait des allers-retours sur le Burnside Bridge — une des voies de circulation les plus empruntées de la ville — et annonçait dans un mégaphone son projet de distribuer gratuitement 420 livres (soit 190 kilos) de weed à minuit. Approchant le gong fatidique de minuit, une file d'attente de plus de mille personnes s'est formée des deux côtés du pont.

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En novembre dernier, l'Oregon a approuvé la Measure 91, une initiative populaire pour permettre aux citoyens de l'État, âgés de plus de 21 ans, de posséder et de consommer du cannabis à des fins récréatives. La loi a officiellement pris effet ce mardi à minuit. La branche locale de la National Organization for the Reform of Marijuana Laws (NORML) avait annoncé vouloir distribuer de petites quantités de weed et des graines de cannabis pour célébrer l'événement. La nouvelle a rapidement fait le tour de la ville — grâce au bouche-à-oreille, à Internet, mais aussi grâce au mégaphone de Pork Chop. Beaucoup d'aficionados de la weed ont donc fait le déplacement, s'attendant à une grosse distribution gratuite d'herbe au beau milieu d'un pont bondé.

Dans un bar avoisinant, quelques heures avant le début des festivités, Russ Belville, le président de 47 ans de la branche locale de NORML à Portland, sirotait un Coca Light. Il nous a expliqué qu'il attendait « entre 50 et 5 000 personnes ». Il avait ramené avec lui 28 grammes de weed — la quantité maximum d'herbe que l'on peut « échanger » selon la nouvelle loi — pour se mettre bien. Cette nouvelle loi ne permet pas encore d'acheter ou de vendre cette drogue à des fins récréatives. Il a confié à VICE News, qu'il espérait que de généreux patients de l'État d'Oregon — qui peuvent posséder jusqu'à 450 grammes de weed légalement pour leur traitement médical — viendraient se mêler à la fête pour distribuer un peu de leur produit.

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« Là maintenant, je suis nerveux, » a fait remarquer Belville. « J'ai 42 joints à distribuer, et je vois qu'il y a déjà plus de 42 types. »

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Au même moment, Pork Chop — un militant pour la consommation thérapeutique de marijuana, qui n'a pas souhaité donner son identité officielle — avait abandonné son van. Il remontait et descendait la rue dans sa chaise roulante répétant à l'envi son projet de distribuer « 420 livres de cannabis médicinal ». Grosse barbe et tatouages, Pork Chop portait une sorte de legging noir orné de feuilles de cannabis rouges, violettes et jaunes, et une casquette de camionneur blanche et verte cernée du symbole de la marijuana médicinale. Par contre, il n'avait apparemment pas 420 livres de cannabis sur lui.

« Certains de nos militants sont vraiment des gens qui dévorent la vie, » a observé dans un rictus Belville.

La foule qui s'était massée était incroyablement diverse et éclectique — avec une majorité de jeunes tout de même, mais un bon nombre de cheveux blancs trainaient parmi les vapeurs de fumées. Certains avaient fait le déplacement depuis San Diego ou le Canada. Il y avait au moins deux mères avec leurs jeunes adultes de fils. Les gens fumaient sans la peur au ventre, de façon totalement détendue. Une patrouille de police passait régulièrement, s'attirant les huées de la foule, mais les policiers ne sont jamais sortis du véhicule pour distribuer des amendes. Fumer en public reste interdit selon la nouvelle loi.

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« C'est un moment historique, » a expliqué à VICE News, Sean Crocker, 21 ans. Il portait un masque de Guy Fawkes (utilisé notamment par les Anonymous) et secouait un drapeau vert-jaune-rouge orné d'une feuille de cannabis et du mot « marijuana ». « Ça va être un truc dont on va se souvenir longtemps. Cela montre aux gens que les choses peuvent changer. Je suis ici pour faire passer le message que fumer c'est okay — ne paniquez pas, c'est du bio ! ».

La tension a commencé à se faire sentir alors qu'on approchait de minuit et que la foule ne désemplissait pas. Certains étaient là depuis 8 heures du soir et avaient improvisé une sorte de ligne d'attente pour la supposée distribution gratuite de weed. Certains qui étaient au tout début de la file étaient un peu remontés. Notamment un type avec un tee-shirt Cheech & Chong (un duo de comiques des années 1980 qui faisaient des sketchs sur leur amour du cannabis), qui gueulait sur les nouveaux arrivants, leur demandant de reculer vers l'autre côté du pont. Quelques passants ont émis l'idée que le crieur prenne une taffe pour se détendre un peu.

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Juste avant le décompte de minuit, Pork Chop a fait de la place à proximité du début de la file et s'est saisi de son mégaphone. Quelqu'un a lancé, « Raconte ce qui se passe Pork Chop ! » Ce qui a été rapidement suivi de slogans à base de « Fuck the DEA! [Drug Enforcement Administration] » et « Free the weed ! » ("Nique la DEA" et "Légalisez l'herbe !").

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« Bordel, pourquoi je suis ici ? » a demandé Pork Chop. Il s'est tu un instant, avant de répondre à sa propre question, « Pour libérer la weed ! » Il a ensuite pris une grosse baffe de marijuana depuis une pipe à eau et a levé les bras en l'air en signe de victoire.

Beaucoup de joints et de pipes tournaient, mais seulement une poignée de personnes aurait apparemment reçu de l'herbe gratuite — et bien moins que 420 livres de weed. Deux personnes à l'avant de l'énorme file d'attente ont eu de petits plants de cannabis — leurs racines proprement emballées dans de l'emballage à gâteau. Mais beaucoup de gens qui avaient fait la queue sont rentrés sans rien. Un énorme embouteillage — tant humain qu'automobile — a rendu la situation encore plus chaotique.

Belville, qui avait pour objectif de fumer un joint et de prendre un selfie devant le « White Stag » (un signe en néon, un élément phare de Portland), n'était absolument pas déçu.

« Pour la première fois en 25 ans, je peux aller au lit dans mon État natal sans être considéré comme un criminel, » expliquait-il. « Et ça, c'est une sensation agréable. »

Il avait distribué ses 42 joints, quand un jeune homme de 20 ans s'est approché de lui pour lui demander si la distribution de weed était une « arnaque ». Belleville lui a répondu que le propriétaire du dispensaire local faisait un aller-retour pour distribuer plus de produit.

« On a tout donné, il va y en avoir encore, » a dit Belville. « Je ne sais pas comment te le dire autrement. »

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Mais de l'autre côté de la rue, Jay Baker, le propriétaire du dispensaire en question, ne paraissait pas bien pressé. Quand on lui a demandé où allait se faire la distribution de weed gratuite, il a haussé les épaules et souri.

« Pork Chop était en charge du truc, » a-t-il dit. « Il était censé l'avoir. »

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Suivez Keegan Hamilton sur Twitter @keegan_hamilton

Photos par Kirsten Luce