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Crime

En Photos : Armageddon - dans le secret des bunkers et silos, les fantômes de l'arsenal nucléaire américain

Le photographe Jim Lo Scalzo explore les endroits où s'est jouée la course à l'armement nucléaire américain.
Photo par Jim Lo Scalzo/European Pressphoto Agency

Disséminés un peu partout au bout des petites routes américaines, se trouvent les restes de la fin du monde. Ou du moins de ce qui aurait pu devenir un Armageddon si la Guerre Froide entre Américains et Russes était soudainement devenue bouillante.

Les fantômes de l'arsenal atomique américain, de leurs points de production jusqu'à ceux de leur déploiement, sont accessibles à qui sait les trouver : en Arizona et dans le Dakota du Sud des missiles désarmés pointent toujours vers le ciel. Au Nevada, et dans le Nouveau Mexique, les marques de tests nucléaires sont autant de cicatrices dans le désert. Et dans le Tennessee ou dans l'État de Washington, les installations qui ont développé de l'uranium et du plutonium pour les bombes américaines sont en train de prendre la poussière.

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Dans les mois à venir, le bureau des parcs nationaux et le Département de l'Énergie des USA établiront un Parc national historique dédié au Projet Manhattan, du nom de code du programme de recherche d'armement atomique américain. L'objectif est de préserver les sites hier secrets de Los Alamos, Oak Ridge ou Hanford, là où les scientifiques conduisaient leurs recherches au pas de course pour produire la première bombe nucléaire de l'histoire. Les visites touristiques de ces endroits sont d'ores et déjà incroyablement populaires. Les tickets se vendent à toute vitesse. L'idée de ce parc national c'est de faciliter l'accès à ces endroits qui intéressent de plus en plus le public.

Reste qu'ailleurs dans le pays, les ruines du Projet Manhattan et de la course à l'armement qui a suivi restent largement ignorées. Dans le Dakota du Nord, dressé au beau milieu d'une prairie, on trouve un radar antimissile en forme de pyramide, construit pour détecter une attaque nucléaire venue de l'Union Soviétique. En Arizona on peut tomber sur un point de calibrage des satellites, utilisé par les satellites américains pour régler la mise au point de leurs objectifs avant d'aller espionner les terres soviétiques. Il est aujourd'hui recouvert de mauvaises herbes, pas loin du parking d'un motel. Il y a aussi les déchets nucléaires du premier réacteur nucléaire au monde — développé par le physicien italien Enrico Fermi pour le projet Manhattan en 1942. Ils sont dans le sous-sol d'un parc de la banlieue de Chicago, là où des joggeurs courent, et des oiseaux chantent. Une pierre indique : " Danger - Ne pas creuser."

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Ces sites témoignent de l'histoire du programme nucléaire américain, une époque pendant laquelle la menace d'une apocalypse imminente faisait partie du décor et de l'inconscient collectif.

Toutes les photos sont de Jim Lo Scalzo/European Pressphoto Agency

Un missile balistique Titan II désarmé. Il attend dans un silo souterrain, devenu un musée, le Titan Missile Museum à Sahuarita, Arizona. Pendant la Guerre froide, les missiles Titan II étaient déployés en Arizona, Arkansas et Kansas. Armés avec une tête nucléaire de neuf mégatonnes, ils étaient prêts à décoller à tout moment. Le site conserve le dernier lanceur de Titan II.

Deux costumes pour les personnels chargés de faire le plein d'essence des fusées. Titan Missile Museum.

Le dôme d'un lanceur abandonné de Titan II dans le désert, non loin de Vail, Arizona.

Une cible de calibrage de satellite, utilisé pendant la Guerre Froide par les satellites américains Corona pour faire la mise au point de leurs lentilles, avant de partir espionner l'Union Soviétique. Aujourd'hui elle prend la poussière dans le désert non loin de Casa Grande, dans l'Arizona. À une époque, on comptait 272 de ces croix de 20 mètres de large à travers le sud de l'Arizona.

La salle qui devait servir de Chambre des représentants dans le cas où une guerre nucléaire se serait déclenchée. Cette pièce a été construite dans un endroit jadis tenu secret, construit pour les membres du Congrès américain, sous le Greenbrier, un hôtel quatre étoiles non loin des White Sulphur Springs, Virginie Occidentale.

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Une porte anti-explosion de 25 tonnes. Elle ouvrait sur ce bunker nucléaire gardé secret, construit pour les membres du Congrès sous le Greenbrier. Faisant plus de 10 000 mètres carrés, ce bunker a été achevé en 1961. Il accueillait suffisamment de lits et de vivres pour pouvoir accueillir 535 élus, chacun accompagné d'un assistant. On y trouvait aussi des chambres de décontamination, une unité de soins intensifs et une salle de communication. Tout cela entouré de un ou un mètre et demi de béton.

Les douches de décontamination à l'intérieur du bunker nucléaire, construit pour les membres du Congrès, sous le Greenbrier.

Une porte anti-explosion de 18 tonnes. Elle était auparavant cachée derrière un pan amovible. C'est l'entrée de cet abri nucléaire secret sis sous le Greenbrier pour les membres du Congrès.

L'ancienne cafétéria du bunker des membres du Congrès, sous le Greenbrier.

Voilà l'empreinte d'un ancien bâtiment, le K-25, on y enrichissait de l'uranium à destination des armes nucléaires américaines. Il se dressait à Oak Ridge, Tennessee. Construit dans le secret du projet Manhattan, le K-25 avait une forme de U. Il a été un temps le plus grand bâtiment du monde n'ayant qu'un seul toit. 12 000 personnes y travaillaient. L'uranium enrichi ici s'est retrouvé dans la bombe que les États-Unis ont lâchée sur Hiroshima, au Japon. Le ministère de l'Énergie a achevé la destruction de l'immense bâtiment après cinq ans de travaux en 2014.

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Des touristes visitent la zone de test Trinity au champ de missile de White Sands, pas loin de San Antonio, New Mexico. Le 16 juillet 1945, des scientifiques travaillant avec le Projet Manhattan ont fait exploser la première bombe nucléaire sur ce site. Le département de la Défense n'autorise sa visite que deux jours par an.

Une réplique de "Fat Man", la bombe larguée par l'armée américaine sur Nagasaki au Japon, lors de la Seconde Guerre. Elle est présentée sur une remorque, au milieu du site de Trinity.

Un signe d'avertissement sur une grille qui entoure Trinity.

Des visiteurs du champ de missiles de White Sands, Nouveau Mexique, regardent un "Hound Dog", un missile supersonique de la Guerre Froide, qui pouvait être lancé depuis un B-52 et qui pouvait transporter une tête nucléaire. On trouve là-bas plus de 50 missiles et roquettes. Ils étaient testés sur zone.

Une borne en béton délimite le site connu sous le nom de "Plot M", qui se trouve dans un parc public en banlieue de Chicago. Il prévient le visiteur que des déchets nucléaires venus du premier réacteur nucléaire du monde, le Chicago Pile, mais aussi d'autres expérimentations nucléaires, sont enterrés dans le sol des Red Gate Woods. Conçu par le physicien italien Enrico Fermi pour le projet Manhattan de 1942, le Chicago Pile a été construit à la base sous un stade de football américain de l'université de Chicago. Il a été déplacé à Red Gate Woods en 1943 et enfin enterré dans ce parc, dans un endroit appelé "Site A."

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La salle de contrôle du réacteur au graphite X-10. Le deuxième réacteur construit dans le monde, après Chicago Pile. On la visite à Oak Ridge National Laboratory,  Oak Ridge, dans le Tennessee. Construit en secret pendant le projet Manhattan, le réacteur a fourni du plutonium aux scientifiques de Los Alamos pour des essais nucléaires. Le X-10 fera bientôt partie du futur Manhattan Project National Historical Park.

La face de charge du réacteur X-10, vue à travers la fenêtre de la salle de contrôle du Oak Ridge National Laboratory.

Le cratère Sedan, formé par une détonation thermonucléaire de 104 kilotonnes en 1962. Un lieu de visite majeur pour ceux qui ont la chance d'être de l'une des 12 visites annuelles du Nevada National Security Site, au nord-ouest de Las Vegas, dans le Nevada. La détonation nucléaire a déplacé 12 millions de tonnes de terre. Le trou est profond d'une centaine de mètres.

Le coffre-fort Mosler, construit pour jauger les effets des frappes nucléaires sur les constructions civiles. Il a survécu à une explosion de 37 kilotonnes en 1957 sur le Nevada National Security Site. Après l'explosion, des ouvriers ont enlevé la porte du coffre et ont constaté que la fausse monnaie entreposée dedans était en bon état.

On l'appelle la "Apple-2 House", c'est l'une des deux maisons qui reste de Doomtown, une fausse bourgade américaine qui était faite de voitures, mobilier public, mannequins. Elle se trouvait à plus de 150 kilomètres au nord-ouest de Las Vegas. Doomtown a été détruit par un test de bombe atomique en 1955. Le but était de mesurer les effets d'une bombe sur un environnement civil. La maison se trouvait à un peu plus d'un kilomètre et demi du coeur de l'explosion de 29 kilotonnes.

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Du blé a poussé autour et à l'intérieur de l'ancien site de lancement d'un Minuteman, un type de missile balistique intercontinental. Ce n'est pas loin de Wall, dans le Dakota du Sud. Tout ce qui reste de ce site de lancement, qui abritait un missile avec une ogive de 1,2 mégatonne, c'est une barrière de barbelé autour d'un champ vide.

Un missile balistique intercontinental de type Minuteman. Désarmé, il repose dans un tube de lancement, non loin de Wall, Dakota du Sud, à la station Delta-09. Le site de lancement a été désactivé en 1994, après la signature du traité START, qui vise à la réduction de l'armement nucléaire, par le président américain George H. W. Bush et le leader soviétique Michael Gorbachev. Le National Park Service a depuis fait du lieu un musée, le Minuteman Missile National Historic Site.

Des touristes passent la porte anti-souffle du Delta 01-Launch Control Facility, dans la région de Wall, Dakota du Sud.

L'une des deux serrures qui commande le lancement d'un missile au Delta 01-Launch Control Facility.

Le bureau de l'officier qui devait assister le lancement au Delta 01-Launch Control Facility.

La porte anti-explosion de la base de lancement November-33, elle protégeait jadis un missile Minuteman. Aujourd'hui le site est géré par la North Dakota Historic Society. La photo est prise au crépuscule, à Cooperstown, dans le Dakota du Nord. Le missile a été enlevé pour satisfaire les conditions posées par le traité START.

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Des mauvaises herbes poussent sur le béton qui entoure la chambre d'un ancien silo à missile qui a abrité un missile thermonucléaire Sprint, près de Hampden, dans le Nord Dakota. Les missiles anti-balistiques de type Sprint, faisaient partie du Safeguard Program. Leur but pendant la Guerre Froide, c'était d'intercepter des attaques préventives visant les missiles Minuteman qui étaient disséminés dans la zone. Reste que le Safeguard Program n'a été opérationnel que pendant une petite année, au milieu des années 1970, avant que le Département de la Défense, embêté par le coût et l'efficience réelle du programme.

Ce qu'il reste d'un radar anti-missile en forme de pyramide. Il se trouve au Stanley R. Mickelsen Safeguard Complex, qui a été construit durant la Guerre Froide. Son rôle était de détecter une attaque nucléaire provenant de l'Union Soviétique. Il se trouve non loin de Nekoma, dans le Dakota du Nord. Le complexe a été achevé en 1975 et a été opérationnel pendant un peu moins d'un an, lorsque le Safeguard Program a été arrêté par le Département de la Défense.

Le coeur radioactif du réacteur F de Hanford, l'un des neuf réacteurs nucléaires construits pour fournir du plutonium aux armes nucléaires, repose désormais non loin des rives de la Columbia River à Hanford, dans l'État de Washington. Il faudra attendre 75 ans de plus avant que le coeur soit suffisamment stable pour être démonté. Construit vers la fin de la Seconde Guerre mondiale, dans le cadre du projet Manhattan, le site de Hanford est l'un des plus toxiques de l'hémisphère Ouest sur le plan nucléaire. Le nettoyage du site tentaculaire doit durer jusqu'en 2060, et devrait coûter 150 milliards de dollars aux contribuables américains.

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Les ruines de la Hanford High School, qui devrait devenir l'un des bâtiments du futur Manhattan Project National Historical Park. En 1943, le gouvernement américain a fait usage du droit de préemption pour obtenir cette immense étendue de terre pour y établir ce qui deviendra le Hanford Site. Il a ainsi déplacé 1 500 personnes de trois petites villes.

À travers la vitre d'un bus de touristes qui visitent le site d'Hanford, on voit le premier réacteur nucléaire, complet, construit dans le monde. Ce bâtiment historique s'appelle le réacteur B. Il a été construit en secret en 1943-1944. Il a produit le plutonium utilisé dans la bombe Fat Man lâchée sur Nagasaki, au Japon. Le site fera lui aussi partie du futur Manhattan Project National Historical Park.

Des visiteurs regardent le coeur du réacteur B.

Un panneau de contrôle de la pression au sein de la salle de contrôle du réacteur B à Hanford.

Un employé de Hanford vu à travers un écran de contrôle. Il porte une combinaison de protection de niveau B. Il est en train de nettoyer la salle la plus dangereuse du site d'Hanford, la Plutonium Finishing Plant's Americium Recovery Facility, connue aussi sous le nom de la "Salle McCluskey". La salle tient son nom d'un ancien employé, Harold McCluskey, qui a été blessé en 1976 lorsqu'une boîte à gant de laboratoire a éclaté avec un récipient à l'intérieur, l'exposant, lui et la pièce, à un matériel radioactif.

Le coeur radioactif du réacteur DR sur le site d'Hanford. C'est l'un des neuf réacteurs fabriqués pour produire du plutonium pour les armes nucléaires. On le voit à travers la vitre d'un bus à Hanford. Il dort aujourd'hui dans un coffre de béton.

Le champignon atomique est le logo de la Richland High School Bombers. De très nombreux travailleurs du site d'Hanford venaient de Richland.