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Drogue

L’Ontario va privatiser la vente de cannabis

Le nouveau gouvernement ontarien autorisera des entreprises privées à vendre du cannabis, annulant ainsi la décision du précédent gouvernement.
Photo : Darryl Dyck/La Presse Canadienne

En vertu de la décision de la première ministre libérale Kathleen Wynne, le Liquor Control Board of Ontario détenait le monopole de la vente de cannabis dans la province, et 40 boutiques devaient ouvrir en 2018, puis 80 en 2019 et 150 d’ici 2020.

Mais des sources ont révélé à VICE que le gouvernement du nouveau premier ministre, Doug Ford, prévoit d’autoriser des entreprises privées à vendre du cannabis en Ontario. Des contacts dans l’industrie nous ont écrit jeudi par l’entremise des médias sociaux que le gouvernement en fera officiellement l’annonce le 31 juillet. Toutefois, la province supervisera toujours la distribution du produit en gros et la vente en ligne.

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« Je tiens de source sûre que le commerce de détail privé sera l’avenir de la vente de cannabis en Ontario. Nous avons gagné », dit Jack Lloyd, un avocat qui a défendu des dispensaires accusés de trafic de drogue. Il espère que cette décision permettra aux dispensaires sur le marché noir d’avoir accès au marché légal. « Si Doug Ford veut vraiment traiter les contribuables de l’Ontario équitablement, il accordera des licences aux dispensaires. »

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Cependant, il craint que le gouvernement n’accorde des licences qu’à des chaînes comme Shoppers Drug Mart et Sobeys. « Il y a un risque que ce soit juste pour les grandes compagnies qui, à cause de leurs exigences opérationnelles, ne peuvent pas répondre aux besoins du marché. Seules les petites entreprises peuvent régler ce problème, ajoute-t-il. La province va économiser des milliards de dollars si elle accorde des licences aux dispensaires existants. » Par ailleurs, la police devrait selon lui immédiatement cesser de faire des arrestations liées au cannabis.

« C’est la meilleure nouvelle de tous les temps pour la province », a écrit sur Facebook jeudi soir Clint Younge, le PDG de MMJ Canada, une chaîne nationale de dispensaires. « C’est très émouvant pour moi, parce que j’ai eu tellement de nuits blanches, on a subi des descentes, on a toujours respecté les normes et essayé de montrer l’exemple. La pression m’a presque arrêté plusieurs fois, et ça fait du bien de voir les efforts porter leurs fruits parce que j’aime MMJ Canada et je l’ai dans le sang, et c’est encore mieux de savoir que mes employés seront protégés. »

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Un porte-parole du premier ministre n’a pas encore répondu à notre demande d’entrevue.

Tyler James, un directeur de Sensible Ontario, un groupe de défense du cannabis, qui travaillait dans un dispensaire Eden à Toronto avant que la police de Toronto fasse cesser les activités, a dit jeudi qu’il était heureux de la nouvelle de la privatisation en Ontario. Mais il reste prudent. « J’ai été très surpris, mais on ne sait toujours pas exactement ce qui va être annoncé. »

Il voudrait que la province rende la demande de licence pour les détaillants aussi accessible que possible, de façon à inclure ceux qui étaient auparavant exclus. « J’espère qu’ils laisseront le marché décider qui sont les meilleures entreprises », a-t-il dit, en soulignant que les personnes des communautés marginalisées et à faible revenu devraient être incluses.

Le monopole gouvernemental des libéraux avait été sévèrement critiqué par ceux qui souhaitaient que le marché du cannabis en Ontario soit ouvert. Ils estimaient entre autres que les 40 magasins pour desservir une province de 14 millions de personnes ne répondraient pas à la demande. À Toronto seulement, il y a plus de 80 dispensaires.

« J’ai tellement hâte de faire une demande et d’être autorisée à vendre du cannabis. Ça fait 18 ans que j’attends », dit Abi Roach, propriétaire de Hotbox Lounge, un salon de cannabis établi depuis longtemps à Kensington Market. Elle est également membre de la Cannabis Friendly Business Association de la ville, qui a poussé les politiciens municipaux à accorder des licences commerciales aux entreprises de cannabis locales.

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« Je pense que depuis le début le plan était ridicule et, quand Doug Ford a été élu, il savait que ça ne marcherait pas », ajoute-t-elle. La décision d’autoriser les dépanneurs à vendre de l’alcool lui avait donné l’espoir qu’il privatiserait aussi la vente de cannabis. « Il n’y a aucune raison que le gouvernement ait le monopole de quoi que ce soit, sauf les routes et l’éducation. »

Deepak Anand, vice-président aux relations avec le gouvernement chez Cannabis Compliance, a dit jeudi soir qu’il avait entendu des rumeurs sur la privatisation au cours de la dernière semaine. « Le modèle privé ira bien en Ontario, dit-il. C’est aussi une excellente nouvelle pour les petits acteurs, le fait qu’on ne dépende pas d’un monopole gouvernemental pour construire ça. Mais le diable est toujours dans les détails. » Il assure qu’il portera une attention particulière aux mécanismes qui seront mis en place pour protéger les petites entreprises. « Et je suis préoccupé par les taxes et le taux de marque du gros. »

M. Anand cherchera aussi à en savoir plus sur le nombre d’accords que le gouvernement de l’Ontario a conclus avec des producteurs autorisés pour la vente de cannabis récréatif, le nombre de kilogrammes de cannabis que ces transactions représenteront, pour voir si ce sera suffisant pour répondre à la demande dans la province.

Chuck Rifici, le fondateur de Nesta, une société d’investissement privé qui investit dans les compagnies de l’industrie du cannabis, et cofondateur de Tweed, un fournisseur de cannabis, pense que cette décision aidera à éliminer le marché noir. « Ça devrait accélérer la transition du marché noir vers la vente réglementée, juge-t-il, ce qui entraînera une augmentation des recettes fiscales de la province, tout en lui épargnant la plupart des coûts d’infrastructure pour établir des points de vente de détail. »