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FRANCE

Christiane Taubira démissionne de son poste de ministre de la Justice

La ministre de la Justice Christiane Taubira a présenté sa démission de son poste de Garde des Sceaux ce mercredi 27 janvier. C'est ce qu'a annoncé la présidence de la République française dans un communiqué publié peu après 9 heures.
Christiane Taubira après le vote de la loi sur le mariage pour personnes du même sexe (Ericwaltr / Wikimedia Commons)

La ministre de la Justice Christiane Taubira a présenté sa démission de son poste de Garde des Sceaux ce mercredi 27 janvier. C'est ce qu'a annoncé la présidence de la République française dans un communiqué publié peu après 9 heures.

Cette démission intervient quelques heures avant que le projet de révision de la Constitution soit débattu en Commission des Lois à l'Assemblée Nationale. Un projet de révision qui a opposé Christiane Taubira entre autres à son Premier ministre, Manuel Valls.

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Mme — Élysée (@Elysee)27 Janvier 2016

Dans son communiqué, l'Élysée a expliqué, en parlant de l'ancienne Garde des Sceaux et du président François Hollande, qu' "Ils ont convenu de la nécessité de mettre fin à ses fonctions au moment où le débat sur la révision constitutionnelle s'ouvre à l'Assemblée nationale, aujourd'hui, en Commission des Lois."

François Hollande dans son communiqué salue ensuite le travail de sa ministre qui "aura mené avec conviction, détermination et talent la réforme de la Justice et joué un rôle majeur dans l'adoption du mariage pour tous".

C'est Jean-Jacques Urvoas qui a été désigné ce mercredi matin comme le ministre de la Justice. Présenté comme un proche de Manuel Valls, il est député socialiste du Finistère, et était aussi président de la Commission des lois.

Elle part en citant Aimé Césaire

« Je quitte le gouvernement sur un désaccord politique majeur, » a expliqué l'ancienne Garde des Sceaux à la mi-journée. Lors d'une conférence de presse depuis le ministère de la Justice elle est d'abord revenue sur le bilan de ses années au poste de ministre, avant d'évoquer les raisons de son départ. « Je reste fidèle a moi-même, à mes engagements, à mes combats, à mon rapport aux autres.

La ministre a estimé que le « péril qui nous menace est grave », évoquant les attaques terroristes qui ont touché la France. « Mais nous savons comment le combattre » a-t-elle prévenu, expliquant que « nous ne devons lui concéder aucune victoire, ni militaire, ni diplomatique, ni symbolique », visant sans le nommer le projet de révision constitutionnel sur lequel s'est construit le désaccord qui a motivé son départ.

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« Ce pays peut entendre que son destin collectif repose sur des fondations solides » a-t-elle conclu, « notamment son identité civique ». Pour Taubira ces fondations sont suffisamment « profondes pour résister aux accidents, et aux tragédies ». Avant de quitter l'estrade, sans répondre à des questions, elle a cité le poète Aimé Césaire : «Il n'est pas question de livrer le monde aux assassins d'aube.»

Christiane Taubira avait plus tôt réagi sur Twitter, quelques instants après le communiqué de l'Élysée, par ces mots :

Parfois résister c'est rester, parfois résister c'est partir. Par fidélité à soi, à nous. Pour le dernier mot à l'éthique et au droit.ChT

— Christiane Taubira (@ChTaubira)27 Janvier 2016

Fière. La Justice a gagné en solidité et en vitalité. Comme celles et ceux qui s'y dévouent chaque jour, je la rêve invaincue. ChT

— Christiane Taubira (@ChTaubira)27 Janvier 2016

Depuis le début du quinquennat de François Hollande en mai 2012, Christiane Taubira occupait le poste de ministre de la Justice, sous l'autorité successive de deux Premiers ministres : Jean-Marc Ayrault puis Manuel Valls. Mais avant d'arriver place Vendôme, Taubira était déjà une figure bien connue de la scène politique française, notamment grâce à son engagement pour la Guyane.

En 1978, après un passage à Paris pour faire des études d'économie à Assas, Christiane Taubira retourne en Guyane, où elle est née en 1952, pour participer au MOGUYDE (Mouvement guyanais de décolonisation) en tant que militante indépendantiste. Abandonnant par la suite le militantisme pur et dur, elle décide de fonder le parti politique Walwari en 1993, toujours en Guyane.

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La même année, elle devient députée de Guyane — un poste qu'elle occupera jusqu'en 2012. Au cours de ses dix premières années en tant que parlementaire, elle va notamment donner son nom à la loi tendant à la reconnaissance de la traite et de l'esclavage en tant que crime contre l'humanité — adoptée en 2001. En 2002, elle se présente aux élections présidentielles avec l'étiquette du Parti radical de gauche, où elle obtient un peu plus de 2 pour des voix.

Après cet échec, elle est à nouveau élue députée de Guyane en juin 2002. À l'orée des présidentielles de 2007, elle rejoint l'équipe de Ségolène Royal pour être « déléguée à l'expression républicaine ». Après la défaite de la candidate du PS, Taubira est réélue députée et tente en 2010 de briguer le poste de présidente de région de la Guyane — sans succès. Pour les présidentielles de 2012, elle décide de soutenir le candidat Arnaud Montebourg, qui échouera aux primaires socialistes face à François Hollande.

Une fois nommée ministre de la Justice, Taubira va notamment marquer les esprits en portant le projet de loi du mariage homosexuel adopté en avril 2013, après plusieurs mois d'opposition de divers collectifs, notamment celui dit de la « Manif' pour tous ». La Garde des Sceaux va également porter un projet de réforme pénale, qui sera promulguée en août 2014, malgré quelques désaccords avec le ministre de l'Intérieur de l'époque, Manuel Valls.

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Ces incompatibilités avec la ligne défendue par celui qui est depuis devenu Premier ministre vont se révéler insurmontables, notamment après les attaques de Paris du 13 novembre. Taubira déclare, publiquement et à plusieurs reprises, son opposition au projet de loi constitutionnelle qui prévoit entre autres la déchéance de nationalité pour les binationaux nés Français et condamnés pour des faits de terrorisme.


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Christiane Taubira après le vote de la loi sur le mariage pour personnes du même sexe (Ericwaltr / Wikimedia Commons)