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Crime

Exécutions en Indonésie : La France poursuit ses efforts diplomatiques pour éviter celle de Serge Atlaoui

Le Français, condamné à mort pour trafic de drogue a été retiré à la dernière minute de la liste des exécutions qui ont eu lieu ce mardi en raison d’un recours administratif, mais le sursis dont il bénéficie est fragile.
Photo par Tatan Syuflana/AP

Au lendemain de l'exécution en Indonésie de huit personnes accusées de trafic de drogue, le ministre des Affaires étrangères français Laurent Fabius a réaffirmé ce mercredi que « tout l'effort diplomatique » de la France était destiné à éviter que Serge Atlaoui, 51 ans, lui aussi condamné pour trafic de drogue, connaisse le même sort. La France n'a que peu de marge de manoeuvre pour éviter que la condamnation à mort du français soit effective. Serge Atlaoui a été retiré in extremis de la liste des exécutions par le parquet indonésien samedi dernier. Sa femme a dénoncé ce mercredi au micro de RTL « une torture psychologique intense ».

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Ce mardi, huit personnes — deux Australiens, un Brésilien, quatre Nigérians et un Indonésien — ont été fusillées par un peloton de 12 personnes sur l'île de Nusakambangan, au large de Java. Serge Atlaoui, qui aurait dû figurer parmi eux a bénéficié d'un sursis, le temps que le tribunal étudie un recours administratif.

Sabine Atlaoui, sa femme a exprimé son désespoir ce mercredi matin : « Qui est-ce qu'ils exécutent ? Des innocents […] Mon mari a été retiré de la liste mais il y a eu tout de suite une annonce du procureur général qui stipule que l'on n'attendra pas la troisième vague pour exécuter Serge Atlaoui : 'Dès que le recours administratif est fini, on l'exécute'. Et ça passe dans les médias, c'est une torture psychologique intense » a déclaré l'épouse du condamné à mort, qui se rend environ tous les ans en Indonésie pour rendre visite à son mari.

En 2005, Serge Atlaoui, père de quatre enfants et originaire de Metz est arrêté dans un laboratoire clandestin de fabrication d'ecstasy. Le journal Le Républicain Lorrain raconte que ce français se trouvait alors dans cette usine de la banlieue de Djakarta, la capitale de ce pays d'Asie du Sud-Est, parce qu'il avait accepté un emploi de soudeur, dans une entreprise dont il pensait qu'elle fabriquait de l'acrylique d'après ses dires. Il a toujours nié avoir connu les réelles fonctions de l'entreprise.

Il est condamné dans un premier temps à la prison à perpétuité, avant de voir sa peine aggravée en appel par la Cour suprême qui le condamne à mort. En janvier 2015, le président indonésien Joko Widodo, qui a fait de la lutte contre la drogue le cheval de bataille de son mandat refuse de gracier Serge Atlaoui. Pendant sa campagne, Joko Widodo, avait annoncé qu'il n'y aurait « pas de grâce » dans les affaires de drogue.

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Jeudi dernier, le ministre des Affaires étrangères français Laurent Fabius a dénoncé les « graves dysfonctionnements » de la justice indonésienne dans le procès du Français, qui, contrairement aux personnes à l'origine du trafic de drogue, n'a pas eu le droit de faire appel à des témoins ou à des experts durant son procès.

L'intervention de Laurent Fabius a eu lieu alors que l'Indonésie mettait en place les préparatifs pour les exécutions. La France est entrée dans une phase diplomatique intensive pour tenter de sauver son ressortissant, dans laquelle le président de la République s'est personnellement impliqué. « S'il est exécuté, il y aura des conséquences avec la France et l'Europe parce qu'on ne peut pas accepter ce type d'exécutions », a déclaré François Hollande à la presse lors d'un déplacement à Baku, en Azerbaïdjan.

Malheureusement pour Serge Atlaoui, hormis des relations diplomatiques, la France n'a que peu d'intérêts directs partagés avec l'Indonésie, dont elle n'est que le dix-huitième partenaire économique. L'Australie, et la Brésil, qui ont des relations bien plus approfondies avec l'Indonésie n'ont pas réussi à empêcher la mise à mort de leurs ressortissants. L'Australie a annoncé, par la voix du Premier ministre Tony Abott, qu'elle rappelait son ambassadeur pour consultation après l'exécution de Myuran Sukumaran et Andrew Chan, et le Brésil, qui avait demandé la clémence pour son ressortissant qui aurait été schizophrène, a fait part de sa « profonde consternation ».

L'avocat de Serge Atlaoui, Me Richard Sédillot a toutefois fait part de son espoir ce mercredi matin, en déclarant, à l'antenne de France Info, avoir observé dans la presse un changement de mentalité, dans un pays où 85 pour cent des citoyens sont favorables à la peine de mort. Il a également parlé de l'entourage du président indonésien où il y aurait « des gens qui ont parfaitement compris que Serge Atlaoui est innocent, qui s'interrogent vraiment et qui posent des questions. »

Suivez Mélodie Bouchaud sur Twitter : @meloboucho