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Indonésie

Huile de palme : Amnesty dénonce l’exploitation d’enfants par plusieurs multinationales

Neuf grandes multinationales de l'agroalimentaire, de produits ménagers ou cosmétiques vendent des produits contenant de l'huile de palme produite dans des conditions « scandaleuses », alerte l'ONG.
Image d'illustration. Un homme dans une plantation d'huile de palme. (Photo via Flickr/Craig Morey)

Colgate-Palmolive, Kellogg's, Nestlé, Unilever… Neuf grandes multinationales de l'agroalimentaire, de produits ménagers ou cosmétiques vendent des produits contenant de l'huile de palme produite dans des conditions « scandaleuses ». Dans un nouveau rapport publié ce mercredi 30 novembre, Amnesty International dénonce des graves atteintes aux droits humains qui ont court en Indonésie dans la production d'huile de palme — achetée par la suite par de grandes multinationales.

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Pour réaliser son rapport, l'ONG a réalisé plusieurs enquêtes dans des plantations installées en Indonésie. Le pays est le plus gros producteur d'huile de palme dans le monde, avec 35 millions de tonnes par an. L'ONG a recueilli le témoignage de 120 ouvriers de différentes plantations, appartenant au géant singapourien de l'agricole Wilmar.

Parmi les abus constatés, l'ONG dénonce l'emploi d'enfants de 8 à 14 ans dans un environnement dangereux et éprouvant physiquement. Selon le rapport, ils travaillent « sans tenue de protection dans des lieux où des pesticides toxiques sont utilisés et portent des sacs de fruits de palmier à huile qui peuvent peser de 12 à 25 kg. » Pour aider leurs familles, beaucoup gagnent les plantations l'après-midi — après l'école —, le week-end ou pendant les vacances.

Mais certains ont quitté le système scolaire pour travailler à temps plein dans les plantations. Comme ce garçon de 14 qui a quitté l'école à 12 ans et travaille maintenant dans une plantation appartenant à Wilmar. « J'aide mon père tous les jours depuis environ deux ans. […] J'ai quitté l'école pour aider mon père car il ne pouvait plus faire son travail. Il était malade, » a-t-il témoigné à Amnesty International. « Je regrette d'avoir quitté l'école. […] J'aimerais devenir enseignant. »

Le rapport dénonce aussi le traitement des femmes dans ces plantations. Elles sont souvent payées en dessous du salaire minimum et doivent travailler pendant des longues heures. Elles s'obligent parfois à réaliser heures supplémentaires non-payées, sous peine de voir leur salaire diminuer. Ces femmes n'ont droit ni à une retraite ni à une assurance maladie. Au total, elles gagnent environ 2,50 dollars (2,30 euros) par jour.

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En outre, l'ONG fait aussi état de graves lésions dues à un pesticide hautement toxique qui est interdit par l'UE et même par l'entreprise propriétaire des plantations, Wilmar.

Les multinationales ne nient pas les atteintes aux droits humains

La directrice de recherches à Amnesty International, Meghna Abraham, reproche aux entreprises de fermer « les yeux sur l'exploitation des travailleurs dans leur chaîne d'approvisionnement. Bien qu'elles aient promis à leur clientèle qu'il n'y aurait plus d'exploitation dans leurs chaînes ».

« Les grands groupes comme Colgate, Nestlé et Unilever assurent aux consommateurs et consommatrices que leurs produits emploient de l'"huile de palme durable", mais nos conclusions révèlent que ce n'est absolument pas le cas, » indique-t-elle. « Les atteintes aux droits humains découvertes […] ne sont pas des cas isolés ; elles sont généralisées et sont la conséquence prévisible des méthodes de travail de cette entreprise. »

Selon le rapport, « Wilmar a reconnu qu'il existait des problèmes concernant les conditions de travail dans ses plantations. ». Amnesty International indique avoir identifié neuf multinationales de l'agroalimentaire qui utilisent des produits de l'entreprise singapourienne. Aucune « n'a nié l'existence de ces atteintes aux droits humains ». Mais aucune n'a fourni d'exemples de mesures qui permettraient de lutter contre ces violations.

« Il n'est pas normal que neuf sociétés réalisant ensemble un chiffre d'affaires de 325 milliards de dollars en 2015 soient incapables d'agir face au traitement épouvantable d'ouvriers de l'huile de palme qui gagnent une misère », s'indigne Meghna Abraham.

L'Indonésie a pourtant une législation stricte, selon laquelle « la plupart de ces pratiques peuvent constituer des infractions pénales ». Mais comme l'indique le rapport, la loi est rarement appliquée.

Amnesty International appelle le pays à « améliorer le contrôle de l'application de la loi et à enquêter sur les atteintes aux droits humains ». L'ONG demande également aux entreprises de « préciser si l'huile de palme présente dans des produits de très grande consommation (…) est issue des activités de Wilmar en Indonésie ».


Suivez Henrique Valadares sur Twitter : @HenriqValadares