FYI.

This story is over 5 years old.

Nouvelles

« Nous ne savons même pas si elle est en vie »

Sur fond de panique, des collègues de Homa Hoodfar pressent le Canada et l'Irlande d'en faire plus pour assurer sa libération d'une prison iranienne.
Photo : Université Concordia

L'entourage d'Homa Hoodfar, emprisonnée en Iran depuis le 6 juin, est profondément inquiet. « Nous ne savons même pas si elle est en vie », a laissé tomber Kimberley Manning, directrice de l'Institut Simone de Beauvoir, au cours d'une conférence de presse mercredi matin à l'Université Concordia.

Les collègues et défenseurs d'Hoodfar somment les gouvernements canadien et irlandais de faire tout ce qui est en leur pouvoir pour que la professeure canadienne soit libérée le plus rapidement possible.

Publicité

Ses défenseurs se faisaient malgré tout discrets jusqu'ici, le temps des négociations diplomatiques entre le Canada et l'Iran. Mais de nouvelles bribes d'information les poussent à sortir de l'ombre.

Hoodfar a été hospitalisée la semaine dernière à la suite de la détérioration de son état de santé. La professeure souffre de myasthénie, une maladie neuromusculaire qui cause une faiblesse musculaire. Dans de graves cas, le malade peut se retrouver incapable de respirer par lui-même, tant les muscles de sa cage thoracique sont affaiblis. La famille d'Hoodfar ignore si elle a accès à sa médication. « C'est une urgence. C'est une question de vie ou de mort », presse Manning.

Ce qu'on sait sur l'arrestation d'Hoodfar
Les circonstances de l'arrestation d'Homa Hoodfar demeurent nébuleuses. La professeure est isolée dans la prison iranienne d'Evin, « mais elle n'a jamais été inculpée de manière formelle », précise Marc Lafrance, professeur au Département de sociologie et d'anthropologie de Concordia.

Hoodfar est une professeure retraitée, qui a étudié les enjeux féministes au Moyen-Orient. On l'accuse notamment d'avoir mené une campagne de propagande contre l'Iran et d'avoir tenté de fomenter une révolution féministe. Ces chefs d'accusation ont été communiqués par les médias, et non par les tribunaux, ce qui est contraire aux lois iraniennes, rappelle Lafrance.

Depuis son arrestation, Hoodfar n'a été en contact avec son avocat que deux fois, pour des entretiens très brefs. Le premier n'a eu lieu que pour s'assurer que la professeure était en vie. Elle n'a pas même eu le droit de parler de son cas à son avocat, qui n'a toujours pas accès à son dossier juridique.

Comment l'Irlande pourrait intervenir
On demande à l'Irlande de déployer plus d'efforts pour libérer Hoodfar, qui a la triple nationalité canadienne, irlandaise et iranienne. Le Canada a rompu ses relations diplomatiques avec l'Iran en 2012, mais l'Irlande y a encore un consulat; elle aurait donc plus de poids dans les négociations. Des professeurs de plusieurs universités irlandaises ont d'ailleurs manifesté aujourd'hui devant l'ambassade de l'Iran à Dublin.

Mais cette manifestation ne trouvera pas écho à Montréal pour l'instant. Les défenseurs d'Hoodfar craignent que les démonstrations de solidarité sur la place publique soient perturbées par des messages anti-islamiques. « Lorsqu'on organise et se mobilise de cette façon, on est toujours susceptibles et vulnérables à des dérapages non voulus, explique Lafrance. Le fait que ça implique le Moyen-Orient, des questions de droit de la femme, c'est définitivement un dossier chaud. » Les défenseurs d'Hoodfar veulent envoyer un message clair, mais aussi que toute l'attention demeure centrée sur elle.

Ils recommandent d'envoyer des lettres au premier ministre Justin Trudeau, ainsi qu'au ministre des Affaires étrangères, Stéphane Dion, pour maintenir une pression constante.

Suivez Justine de l'Église sur Twitter.