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Crime

La guerre contre la drogue aux Philippines fait tellement de morts qu’il est difficile de les compter

Depuis l’élection du président Rodrigo Duterte, des centaines de personnes ont été tuées, mais personne n’est certain du nombre exact.
Le président Rodrigo Duterte, et le chef de la police nationale le 17 aout 2016. (Noel Celis/Pool Photo via AP)

Des centaines de dealers de drogue et de toxicomanes présumés ont été tuées aux Philippines depuis que le président Rodrigo Duterte a été élu en mai. Si l'indignation internationale va grandissant face à la vague d'assassinats extra-judiciaires, conserver une trace du nombre exact de victimes est devenu de plus en plus complexe.

Lundi, le chef de la police nationale Ronald dela Rosa a déclaré au Sénat philippin que plus de 1 900 suspects liés à la drogue ont été tués au cours des sept dernières semaines. Bien que largement cité par les médias, ce chiffre tranche nettement avec le décompte des morts confirmées. Il est publié par le Philippine Inquirer. Selon la « kill list » (la liste des personnes tuées) du journal, il y a eu 712 meurtres en lien avec la drogue depuis le 10 mai, le jour où Duterte a été élu.

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Selon Sanho Tree, directeur du « Drug Policy Project », basé à Washington, le chiffre de 1 900 victimes inclut les plus de 700 meurtres confirmés par des agents de police. Il faut y ajouter des centaines de meurtres supplémentaires commis par des membres de groupes d'auto-défense.

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« C'est la différence entre le décompte [fait par] la police des fusillades impliquant la police […] et les groupes d'auto-défense, les escadrons de la mort, ou les assassins individuels qui laissent des pancartes disant « Je suis un dealer de drogue » sur les corps, mais aucune autre preuve », a expliqué Tree. Pour ces derniers cas, « nous ne savons pas qui commet le meurtre » dit-il.

En réponse à la consommation grandissante de méthamphétamine aux Philippines, Duterte a offert de décerner des médailles et des primes aux citoyens et aux officiers de police qui tuent des suspects liés à la drogue.

Tree explique qu'il est possible que certains des meurtres attribués aux groupes d'auto-défense puissent avoir été commis par la police, mais « la police a rapporté ses tableaux de chasse — ils n'ont pas été gênés à ce sujet, donc je ne vois pas pourquoi ils n'en rapporteraient pas plus. »

Tree a aussi noté que des agents de police qui n'étaient pas en service peuvent être impliqués dans les meurtres de suspects liés à la drogue.

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« Cela pourrait être comme en Amérique latine, comme nous avons pu le constater pendant des décennies, particulièrement dans les années 1980 et 1990. L'épuration sociale était effectuée par les escadrons de la mort paramilitaires, ou par la police en dehors des heures de travail », précise-t-il. « Vous enlevez vos uniformes et vous mettez un t-shirt noir, et hop, vous êtes des paramilitaires et personne ne peut vous identifier. Vous pouvez commettre des meurtres en toute impunité de cette manière. »

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Tree a aidé à organiser une manifestation contre les assassinats mardi devant l'ambassade des Philippines à Washington et des manifestations similaires se sont tenues à New York et à San Francisco.

Après que deux responsables des droits de l'homme à l'ONU ont récemment publié une déclaration assurant que les suspects liés à la drogue aux Philippines devraient être « jugés devant une Cour de Justice, non par des tireurs dans la rue », Duterte les a qualifiés de « stupides » et a menacé de retirer le pays des Nations Unies.


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Cet article a d'abord été publié sur la version anglophone de VICE News

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