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Crime

L’aide au suicide est désormais légale au Canada, mais personne ne sait combien en profitent

Le suicide médicalement assisté est légal partout au Canada depuis juin, et au Québec depuis décembre.
Julia Lamb, militante pour le droit à mourir. (Jonathan Hayward/CP)

Des centaines de Canadiens ont choisi de mourir en profitant d'une aide médicalement assistée cet été, depuis qu'une nouvelle loi fédérale a autorisé des adultes avec des maladies en phase terminale à mettre fin à leurs jours, avec l'assistance d'un médecin ou d'une infirmière.

Des militants défendant le droit à mourir s'inquiètent malgré tout du fait que le gouvernement canadien ne comptabilise pas correctement le nombre de patients qui ont choisi une mort médicalement assistée. Cette loi, passée en juin, requiert que le gouvernement fédéral compte le nombre de Canadiens qui choisissent cette pratique, mais cela n'est toujours pas fait.

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Selon des chiffres de la Société-Radio Canada (CBC), au moins 100 Canadiens, pratiquement tous issus des États de l'Ontario (Centre) et de la Colombie-Britannique (Côte ouest), ont mis fin à leurs jours à l'aide d'un médecin depuis l'adoption de la loi fédérale. L'État de l'Ontario a commencé à distribuer gratuitement des médicaments pour le suicide médicalement assisté.

Mais ce chiffre est probablement beaucoup plus important. Car plusieurs régions n'ont fourni aucune donnée. Par exemple, les statistiques ne prennent pas le Québec en compte, qui a adopté sa propre législation sur la mort médicalement assistée en décembre, avant que la loi nationale ne soit présentée. En juillet, un groupe défendant le droit à mourir dans cette région a rapporté que depuis décembre 253 patients avaient demandé cette procédure ; et que 166 personnes étaient décédées de cette manière.

Alors que la légalisation du suicide médicalement assisté a été saluée par les partisans des libertés individuelles, de nombreux chefs religieux et groupes de protection des personnes handicapées ont qualifié la pratique comme un affront fait à la dignité humaine.

En février 2015, la Cour suprême du Canada a abrogé une partie du code pénal qui bannissait le suicide médicalement assisté, donnant ensuite au gouvernement fédéral un an pour instaurer une nouvelle loi qui permettrait aux adultes souffrant d'une maladie douloureuse et irréversible d'être conduits vers la mort par un médecin.

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Plusieurs mois se sont écoulés entre la décision du tribunal et le délai accordé au gouvernement. Entre-temps, les Canadiens pouvaient demander à profiter du suicide médicalement assisté en passant par des procédures juridiques. Ils ont été nombreux à recevoir des permissions spéciales pendant cette période.

Shanaaz Gokool, PDG de l'organisation Mourir avec dignité - Canada (Dying with Dignity), nous a dit que le gouvernement fédéral devrait commencer à comptabiliser les morts assistées « avant qu'il ne soit trop tard » et à élargir les données collectées pour inclure les personnes actuellement en soins palliatifs, ainsi que ceux ont mis eux-mêmes fin à leurs jours après que leur demande a été rejetée.

Elle a donné l'exemple de plusieurs personnes, au Québec, qui ont cessé de boire ou de manger lorsque leur demande a été refusée.

« Lorsque les gens, qui pensaient entrer dans les conditions posées par la loi, vont découvrir que ce n'est pas le cas, ils vont se tourner vers d'autres options », a dit Mme Gokool. « Et ce sont des informations importantes, que le gouvernement devait prendre en compte. »

Le gouvernement progressiste a fait passer sa loi, malgré de nombreuses critiques de militants favorables au droit à mourir, qui l'accusent de violer la Constitution — et l'arrêté initial de la Cour suprême — en permettant une mort médicalement assistée seulement aux Canadiens porteurs de maladies terminales dont la mort est imminente. Ils avancent également que la loi devrait inclure des personnes qui souffrent mentalement et physiquement, même si elles ne sont ni en phase terminale ni proches de la mort.

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La British Columbia Civil Liberties Association (Association en faveur des libertés individuelles de la Colombie Britannique), a ainsi poursuivi le gouvernement fédéral en justice une nouvelle fois, en demandant que la nouvelle loi soit abrogée puis élargie.

Le témoin clé de cette procédure est une femme de 25 ans, originaire de la Colombie-Britannique, avec une amyotrophie spinale (atrophie nerveuse des muscles) et qui se déplace en fauteuil roulant.

« Je suis terrifiée par le fait que je pourrais rester dans un état de souffrance physique et mentale qui pourrait durer des mois, des années voire des décennies. De devoir penser à un tel futur, ça me fait souffrir énormément, physiquement », a dit Julia Lamb lors d'une conférence de presse au début de l'été.

Le directeur juridique de l'association a rajouté que la nouvelle loi « aura un effet pervers, en forçant des Canadiens qui sont malades à se contenter de méthodes violentes ou illégales » pour mettre fin à leurs jours.

La ministre de la Justice, Jody WIlson-Raybould, a défendu la nouvelle loi, en avançant qu'elle est conforme à la Constitution et qu'elle respecte les droits des Canadiens car « raisonnée, prudente et réfléchie ».

Un porte-parole de l'Association canadienne des médecins a dit à la CBC que ses membres étaient contents de la loi et que « les choses semblent se passer relativement bien, dans le respect de la quantité de médecins disponibles et aussi dans le respect des lois. »

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Suivez Rachel Browne sur Twitter : @rp_browne

Cet article a d'abord été publié sur la version anglophone de VICE News.

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