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Le retour de la Manif pour tous

Reportage dans le cortège d’un mouvement qui entend peser sur la prochaine élection présidentielle.
Henrique Valadares / VICE News

« PMA, GPA, on ne lâchera pas, tous ensemble pour mener le combat », pouvait-on entendre de la Porte Dauphine à la place du Trocadéro ce dimanche après-midi. Après deux ans d'absence, le mouvement de la Manif pour tous a réinvesti les rues de Paris ce dimanche 16 octobre, sous le mot d'ordre « Ne plus subir » et avec l'ambition de se faire entendre par les candidats à la prochaine élection présidentielle.

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Selon la préfecture de police, 24 000 personnes ont répondu à l'appel de l'association La Manif pour tous. Ils étaient 200 000 selon les organisateurs qui annoncent un « succès ». On est pourtant loin des mobilisations passées. En mars 2013, le mouvement avait ainsi revendiqué 1,4 million de manifestants. Selon la police, 300 000 personnes avaient ce jour-là battu le pavé contre la loi Taubira — adoptée un mois plus tard, elle avait ouvert le mariage civil aux personnes du même sexe.

Lors de la dernière grande manifestation, en octobre 2014, la police estimait que 70 000 personnes étaient présentes, 500 000 selon les organisateurs.

Une mobilisation qui dépasse la contestation de la loi Taubira

Dans le cortège de ce dimanche on trouve beaucoup de familles, se revendiquant catholiques. Des personnes de tous âges, venues parfois de toute la France. Elles brandissent des pancartes,demandent l'abrogation de la loi considérée comme une « violation des droits de l'enfant », crient leur hostilité à la procréation médicalement assistée (PMA) ou à la gestation pour autrui (GPA). Cette dernière reste interdite en France, mais beaucoup voient dans la loi Taubira un premier pas vers la GPA.

« Je manifeste contre le changement de la société et ces projets qui vont de plus en plus loin, à l'encontre du droit des enfants », lance Alice, une étudiante de 22 ans. « Je ne suis pas contre l'amour entre deux homosexuels, mais contre cette société où l'on peut fabriquer un enfant de toutes pièces à partir de la PMA et bientôt de la GPA. »

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Anne, même âge, est venue avec ses parents, originaires de Lyon. Comme pour beaucoup de manifestants, elle place la présidentielle au centre de cette marche. « Il y aura sûrement un changement de gouvernement en 2017, donc on veut se faire entendre auprès du prochain président. »

À la tribune de la Porte Dauphine, une femme lance : « ne donnons pas nos voix à ceux qui disent que la loi Taubira ne doit pas être abrogée ! »

Si tous avancent « vouloir être entendus », on a vu peu de candidats à la présidence en ce dimanche ensoleillé.

Seul candidat des Républicains à vouloir abroger la loi, Jean-Frédéric Poisson, président du Parti chrétien-démocrate, a été très applaudi. Pas de visite en revanche de François Fillon. Le candidat qui a reçu le soutien officiel du groupe Sens Commun, issu de la Manif pour tous, veut amender la loi sans pour autant l'abroger.

La participation de Marion Maréchal-Le Pen n'est pas passée inaperçue. Reçue sous les applaudissements, la députée Front National du Vaucluse a fait un discours sur « les parents, la patrie et la civilisation », mêlant politique familiale, abrogation de la loi Taubira, crise identitaire et montée de l'islam en France.

Le candidat à la primaire des Républicains, Jean-Frédéric Poisson.

Au centre, le député de la Drôme Hervé Mariton.

Parmi les autres figures politiques présentes, on a vu Louis Aliot, vice-président du FN, Gilbert Collard, député du Gard, Robert Ménard maire de Béziers (Hérault), le candidat Nicolas Dupont-Aignan, député de l'Essonne et président de Debout la France, ou encore le député de la Drôme Hervé Mariton, farouche opposant au mariage pour tous.

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« Contre l'endoctrinement de l'enfant »

« Un enfant a besoin d'un père et d'une mère pour avoir une identité », nous explique Bernadette. Pour cette catholique pratiquante de 63 ans, « la loi Taubira les brouille. C'est pour ça qu'elle doit être abrogée. »

Comme d'autres manifestants, cette mère de quatre enfants cible l'enseignement de la « théorie du genre » dans les écoles — une pratique qui n'existe pas avait souligné la ministre de l'Éducation nationale, dénonçant une campagne de désinformation sur la réalité des programmes scolaires.

« C'est scandaleux qu'on dise à nos enfants 'maman ne fait plus la vaisselle' » poursuit Bernadette. « C'est la preuve qu'on leur apprend la théorie du genre. Ce n'est pas une question d'égalité hommes-femmes : il faut accepter leurs différences biologiques. »

Plusieurs kilomètres plus loin, après que le mouvement a traversé le XVIe arrondissement, la Place du Trocadéro se remplit en partie. Des familles s'assoient sur l'herbe, comme Marie, 39 ans, venue de Versailles avec sa sœur et ses trois neveux. « Je veux protéger mes enfants de la théorie du genre : les garçons ne doivent pas pouvoir jouer avec les filles à la crèche, par exemple », nous lance cette mère de cinq filles. « Le but de ce gouvernement est de tromper les enfants en leur disant qu'ils peuvent choisir entre être un garçon ou une fille. »

En fin d'après-midi, six Femen arrivent sur la Place du Trocadéro, avec la phrase « Ne plus vous subir » sur leurs poitrines nues, un détournement du mot d'ordre de la Manif pour tous : « Ne plus subir ». Elles sont rapidement évacuées sans ménagement par les forces de sécurité.

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Les — Antoine Marette (@antoine_marette)16 octobre 2016

Le mouvement de la Manif pour tous n'a pas encore annoncé de futures mobilisations. Malgré une mobilisation plus faible que par le passé, l'objectif de se faire entendre dans la campagne présidentielle semble toutefois en partie atteint. Invitée à la tribune, Agnès Marion, élue FN du 7e arrondissement de Lyon et conseillère régionale de l'Auvergne-Rhône-Alpes, lance que « l'abrogation de la loi Taubira sera dans le programme de Marine le Pen ». Une annonce saluée par de forts applaudissements et des banderoles qui s'agitent du côté de la foule.


Texte et photos par Henrique Valadares, suivez-le sur Twitter : @HenriqValadares

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