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Tchad

Le Tchad a lancé une vaste opération contre Boko Haram dans les îles du Lac Tchad

Ce week-end, l’armée tchadienne semble avoir lancé une contre-offensive dans les îles du lac Tchad contre les membres de la secte— qui auraient emporté une trentaine de personnes dans leur fuite.
Vue aérienne du lac Tchad. (Google Map)

Ce week-end, le conflit armé qui oppose les forces tchadiennes aux membres de la secte Boko Haram s'est intensifié sur plusieurs fronts autour et sur le lac Tchad. Le gouvernement tchadien, après des attaques quasi quotidiennes ces dernières semaines du groupe armé sur son territoire, aurait en effet lancé « une grande opération de ratissage » selon des termes prêtés par une source proche des autorités locales citée par l'AFP. Plusieurs accrochages ont eu lieu entre samedi et lundi, alors que les différents pays de la région s'organisent pour accélérer la création d'un front armé commun contre la secte islamiste.

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En réponse aux nombreuses attaques du groupe Boko Haram sur le sol tchadien ces dernières semaines, le gouvernement du pays aurait dépêché près de 1 000 hommes des forces de sécurité dans la zone du lac Tchad ce week-end, afin « d'occuper toutes les îles et neutraliser Boko Haram » selon une source sécuritaire citée ce mardi par le média Jeune Afrique. Selon cette même source, l'opération a d'abord consisté à évacuer les habitants de la zone, dont 90 pour cent « ont déjà rejoint la terre ferme. »

Ce samedi, les combattants de Boko Haram ont d'abord attaqué plusieurs villages de l'île de Medi Kouta avant d'être repoussés par les forces de sécurité tchadiennes. Les échanges de tirs auraient fait six morts et quinze blessés chez les insurgés. Un soldat tchadien aurait également perdu la vie.

Emplacement de l'île de Medi Kouta. Capture d'écran via Google Maps

Les observateurs y voient une réponse aux incursions des djihadistes qui viennent dans cette région depuis le Nigeria voisin. « L'État islamique - Wilaya d'Afrique de l'Ouest, » (nouveau nom de Boko Haram depuis mars et son allégeance à l'organisation terroriste État islamique) multiplie les attaques sanglantes au Nigeria et ses pays voisins depuis plusieurs semaines.

À lire : Flambée d'attentats dans la région du lac Tchad : au moins 140 morts en une semaine

Tenus en échec par l'armée, les islamistes ont causé de nombreux dégâts — incendies, pillages — sur leur passage. Selon une autre source citée par un média tchadien, les combattants de Boko Haram ont "enlevé beaucoup de femmes et d'enfants ». On avance une trentaine de personnes qui n'ont pas encore été retrouvées.

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Ce lundi, d'autres affrontements ont eu lieu à Baga Sola, une ville située au nord du lac. Les forces gouvernementales auraient intercepté un convoi d'insurgés en fuite, ce qui a donné lieu à de « violents combats » qui se sont étendus jusque dans la soirée de lundi.

Aucune information officielle n'a pour l'instant été donnée concernant la poursuite de la mission des forces tchadiennes sur le lac. VICE News a contacté ce mardi le ministère tchadien de l'Intérieur ainsi que le porte-parole du gouvernement, mais n'a pas pu obtenir de précisions sur ces opérations dans les délais de rédaction de cet article.

Les communications sont extrêmement difficiles dans cette région, les informations pouvant parfois mettre plusieurs jours avant d'être acheminées. Le lac Tchad s'étend par ailleurs sur un large périmètre fait de zones herbeuses et d'îles sur lesquelles sont juchés de nombreux villages. Ce lac relie le Cameroun, le Niger, le Nigeria et le Tchad, quatre pays impliqués dans la lutte contre Boko Haram opère.

Joint au téléphone par VICE News ce mardi après-midi, Thierry Vircoulon est le directeur du projet Afrique centrale à l'International Crisis Group. Il nous rappelle que la saison des pluies va bientôt s'installer sur le lac Tchad. « Il est probable que l'armée désire mener le plus d'actions possible avant que les eaux ne montent, » nous indique-t-il, « car la zone va rapidement devenir un endroit où il sera très facile pour les islamistes de se cacher. »

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Selon lui, la lutte entre Boko Haram et l'armée tchadienne a donc lieu sur « deux fronts bien particuliers, » à savoir la capitale N'Djamena mais aussi dans les hautes herbes du lac Tchad. « Boko Haram est solidement enraciné à cet endroit » ajoute-t-il, « face à cela, les puissances régionales — et notamment le Tchad — ont choisi la réponse militaire. »

Ce week-end, des attaques ont été attribuées à Boko Haram à la pointe nord du Cameroun. Une fillette de 12 ans s'est fait exploser samedi soir dans un bar de la ville de Maroua, tuant 20 personnes. Dimanche, sept personnes ont été tuées lors de raids menés dans des villages, dont trois villageois décapités.

Le gouvernement camerounais a annoncé ce lundi à la radio nationale que 2 000 hommes —majoritairement des gendarmes et des policiers — allaient être déployés en renfort dans le nord du pays, afin de « débusquer » les cellules qui préparent des attentats suicides.

Ce mercredi, le président du Nigeria Muhammadu Buhari est attendu par son homologue au Cameroun où ils devraient évoquer la lutte contre Boko Haram. Une « alliance régionale forte » est demandée par la présidence nigériane, qui attend beaucoup de la Force d'intervention conjointe multinationale (MNJTF) en cours de création.

Le déploiement de cette force est prévu pour la fin du mois de juillet. Elle devrait être composée de 8 700 hommes fournis par le Nigeria, le Cameroun, le Tchad, le Niger et le Bénin.

Suivez Pierre-Louis Caron sur Twitter : @pierrelouis_c

Vue aérienne du lac Tchad. (Capture d'écran via Google Map)