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Etats-Unis

Les avocats d'El Chapo questionnent la légalité de l'extradition du narcotrafiquant

Selon eux, les autorités américaines auraient violé le protocole et induit en erreur le gouvernement mexicain lors de l'extradition d'El Chapo.

Placé à l'isolement, il avait commencé par se plaindre du fait qu'il n'avait pas d'eau en bouteille dans sa cellule. Puis, il avait promis de ne pas s'échapper lors des « visites de contact » avec ses avocats. Maintenant, le boss du cartel de Sinaloa, Joaquin « El Chapo » Guzmán, estime qu'il n'aurait jamais dû se retrouver dans une prison de haute sécurité de Manhattan.

Les avocats commis d'office du baron de la drogue mexicain ont déposé une requête la semaine dernière pour faire annuler les chefs d'accusation qui pèsent sur lui. Selon eux, les autorités américaines auraient violé le protocole et induit en erreur le gouvernement mexicain, quand Guzmán a été extradé d'une prison de Juarez pour se retrouver dans le District Est de New York.

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Le procès d'El Chapo est prévu pour avril prochain. Il est accusé de blanchiment d'argent et d'infractions liées à la drogue et aux armes. S'il est reconnu coupable, il pourrait passer le reste de sa vie sous les verrous.

D'autant plus que la dernière tentative de ses avocats a peu de chance d'aboutir. Une décision récemment rendue par une cour d'appel dans une affaire semblable laisse penser qu'elle n'aboutira sûrement pas. De plus, le juge chargé de l'affaire d'El Chapo s'était déjà montré sceptique, quand ses avocats avaient évoqué les problèmes liés à la légalité de son extradition.

Cela dit, les documents déposés par les avocats soulèvent des questions apparemment légitimes sur l'extradition d'El Chapo – notamment, pourquoi s'est-il retrouvé à New York, alors que le Mexique avait donné son accord pour une extradition au Texas ou en Californie.

Les avocats d'El Chapo, Michael Schneider et Michelle Gelernt, ont écrit au juge Brian Cogan que les autorités américaines ont utilisé des déclarations qui « contenaient des informations fausses et trompeuses » pour s'assurer de la soudaine extradition d'El Chapo, le 19 janvier dernier. Ils estiment aussi que les lois ont été interprétées d'une certaine manière pour qu'El Chapo soit jugé à New York.

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Pendant des années, le Mexique a refusé d'extrader El Chapo, estimant qu'il devait répondre à la justice de son pays. Mais après son audacieuse évasion de 2015, le gouvernement du président Enrique Peña Nieto a accepté d'envoyer El Chapo au nord de la frontière pour être jugé.

Le Mexique a accepté la demande d'extradition le 20 mai 2016. Les documents indiquaient qu'El Chapo serait envoyé à San Diego (Californie) ou El Paso (Texas), où sont installées deux des sept cours fédérales qui ont des dossiers contre lui. L'appel d'El Chapo a été rejeté par un juge mexicain le 19 janvier. Quelques heures plus tard, il a « soudainement et sans avertissement… été hélitreuillé aux États-Unis, » comme le disent ses avocats.

Pour envoyer El Chapo à New York – et dans la prison de haute sécurité de Manhattan, le Metropolitan Correctional Center – les autorités américaines ont dû obtenir une permission spéciale de la part de leurs homologues mexicains, remplissant ce qu'on appelle une « requête d'exception ». En règle générale, ce processus prend des jours ou des semaines. Pour le cas d'El Chapo, il a suffi de quelques heures. Ses avocats trouvent ça louche.

« Miraculeusement, cette requête a aussi été faite le 19 janvier 2017, peut-être quand Monsieur Guzmán était à 30 000 pieds dans les airs, s'envolant un peu plus loin d'El Paso et de San Diego, » ont écrit les avocats du narcotrafiquant. « Encore plus étonnant, le Bureau du Procureur général mexicain a rendu son avis sur cette Requête d'Exception le même jour. »

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Ajoutant à l'intrigue, le gouvernement a refusé de fournir une copie de la « requête d'exception » aux avocats d'El Chapo. Donc, difficile de savoir quelle justification a été utilisée pour changer le lieu de détention.

Les avocats d'El Chapo ont aussi découvert que la première requête d'extradition se basait sur des témoignages de témoins peu fiables, notamment « un ancien officiel corrompu des forces de l'ordre mexicaines et narcotrafiquant, » qui s'est contredit à de multiples reprises. Une autre source était un ancien employé d'El Chapo « connu pour consommer de la cocaïne, environ 4 grammes de cocaïne par jour au cours des 15 années précédant son arrestation. »

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Malheureusement pour El Chapo, la Cour d'appel du Second Circuit – dont dépendent les cours fédérales de New York – a récemment indiqué que les plaintes concernant les « requêtes d'exception » peuvent uniquement être déposées par le pays responsable de l'extradition, et non par les inculpés. Les avocats d'El Chapo estime que cette décision est « mauvaise », et que d'autres cours d'appel fédérales sont « divisées » sur le sujet.

Pendant l'une des premières audiences d'El Chapo en février, le juge Cogan a été réticent à entendre les avocats d'El Chapo sur les irrégularités dans le processus d'extradition. Le juge a dit qu'El Chapo n'avait pas besoin de signer les documents d'extradition pour qu'ils soient officiels, et qu'ils pourraient « tomber sur le sol » et toujours être juridiquement contraignants.

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Les avocats d'El Chapo estiment aussi que les autorités américaines n'auraient pas dû avoir le droit de demander 14 milliards de dollars de confiscation de biens. Ce chiffre correspond peu ou prou à la valeur de 250 tonnes de cocaïne, que le narcotrafiquant aurait exporté aux États-Unis pendant sa carrière. Ses avocats disent que la confiscation n'est pas permise selon les termes de son extradition.

El Chapo sera à nouveau au tribunal à Brooklyn le 14 août, et les irrégularités soulevées par ses avocats seront sûrement à l'ordre du jour.


Plongée dans le Triangle d'Or, le fief du cartel de Sinaloa

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