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FRANCE

Cette nuit, les unités d’élite ont participé à un exercice anti-terroriste grandeur nature gare Montparnasse

Organisé dans la nuit de mardi à mercredi dans la gare Montparnasse à Paris, cet exercice anti-terroriste visait à enterrer des tensions et incompréhensions entre ces trois brigades d’élite, qui ont chacune des pratiques et une histoire bien...
Photo via Ministère de l'Intérieur / DICOM/ Y. Malenfer

En plein milieu de cette nuit de mardi à mercredi, 9 policiers d'élite jouant le rôle de terroristes ont pénétré armes à la main, ceintures d'explosifs pour certains, dans la gare centrale de Montparnasse, à Paris. Ils jouent le scénario d'un exercice hors-norme, dont certains détails rappellent l'attaque avortée d'un train Thalys et l'attaque de la salle de concert du Bataclan.

Les faux terroristes se sont scindés en plusieurs équipes, après avoir fait feu sur la foule, jouée par quelques figurants, des élèves policiers. Comme le soir du 13 novembre 2015 au Bataclan, c'est une unité de police qui arrive en premier rapidement et qui fait feu pour abattre un terroriste situé dans l'entrée de la gare, alors que deux autres prennent des otages dans une salle. Le reste des assaillants a pris possession de wagons de train dans lesquels se trouvent également des otages.

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Les forces d'élite d'intervention françaises entrent à leur tour dans la gare, sous les yeux du ministre de l'Intérieur. Pour la première fois sont associées les équipes de la BRI, du RAID et du GIGN. L'assaut est donné par un commandement central, comme on peut le voir ci-dessous sur les images d'i-Télé. Il est simultané dans chaque endroit où se trouvent les terroristes. L'exercice se termine aux environs de 2h00 du matin.

Vidéo via I-Télé

Plus qu'un simple entraînement, cet exercice visait à tester en conditions réelles le schéma d'intervention présenté quelques heures plus tôt par le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve. En cas de nouvelle attaque terroriste sur le sol français, le gouvernement prévoyait déjà que les policiers de la brigade anti-criminalité (BAC) ou les « supergendarmes » des pelotons Sabre soient suffisamment équipés pour pouvoir contenir une situation de crise, en attendant l'intervention des brigades d'élite. Mais c'est justement sur ce point que des zones de friction et des lacunes avaient été relevées ces derniers mois. Notamment sur leur capacité à se déployer sans se gêner et en se cordonnant.

Le plan présenté ce mardi après-midi par Bernard Cazeneuve établit que désormais, peu importe l'endroit, la gestion des situations dite « d'urgence absolue » — comme un attentat, une prise d'otage ou une fusillade de grande ampleur — reviendra aux premières unités qui arriveront sur les lieux.

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Capacité de parachutage ou d'effraction

Face à des situations où chaque minute compte, la mésentente des différentes unités d'élite françaises pouvait avoir des conséquences dramatiques. Malgré le découpage de la France en zones de compétence — la police dans les agglomérations, la gendarmerie en zone rurale —, et le fait que certaines situations fassent l'objet d'accords spécifiques, comme la sécurité des centrales nucléaires qui a été confiée à la gendarmerie en 2009, de nombreuses zones floues subsistaient néanmoins. À Paris et dans certaines régions françaises, des luttes de territoire avaient notamment été rapportées.

Le GIGN devrait désormais pouvoir intervenir dans la capitale française, mais aussi placer ses hommes sous un commandement mixte police/gendarmerie, une première en France.

En charge de la bonne entente entre ces trois unités, l'Unité de coordination des forces d'intervention (UCoFI) a par ailleurs établi une liste de compétences spécifiques, propres à chaque unité. Il y a par exemple la capacité à être parachuté, à assurer des soins, ou encore à entrer par effraction. Un tableau d'aptitude qui devrait permettre d'y voir plus clair dans la manière dont le GIGN, le Raid et la BRI pourront s'épauler en cas de besoin. En clair, si une situation réclame une compétence précise, l'unité la plus en capacité entrera en action.

Fin octobre 2015, deux semaines avant les attentats du 13 novembre à Paris et Saint-Denis, Bernard Cazeneuve avait déjà appelé à instaurer davantage de « cohérence » entre les brigades territoriales et les unités d'intervention spécialisée. Un appel réitéré le 29 février dernier, alors qu'il présentait de nouveaux équipements pour la police dans un commissariat à Paris.

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À lire : Les policiers de la BAC patrouilleront désormais avec un fusil d'assaut militaire

« Il en va tout simplement de la sécurité de la France », avait alors déclaré le ministre de l'Intérieur, après avoir expliqué que le nouveau découpage tactique des brigades d'intervention devait permettre à chaque service de « gagner en efficacité dans sa zone de compétence ou dans son domaine d'excellence ».

Trois unités, trois histoires

Face à la diversité des situations de crise et des zones de compétence, la France s'est doté depuis les années 1960 de trois unités d'élite, qui ont chacune des missions bien spécifiques.

Les Brigades de Recherche et d'intervention (BRI) sont les plus anciens de ces services. Créées en 1964, elles dépendent directement de la police judiciaire, et mènent à ce titre des enquêtes, surveillent des individus, et organisent parfois des opérations d'intervention. Il y a une quinzaine d'antennes de la BRI en France, qui sont pilotées par l'Office central de lutte contre le crime organisé (OCLCO). Les hommes de cette unité ont notamment participé à la libération des otages du magasin Hyper Cacher à Paris en janvier 2015, puis à la neutralisation des terroristes du Bataclan le 13 novembre dernier.

Les deux autres unités d'élite française ne mènent pas d'enquêtes et sont spécialisées dans les interventions face à des situations de crise, en milieu parfois très hostile. C'est le cas du GIGN, créé au début des années 1970 et rendu célèbre en France en 1976 suite à la prise d'otages de Loyada, à Djibouti (Afrique de l'Est). Lors de cet incident, les snipers du GIGN avaient éliminé plusieurs insurgés qui retenaient des enfants de militaires français dans un bus scolaire. La même année, une chaîne de télévision française avait filmé leur entraînement.

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Au fil du temps et des évènements, les missions du GIGN se sont progressivement centralisées autour de certains cas particuliers : la protection du Président de la République et des diplomates français à l'étranger, les détournements d'avion, les attaques chimiques, ou plus fréquemment lorsque des forcenés se retranchent chez eux avec une arme. Le GIGN peut également être appelé par les gendarmes pour effectuer des arrestations, surtout quand un suspect est jugé dangereux ou armé.

Dernier arrivé dans le milieu de l'intervention spécialisée, le RAID a été créé en 1985 avec la devise « Servir, sans Faillir ». Ses hommes participent à des missions similaires à celles du GIGN, mais au sein des grandes villes françaises cette fois-ci. Il bénéficie d'un large réseau (plus de 400 opérateurs répartis dans toute la France) qui le prévient en cas de crise grave. Si le RAID peut être appelé pour des affaires de terrorisme ou de grand banditisme, il est également chargé de sécuriser les grands évènements sportifs et culturels.

« Face à des ennemis déterminés à nous frapper en provoquant le plus de dommages possible, sans volonté de négocier […], nous avons besoin de forces performantes », a notamment déclaré le ministre de l'Intérieur ce mardi. « L'heure n'est pas à la concurrence des forces, mais a l'unité », a-t-il répété face à un parterre d'agents de ces trois unités spéciales.

Comme le GIGN, le Raid compte environ 400 hommes. Ces unités seront bientôt épaulées par de nouvelles antennes régionales. La BRI dispose, elle, d'une centaine d'agents d'élite, un chiffre qui devrait être doublé dans les mois à venir d'après Bernard Cazeneuve. Alors que la France est toujours en état d'urgence (depuis le 13 novembre), les autorités entendent muscler leurs dispositifs à l'approche de l'Euro de football qui aura lieu en juin prochain et sera suivi par une autre grande compétition sportive, le tour de France. Ce mercredi matin, le Premier ministre Manuel Valls a confirmé à France Info sa volonté de prolonger l'état d'urgence en juin et juillet.


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