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Macédoine : Face-à-face violent entre migrants et forces de l’ordre à la frontière

Suite à la mise en place d’un état d’urgence en Macédoine ce jeudi, les autorités du pays ont envoyé d’importants renforts à la frontière sud du pays — où près de 3 000 migrants seraient coincés.
Des migrants attendent devant la gare de la ville de Gevgelija, le 21 août 2015. EPA/Georgi Licovski.

VICE News regroupe ses articles concernant la crise migratoire mondiale sur son blog « Migrants ».

D'après plusieurs témoignages et vidéos tournées sur place, la police macédonienne a employé la force ce vendredi matin pour empêcher des centaines de migrants de traverser la frontière qui sépare la Grèce et la Macédoine. L'état d'urgence a été décrété aux frontières par le gouvernement macédonien ce jeudi, une décision prise en réponse à la crise des migrants dans la région. L'usage de gaz lacrymogène et de grenades assourdissantes par les forces de l'ordre pour disperser les migrants a été signalé. Selon les sources, ONG et médias, entre 4 et 10 personnes auraient été blessées lors des heurts avec les forces de l'ordre.

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Une source policière proche du dossier a confirmé à VICE News ce vendredi matin la présence de l'armée ainsi que de la police à la frontière. « Il n'y a pas eu de violences, pas du côté macédonien en tout cas, » déclarait pour sa part Ivo Kotevski, porte-parole du ministère macédonien des Affaires Intérieures (MVR) joint au téléphone par VICE News ce vendredi matin . La veille, Ivo Kotevski a annoncé l'entrée en vigueur de l'état d'urgence en Macédoine, autorisant l'armée à intervenir aux frontières du pays.

Dans une séquence vidéo qui aurait été tournée ce vendredi matin près de Gevgelija (une ville à la frontière) et qui a été diffusée par la chaîne de télévision serbe RTS, l'on aperçoit une foule d'hommes, de femmes et quelques enfants avec, en arrière-plan, une douzaine d'hommes vêtus de casques et de boucliers qui semblent protéger un périmètre. Plusieurs fois, il apparaît que certains individus lancent ce qui ressemble à des projectiles en direction des forces de l'ordre. Les séquences suivantes montrent des explosions de gaz lacrymogène et de grenades assourdissantes, qui finissent par disperser la foule.

Macedonian police fire tear gas to disperse thousands of migrants trying to enter from Greece- RTÉ News (@rtenews)21 Août 2015

Plus tard, dans cette même vidéo, des hommes en uniforme militaire sont filmés en train d'enfiler ce qui ressemble à des gilets pare-balles. Des blessures récentes sont visibles sur un jeune homme qui s'éponge le visage, assis par terre. Au milieu de la foule, plusieurs tentes sont installées. La vidéo s'achève sur une situation de face-à-face tendu entre les migrants et les forces de sécurité.

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Du côté grec de la frontière, dans la ville d'Idomeni (située à 5 minutes en train de Gevgelija), l'ONG Médecins sans frontières (MSF) a déclaré ce vendredi midi que ses équipes sur place soignaient des personnes ayant été « blessées par des éclats de grenades assourdissantes tirées par l'armée macédonienne ».

D'après MSF, près de 3 000 migrants seraient présents à cet endroit, un chiffre confirmé par des journalistes de l'AFP sur place. Selon les sources, entre 4 et 10 personnes auraient été blessées lors des heurts avec les forces de l'ordre.

Un carrefour migratoire

Dans cette zone, à travers laquelle serpente la voie de chemin de fer reliant Thessalonique (Grèce) à Skopje (capitale de la Macédoine), la pression migratoire a atteint des niveaux records ces dernières semaines. La ville de Gevgelija est progressivement devenue ces derniers mois un carrefour pour les milliers de migrants qui pouvaient y trouver un vélo, un bus ou un train afin d'atteindre le nord du pays puis la Serbie voisine.

Avant que l'état d'urgence ne soit décrété ce jeudi, les migrants avaient le droit de rester 72 heures maximum en Macédoine, le temps pour eux de traverser le pays. Pendant plusieurs mois, les transports en commun leur ont été interdits, puis la situation a évolué et des trains spéciaux ont été affrétés par les autorités macédoniennes . Finalement, l'affluence est devenue si forte - plusieurs fois des migrants ont tenté de s'introduire dans certains trains déjà bondés à Gevgelija - que les autorités macédoniennes ont décidé de fermer leurs frontières.

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Lors d'une visite à la frontière sud du pays le 16 juillet dernier, le président macédonien Gjorge Ivanov avait prévenu qu'il enverrait l'armée pour « assister la police afin de faire face à la vague de migrants illégaux. » Il lui fallait pour cela obtenir l'état d'urgence, ce qui est désormais le cas.

À l'heure actuelle, seuls les migrants légaux peuvent entrer sur le territoire macédonien. L'agence de presse officielle MIA indique que 400 mètres de grillages barbelés ont été installés à la frontière sud du pays.

La République de Macédoine se situe sur l'une des principales routes migratoires vers l'Europe. Venus pour beaucoup de Syrie ou d'Afghanistan, les migrants transitent d'abord par la Turquie puis par la Grèce, où ils accostent. D'après le Haut-commissariat aux réfugiés (HCR), 50 242 personnes sont arrivées en Grèce au cours du mois de juillet, contre 43 500 migrants pour l'ensemble de l'année 2014.

La grande majorité de ces migrants tentent ensuite de rejoindre la Serbie puis la Hongrie afin d'entrer dans l'espace Schengen. Leur destination finale peut être la France, l'Allemagne ou le Royaume-Uni.

À lire : « Les réfugiés feront tomber le mur » : La barrière anti-migrants de la Hongrie

D'après un rapport de l'ONG Amnesty International publié en juillet dernier, la région des Balkans est devenue un lieu de violences et d'abus de la part des autorités locales. En Macédoine par exemple, « de nombreux [migrants] sont détenus, parfois pendant des mois, » expliquait à VICE News Sian Jones, chercheuse pour cette ONG.

Suivez Pierre-Louis Caron sur Twitter : @pierrelouis_c

Des migrants attendent devant la gare de la ville de Gevgelija, le 21 août 2015. EPA/Georgi Licovski.