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FRANCE

Marseille : opération de police en cours dans le quartier de La Castellane

Les forces de police encerclaient ce quartier de Marseille, alors que le Premier ministre arrivait pour présenter un bilan de l’action du gouvernement dans cette ville du sud de la France.
Image via Flickr / Selden Vestrit

Ce lundi matin, des habitants du quartier de La Castellane, dans le XVeme arrondissement dans le nord de Marseille, ont appelé la police après avoir entendu des coups de feu d'arme automatique. Ils ont fait mention de la présence d'hommes armés utilisant des fusils d'assaut, peut-être de type Kalachnikovs. Certains témoins ont fait état de personnes masquées , équipées de gilets pare-balles. Le chef de la police est alors arrivé sur place avec d'autres membres des forces de l'ordre. Il a déclaré à la presse que des coups de feu ont été tirés à leur arrivée, sans pouvoir certifier que les tirs visaient les forces de police. Le quartier de la Castellane était complètement bouclé en fin de matinée. Pas de blessés à signaler. D'après le journal Le Point, aucun coup de feu n'était entendu depuis 10 heures du matin.

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Les forces spéciales d'intervention du GIPN se sont déployées, alors que les premiers éléments rapportés par des sources police et justice privilégiaient la piste du règlement de compte sur fond de contrôle de zone de trafic de drogue, un mois après une vague d'attaques début 2015, dont celles de Charlie Hebdo et de l'Hyper Cacher. À la fin de la matinée un hélicoptère survolait la zone alors que les forces de police procédaient à la sécurisation de la zone, où se trouvent des établissements scolaires. Pierre-Marie Bourniquel, Directeur de la Sécurité publique a indiqué en tout début d'après midi que la police se préparait à intervenir dans La Castellane, à la recherche des personnes impliquées dans la fusillade de ce matin. Le GIPN entrerait en premier, puis il serait suivi par la Brigade anticriminalité. Bourniquel prévenait également que des compagnies CRS pourraient être déployées ensuite sur zone.

Dispositif tjs en place autour de cité la Castellane GIPN / hélico et savonnage de planche en règle — Burgatt Stephane (@S_Burgatt)9 Février 2015

Échanges de coups de feu impliquant 10 personnes à La Castellane. Toutes les infos sur — Florian Launette (@FLaunette)9 Février 2015

Le Premier ministre Manuel Valls arrivait à Marseille en début d'après midi ce lundi, pour venir présenter les résultats de l'action du gouvernement en termes de lutte contre le trafic de drogue et les règlements de compte. En 2012, la sénatrice-maire PS des XVe et XVIe arrondissements de Marseille, Samia Ghali en avait appelé au renfort de l'armée, alors que les morts dans des règlements de compte se suivaient à un rythme soutenu. À l'époque, Manuel Valls, Premier ministre, avait octroyé plus de moyens et d'hommes.

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Ce lundi matin, dans une interview donnée au journal local La Provence, réalisée en amont de sa visite prévue depuis plusieurs jours, Manuel Valls, aujourd'hui Premier Ministre, se félicitait du « recul significatif de la délinquance à Marseille et dans les Bouches-du-Rhône : baisse des vols à main armée de 30 % en deux ans, diminution des violences physiques contre les personnes de 20 %, saisies records de stupéfiants et d'armes. »

Quelques heures après la publication de cette interview, des coups de feu sont donc entendus à La Castellane. Les détails de la fusillade sont encore flous dans le début de l'après-midi, mais plusieurs sources policières reprises par les médias français donnent du crédit au différend territorial entre plusieurs bandes rivales dans le trafic de drogue dans ce quartier dans lequel vivent plus de 6500 personnes.

Laurent Mucchielli est directeur de recherches au CNRS, et directeur de l'Observatoire régional de la délinquance et des contextes sociaux (ORDCS). Auteur du livre Sociologie de la délinquance (Armand Colin), il revient pour VICE News sur les particularités de la délinquance à Marseille et sur le quartier de La Castellane.

« C'est l'un de ces grands quartiers pauvres, l'un des plus connu parce qu'il est très grand , mais aussi parce que c'est là où Zinedine Zidane a grandi. C'est un quartier très enclavé, très fermé sur lui-même, ce qui s'explique par l'architecture même du bâti. C'est un quartier où il y a un trafic de drogue très important malgré les opérations policières qu'il y a eues. »

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« Marseille n'est pas une ville fondamentalement différente des autres villes françaises, mais il y a beaucoup de pauvreté à l'intérieur de la ville alors qu'à Paris ou à Lyon les zones de pauvreté ont été rejetées dans les banlieues, à l'extérieur de la ville, c'est la différence de Marseille, » explique le chercheur.

Pour Laurent Muchielli, la mauvaise réputation de Marseille est ancienne, et l'on a tendance à lire les événements marseillais sous ce prisme, pour « confirmer notre imaginaire ».

« Il y a des phénomènes de banditisme liés au trafic de drogue qui sont à la fois très intenses et très visibles. Ils ne sont pas uniques à Marseille. En Seine Saint-Denis, on retrouve la même chose mais là, ils sont concentrés sur un petit territoire, sur une ville, ils sont très visibles et très intenses, » explique-t-il. « Marseille, c'est un port, c'est le point d'entrée du trafic de cannabis qui vient pour la plupart de la vallée du Rif au Maroc, le premier producteur de cannabis pour toute l'Europe. »

Pour le chercheur, une réponse adaptée à la délinquance marseillaise doit passer par une meilleure prise en compte des particularités socio-économiques de la ville, dont le taux de chômage est structurellement plus élevé que la moyenne nationale, et pas seulement par un renfort policier qui « n'est qu'un outil parmi d'autres. S'il y a plus de présence, il y a plus de dissuasion, oui, mais ça ne résout pas le fond du problème," dit-il.

Suivez Etienne Rouillon sur Twitter @rouillonetienne

Mélodie Bouchaud a participé à la rédaction de cet article @meloboucho

Image via Flickr / Selden Vestrit