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FRANCE

Obligés de voter pour une fille

Pour la première fois en France et dans le monde, avec les départementales des 22 et 29 mars, les électeurs devront voter pour un binôme homme femme, assurant enfin 50 % de femmes dans les conseils départementaux, contre 13,8 % seulement aujourd’hui.
Image via Wikimedia Commons / Ksiamon

Les prochaines élections en France des 22 et 29 mars prochains, les élections départementales, se font via un scrutin « binomial mixte majoritaire à deux tours ». C'est parfaitement inédit en France et dans le monde. Les électeurs devront voter pour deux conseillers, un homme et une femme, qui exerceront leur mandat de façon indépendante mais qui seront élus sur un même ticket. La parité stricte qui sera ainsi imposée dans les conseils départementaux (jusqu'à présent appelés conseils généraux) est également un pas vers un renouvellement politique.

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« Il y aura désormais 50 % de femmes dans les assemblées départementales, alors qu'elles étaient jusqu'à présent « lanterne rouge » en termes de féminisation des assemblées locales, » explique à VICE News Mariette Sineau, politologue et directrice de recherches à Sciences Po, rappelant qu'aujourd'hui dans les conseils généraux, seulement 13,8 % des élus sont des femmes. Ce scrutin binominal paritaire est en partie rendu possible par la réduction du nombre de cantons, de 4 030 en 2011 à 2 054 en 2015, et de la réduction en termes de coûts qui va avec.

Les efforts de parité lors de ce scrutin ont été salués par le dernier rapport du Haut conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes, qui évalue la mise en place des lois de parité. Les auteurs du rapport — qui notent que les progrès en la matière ont surtout été accomplis grâce à des mesures contraignantes — s'inquiètent cependant des limites que pourrait opposer le « troisième tour », l'élection des présidents des conseils départementaux et la répartition des responsabilités après le 29 mars. On craint que la majorité des présidents désignés soient des hommes et que les dossiers d'importance leurs soient confiés en priorité.

Aujourd'hui, seuls 5 des 101 départements sont dirigés par des femmes, et rien dans les textes de loi n'empêche que ce scénario se reproduise. « La parité des candidatures ne veut pas dire forcément qu'il y aura un partage à égalité du pouvoir au sommet, » prévient Mariette Sineau, qui rappelle que malgré l'introduction d'une loi rendant obligatoire la parité des candidatures dans les villes de plus de 1 000 habitants, 48 % des femmes ont été élues conseillères municipales en 2014 mais seules 13 % ont été nommées maires.

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« Je dirais que les hommes s'accrochent d'autant plus aux postes de pouvoir qu'on leur a imposé la parité dans nombre de mandats électifs, et par conséquent dans toutes les fonctions exécutives, notamment au sommet, ils entendent garder la main, » analyse la politologue.

Ce nouveau mode de scrutin favorisera également le renouvellement de la classe politique. Mariette Sineau, explique que l'ancien mode d'élection, le scrutin uninominal majoritaire à deux tours était défavorable aux femmes en tant que « nouvelles venues ». La politologue rappelle que le mandat de conseiller départemental est « une sorte d'antichambre pour être investi candidat aux législatives ». Les assemblées départementales rendues plus accessibles aux femmes, pourront servir de tremplin pour l'investiture des partis politiques à la députation.

Avec cette parité obligatoire aux départementales, de nouvelles têtes, probablement plus féminines, devraient donc arriver dans les chambres parlementaires et dans le paysage politique.

Suivez Mélodie Bouchaud sur Twitter : @meloboucho

Image via Wikimedia Commons / Ksiamon