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Où en est la COP21 ?

Les négociateurs des 195 pays réunis au Bourget depuis une semaine ont passé ce lundi le relais à leurs ministres de l’Environnement, de l’Énergie ou des Affaires étrangères. Vendredi prochain, ils devront s’être accordés sur les options non tranchées.
Etienne Rouillon / VICE News

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« Ce matin s'ouvre pour la COP 21 la semaine de l'espoir », a déclaré ce lundi le président de la grande conférence sur le Climat — et par ailleurs ministre français des Affaires étrangères — Laurent Fabius, pour l'ouverture de la deuxième semaine de négociations.

Après une première semaine durant laquelle les négociateurs des différentes délégations ont planché sur les solutions et les formules qui pourraient figurer dans l'accord final, les membres de gouvernements prennent aujourd'hui le relais. Ce lundi s'est ainsi ouvert le « segment ministériel » : les ministres de l'Environnement, de l'Énergie ou des Affaires étrangères des 195 pays participants à la conférence sur le Climat doivent désormais trancher parmi les nombreuses options encore possibles.

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Leur base de travail, c'est le texte de projet d'accord de 43 pages qui a été remis ce samedi 5 décembre au président de la COP 21 — et qui est disponible en ligne sur le site de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC).

« Le projet d'accord sur lequel nous travaillons désormais est un peu plus court que le texte de lundi dernier, à l'entrée de la COP. Il contient un peu moins d'options. Les solutions se dessinent plus nettement », a déclaré Laurent Fabius ce lundi matin.

« Le travail préparatoire des négociateurs est d'assez bonne qualité et a permis de pas compromettre les chances d'aboutir à un accord, » nous explique Carole Mathieu, chercheuse au Centre énergie de l'Institut Français des Relations Internationales.

Vote à l'unanimité

Ce "brouillon" d'accord comporte encore plus de 900 crochets, chacun d'entre eux symbolisant une option sur laquelle les 195 parties ne se sont pas entendues lors de la première semaine de négociation.

Malgré tout, « On peut dégager trois bons points de la première semaine », estime Carole Mathieu : « La mise en place d'un mécanisme de révision de l'accord [normalement tous les 5 ans pour revoir les ambitions], la mise en place d'un objectif à long terme sur la réduction des émissions à effets de serre, ainsi que des avancées sur la question du financement — bien que ce point reste le plus ouvert, puisqu'on a peu d'éléments concrets. »

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Par exemple, le début l'alinéa 10 de l'article 6, qui porte sur les financements des mesures qui seront prévues par l'accord, dit ceci : « [La mobilisation de moyens de financer l'action climatique [doit] [devrait] [autre] être accrue [de façon prévisible et transparente] [au-delà des efforts antérieurs] [à partir de 100 milliards de dollars par an] à compter de 2020 (…).] »

Rien, dans cet article, n'a donc été encore validé — pas même le mode du verbe employé. Et il ne s'agit que de la première des trois options envisagées pour cet alinéa. Dans l'option 3, les 100 milliards en question ne sont pas même mentionnés, alors que les pays riches s'étaient engagés en 2009 à Copenhague à réunir ces 100 milliards de dollars, afin d'aider les pays en développement à faire face au changement climatique. Cette somme est considérée comme un minimum par ces derniers, et sans elle, ils ont d'ores et déjà annoncé qu'ils ne signeraient pas.

Or, pour être adopté, l'accord devra être validé à l'unanimité par les 195 pays lors du vote final, prévu ce vendredi. D'ici là, les ministres devront donc, un à un, trouver un compromis sur le contenu de tous ces crochets.

Des ministres « facilitateurs »

Le compte à rebours est lancé, car si le vote est certes prévu pour vendredi, le texte devra bien être finalisé avant, afin notamment de permettre sa validation par des juristes et sa traduction dans les six langues des Nations unies. « En raison des contraintes procédurales que vous connaissez, cela nous impose d'aboutir en réalité jeudi », a annoncé Laurent Fabius. « Notre objectif devrait être de pouvoir disposer mercredi d'une première vision d'ensemble de l'accord final », a même ambitionné le ministre français ce lundi matin.

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« Pour cette deuxième semaine, il y a deux volets qui doivent évoluer en parallèle : le volet atténuation du réchauffement climatique et le volet financement, » explique Carole Mathieu. Sans garantie de financements, les pays à qui l'on demande des efforts ne seront pas prêts à les faire — d'où l'intérêt de mener les deux combats de front d'après la chercheuse.

Pour y parvenir, Laurent Fabius a détaillé ce samedi la mise en place d'une nouvelle méthode de travail pour cette dernière semaine, destinée à faciliter la recherche rapide de compromis et la transparence du processus de négociation.

Plusieurs équipes de ministres internationaux — 14 ministres en tout — ont ainsi été chargées de travailler en particulier sur certains sujets cruciaux. Parmi ces sujets figurent : « le soutien » (c'est-à-dire le financement), « la différenciation » (gestion dans l'accord de la notion selon laquelle les pays développés ont jusqu'à présent plus pollué que les pays en développement), « l'ambition » (la portée de l'accord et ses mécanismes de révision), « l'action pré-2020 » (les actions à mettre en oeuvre avant la date d'entrée en vigueur de l'accord, en 2020), ou encore « l'adaptation » (adaptation aux conséquences du changement climatique).

Ces ministres, appelés des « facilitateurs », sont chargés de rencontrer les membres des délégations des différents pays lors de « consultations informelles », afin qu'ils puissent faire part de leurs opinions et demandes sur ces sujets. Parmi les « facilitateurs » nommés se trouvent par exemple les ministres des Affaires étrangères du Gabon et de Singapour, les ministres de l'Environnement du Brésil, de la Bolivie et de la Suède.

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« Accord procédural »

Les conclusions de ces différentes consultations seront ensuite présentées chaque soir à 19h par les ministres qui en sont responsables, lors de la réunion d'une nouvelle instance : le « Comité de Paris », comme l'a baptisée Laurent Fabius. Ce groupe, ouvert à toutes les parties, est celui qui sera chargé, au terme de ses débats, d'aboutir au texte d'accord final et de le transmettre à l'instance formelle qu'est la COP. Ses débats seront en théorie retransmis en direct sur le site de la Conférence.

La première réunion du Comité de Paris devait avoir lieu ce lundi à 19h, après les premières consultations des différents ministres « facilitateurs » qui ont commencé, pour certains, leur travail dès dimanche après-midi.

Si l'on se base sur son brouillon, l'accord qui sera signé vendredi est un « accord procédural » estime Carole Mathieu : il n'est pas une garantie qu'on limite à 2 degrés le réchauffement climatique, mais selon elle il crée les conditions, grâce au mécanisme de révision, pour que cela soit possible à l'avenir.

« Sur tous les points il y a des dissensions, mais aucun pays ne bloque seul les négociations », constate la chercheuse. « De plus, aucun des grands pays émetteurs ne voudrait porter la responsabilité d'un échec ou d'un semi-échec. »

Suivez Lucie Aubourg sur Twitter : @LucieAbrg

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