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FRANCE

Pourquoi le nom du Front National revient dans l’affaire des « Panama Papers »

Le journal Le Monde a révélé ce mardi que des proches de la présidente du Front National et de son père figurent dans deux dossiers de soupçon d’évasion fiscale auxquels les Panama Papers pourraient apporter des précisions.
Jean-Marie Le Pen en 2007 (Image via Wikimedia Commons / Kenji-Baptiste OIKAWA)

Ce mardi matin, le journal Le Monde a révélé que des proches de Marine Le Pen — la présidente du parti Front National (FN) — et de son père Jean-Marie Le Pen figuraient dans le dossier dit des « Panama Papers » — ces données confidentielles que 109 médias du monde entier révèlent au compte-gouttes depuis deux jours.

À lire : 5 questions pour comprendre le scandale des Panama Papers

Cette révélation avait fait l'objet d'une bande-annonce digne d'un nouvel épisode d'une série à succès. Ce lundi, le directeur du Monde, Jérôme Fénoglio, avait en effet indiqué qu'un « grand parti politique français » était cité dans ces montages, sans préciser lequel. Les révélations de ce mardi concernent finalement deux dossiers distincts, dans lesquels des proches du fondateur du FN et de sa fille sont soupçonnés d'avoir placé de larges sommes d'argent à l'étranger, pour des raisons que la justice cherche à connaître. Les Panama Papers pourraient d'après le Monde permettre d'en savoir plus sur ces deux dossiers.

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Fuites d'argent vers l'Asie chez un prestataire du FN

Les premiers noms cités par Le Monde sont ceux de Frédéric Chatillon et de Nicolas Crochet, respectivement homme d'affaires et expert-comptable, tous deux très proches de Marine Le Pen et travaillant en étroite collaboration avec le FN. Si l'on savait déjà que ces deux hommes sont soupçonnés par la justice d'avoir organisé une arnaque aux remboursements de campagne électorale — les faits remontent à l'année 2012 —, les informations que Le Monde a obtenues grâce à sa collaboration avec le Consortium international des journalistes d'investigation (ICIJ) en disent davantage sur la manière dont ils auraient procédé pour faire disparaître des dizaines de milliers d'euros des écrans radar du fisc français.

Le montage financier mis en lumière par l'enquête sur les « Panama Papers » concerne une somme de 316 000 euros que les deux proches de Marine Le Pen auraient transférée depuis les caisses de l'entreprise Riwal — une société de communication dirigée par Frédéric Chatillon qui a oeuvré sur les campagnes présidentielles et législatives du FN en 2012 — jusqu'à un compte domicilié à Singapour.

Afin de mener à bien leur projet, les deux hommes auraient eu recours à plusieurs intermédiaires et au moins quatre sociétés, l'une d'elle ayant été domiciliée aux îles Vierges britanniques — un autre paradis fiscal — par la compagnie Mossack Fonseca, point de départ de toute l'affaire des « Panama Papers ».

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L'année dernière, VICE a publié un long portrait de la société aujourd'hui au centre du scandale des Panama Papers, que vous pouvez lire en cliquant ici.

Cité par Le Monde, Frédéric Chatillon s'est défendu en évoquant des « perspectives de rentabilité » en Asie jugées « attrayantes » à l'époque, tout en expliquant qu'il avait agi de la sorte pour « échapper à la pression médiatique habituelle en France ». Ce transfert d'argent aurait par ailleurs servi à « aider une amie », alors dirigeante de la société vers laquelle les 316 000 euros avaient finalement été transférés, d'après un témoignage de cet homme d'affaires.

De son côté, le Front National avait pris les devants ce lundi soir en publiant une « mise en garde » dans laquelle le parti s'est défendu de toute implication du FN ou de Marine Le Pen dans ce montage financier. Le parti annonce qu'il « n'hésitera pas en conséquence à engager des poursuites judiciaires contre tous ceux qui se compromettraient dans la diffamation la plus grave ». Avant d'expliquer que « Le Front National n'est pas impliqué dans l'affaire des « Panama papers » et ne tolérera pas que des amalgames scandaleux soient faits sur son dos. »

De nouveaux éléments au sujet du « trésor » de Jean-Marie Le Pen

Les « Panama Papers » pourraient d'autre part venir étayer l'enquête pour « blanchiment d'argent et fraude fiscale » qui vise le fondateur historique du FN, Jean-Marie Le Pen, ainsi que sa femme Jeannine, depuis l'été 2015.

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L'enquête — qui suit toujours son cours — doit établir si oui ou non un ancien majordome des époux Le Pen les a aidés à faire sortir de France, puis rentrer à leur demande, d'importantes sommes d'argent citées dans ce dossier.

Mossack Fonseca apparaît selon Le Monde comme la firme ayant facilité la fuite des capitaux français vers une île des Caraïbes en 2000. La somme totale s'élèverait à 2,2 millions d'euros « en billets de banque, lingots et pièces d'or ».

Les autorités françaises ont relevé des mouvements jugés anormaux sur les comptes personnels de l'ancien majordome, Gérald Gérin, « sans rapport avec ses revenus officiels », dont un virement de 30 560 euros datant de 2010 et intitulé « Avance Mme Le Pen ».

De son côté, le majordome a expliqué au Monde que ce fonds financier était un capital « pour ses vieux jours », et que cet argent « n'a rien à voir avec Jean-Marie Le Pen ». L'ancien président du FN a répondu que « les affaires de M. Gérin ne concernent que M. Gérin ».

Dans d'autres pays, les révélations en lien avec les « Panama Papers » ont d'ores et déjà provoqué des raz-de-marée politiques, comme en Islande, où d'importantes manifestations ont été organisées ce lundi pour demander la démission du Premier ministre du pays, qui a disposé — comme d'autres hauts-dirigeants islandais — d'une compagnie offshore où sa femme et lui auraient placé près de 4 millions d'euros jusqu'en 2009.

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Image : Jean-Marie Le Pen en 2007 (Image via Wikimedia Commons / Kenji-Baptiste OIKAWA)