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Histoires de présidentielle — #3 : Quand les présidents de la République se mettent au sport

Histoires de présidentielles #3 : À la veille du début de l’Euro 2016, nous nous intéressons cette fois à l’image des présidents de la République lors de grands événements sportifs.
Le premier secrétaire du Parti Socialiste, François Hollande, court après un ballon lors d'un match de charité pour l'association France-Alzheimer au stade Charlety à Paris, le 20 mai 2008. (REUTERS/Charles Platiau)

Tout au long de cette année de campagne présidentielle en France, VICE News et l'INA se penchent sur les archives vidéos marquantes des présidents et candidats de la Cinquième République. Ça s'appelle « Histoires de présidentielles » et vous pouvez retrouver tous nos articles en cliquant sur cette page.

À la veille du début de l'Euro 2016, nous nous intéressons cette fois à l'image des présidents de la République lors de grands événements sportifs. Tour de France, Coupe du monde de football, ces rassemblements populaires jouent un rôle important dans la stratégie de communication du chef de l'État. Explications avec Philippe J. Maarek, professeur en sciences de l'information et de la communication et directeur du Centre d'Etudes Comparées en Communication Politique et Publique (CECCOPOP). Auteur du livre Communication et marketing de l'homme politique, aux éditions LixisNexis, il revient sur quelques archives marquantes de la cinquième république.

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1960 : Le général De Gaulle — Quand le Tour de France s'arrête pour le président

L'image semble impensable aujourd'hui. Le 16 juillet 1960, lors de la 20e étape reliant Besançon à Troyes, le Tour de France passe par le village de Colombey-les-deux-Églises, fief du général de Gaulle. Le président et sa femme se joignent aux spectateurs. Averti, Jacques Goddet, le directeur de la course, fait alors arrêter le peloton pour saluer le premier président de la Ve République. Celui-ci échange quelques poignées de mains avec les coureurs, dont l'italien Gastone Nencini qui remporte le Tour cette année-là.

On peut assister à ce moment historique dans une émission de 1960 (à 2 minutes 30) :

Philippe J. Maarek : « On est dans un dispositif classique. Il y a toujours eu une grande distance entre les dirigeants et ceux qui les ont élus. Pour la réduire, les hommes politiques s'associent à des événements qui ne sont pas politiques, le plus souvent culturels ou sportifs. Même le général de Gaulle, qu'on a du mal à imaginer sur un vélo, va à la rencontre du Tour de France à un moment donné. Cela sert à recréer un lien avec les couches populaires. Ici, on voit la distance avec le Chef de l'Etat, qu'incarnait à merveille le général de Gaulle - l'homme de l'appel du 18 juin, le sauveur de la France. Il y avait un respect pour l'homme politique qui n'existe plus aujourd'hui. »

1989 : François Mitterrand — Une bise pour Jean-Pierre Papin

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« J'avais parié avec des amis que si on gagnait, je ferais une bise sur le front de François Mitterrand », raconte Jean-Pierre Papin dans La Provence. « Arrivé devant lui, il dégageait une telle aura, possédait une telle prestance, que je me suis dégonflé. » Le capitaine de l'Olympique de Marseille demande finalement au président de lui faire la bise, ce qu'il accepte. Ce soir du 12 juin 1989, les joueurs marseillais ont gagné la Coupe de France contre Monaco. Auteur de trois buts pendant le match, Jean-Pierre Papin offre un doublé à son équipe qui a déjà remporté le Championnat de France cette année-là.

Philippe J. Maarek : « Ici, la mise en scène vient surtout de Jean-Pierre Papin, qui a dû contacter l'Élysée auparavant pour demander l'autorisation de faire la bise au président. L'homme politique, qu'on voyait avec moins de familiarité qu'aujourd'hui, s'est laissé prendre au jeu. À l'initiative de son principal conseiller en communication, Jacques Pilhan, François Mitterrand alternait les longues périodes de silence et des apparitions médiatiques fortes, où il apparaissait plus proche du peuple. C'est un jeu. Ça me rappelle une émission qu'il a faite avec Yves Mourousi [en 1985] et qui s'appelait « Ça nous intéresse monsieur le président ». Il essayait de montrer qu'il suivait ce qu'il se passait dans la jeunesse en expliquant connaître des expressions comme « c'est chébran » ou « c'est câblé ». »

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1998 : Jacques Chirac — Une garden-party de champions

Le 14 juillet 1998, Jacques Chirac reçoit des milliers de personnes pour la traditionnelle réception dans les jardins de l'Élysée, dont 4 000 jeunes. Tous sont venus voir les héros du jour : les joueurs de l'équipe de France de Football, sacrée championne du monde deux jours plus tôt. Le président s'affiche au milieu des sportifs, chantant et tapant des mains. En pleine cohabitation avec la gauche, après une dissolution ratée de l'Assemblée nationale au printemps 1997, Jacques Chirac profite d'un regain de popularité dans ce contexte d'euphorie nationale.

Philippe J. Maarek : « Cette période après la victoire de 1998 a été un moment d'union nationale complètement inédit, durant lequel on a inventé cette France « black, blanc, beur », qui est parfois contestée aujourd'hui. L'idée de Chirac ici est de mêler une tradition à une autre. La tradition de la garden-party du 14 juillet à une équipe qui a porté haut les couleurs de la France et qui a représenté cette image particulière. Avec ce genre d'événement, les Français s'identifient à la victoire et partagent le bonheur des sportifs gagnants. Ils ont l'impression de s'en porter mieux. Quiconque dirige en bénéficie alors forcément. Surtout s'il a l'intelligence de bien s'associer à l'événement, comme Jacques Chirac l'a fait. »

2007 : Nicolas Sarkozy — Le président s'invite dans le peloton du Tour de France

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Tout au long de son mandat, Nicolas Sarkozy a affiché l'image d'un président sportif. Le 17 juillet 2007, deux mois après son élection, il rejoint le peloton du Tour de France, installé dans la voiture du directeur de la course. Ce passionné de cyclisme, comme il le rappelle dans le reportage, effectue une partie de la 9e étape, entre Val d'Isère et Briançon. À l'exception de Georges Pompidou, tous les présidents de la Ve République se sont rendus sur le Tour de France. Nicolas Sarkozy reviendra deux fois, en 2009 et en 2010.

Philippe J. Maarek : « À ce moment-là, Nicolas Sarkozy est encore très populaire. Il se rend sur le Tour pour maintenir sa popularité. En outre, tout le monde sait qu'il aime le vélo. Il s'est fait filmer pendant sa campagne en train d'en faire. Il a mené un travail de communication sur son corps. Son slogan à l'époque, c'est « travailler plus pour gagner plus ». Il veut montrer qu'en faisant du sport, on travaille mais qu'on peut aussi gagner. C'est une des rares fois où il y a une véracité dans l'exposition aux médias de l'homme politique. Il dispose d'une crédibilité supplémentaire parce qu'on sait qu'il pratique ce sport. C'est d'ailleurs paradoxal que Nicolas Sarkozy, qui avait autant de proximité avec le "Français moyen" - il n'a pas fait l'ENA, il pratique un sport très pratiqué dans les couches populaires - soit devenu malgré tout si impopulaire. »

En bonus : Pas encore présidents, Valéry Giscard d'Estaing et François Hollande sont déjà footballeurs

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En 1973, Valéry Giscard d'Estaing, alors ministre des Finances, participe à un match opposant les élus municipaux de la ville de Chamalières, dont il est maire, aux commerçants. On le retrouve dans un reportage du journal télévisé de 13h, en chaussettes rayées sur le terrain, puis torse nu dans les vestiaires :

En mai 2008, François Hollande dispute un match en faveur de l'association « France Alzheimer ». Sur le terrain, des hommes politiques et des célébrités. Le style du premier secrétaire du Parti Socialiste, tout en « petites foulées », est commenté avec humour par le journaliste Christophe Duchiron :


Retrouvez tous les épisodes d'« Histoires de présidentielles » en cliquant sur cette page.


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Photo : Le premier secrétaire du Parti Socialiste, François Hollande, court après un ballon lors d'un match de charité pour l'association France-Alzheimer au stade Charlety à Paris, le 20 mai 2008. (REUTERS/Charles Platiau)