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Crime

« Ce cauchemar restera à jamais avec eux » :  La retraite de Debaltseve

Le retrait ukrainien mercredi dernier de cette zone stratégique a remis en cause la viabilité d’un cessez-le-feu toujours incertain après un week-end marqué par le passage de la ville sous contrôle pro-russe.
Photo par Vadim Ghirda/AP

Le retrait ukrainien mercredi dernier de cette zone stratégique, et la poursuite des affrontements dans les zones alentour, ont remis en cause la viabilité d'un cessez-le-feu toujours incertain après un week-end marqué par le passage de la ville sous contrôle pro-russe.

Le président ukrainien Petro Porochenko a essayé de présenter la retraite de ses soldats de Debaltseve le mercredi 18 sous un jour favorable, en disant qu'elle avait été « ordonnée », « planifiée », et n'a fait état que de six blessés. Mais sur le terrain, c'est un tout autre son de cloche.

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À Artemivsk, la ville la plus proche de Debaltseve alors encore tenue par le gouvernement, les soldats parlaient mercredi dernier de chaos, de confusion et de panique alors que leur convoi essayait de s'enfuir à travers les champs sous les tirs de mitrailleuses et les bombardements. Des milliers de combattants ont quitté le champ de bataille dans des véhicules militaires, des voitures, des bus d'école, et même à pied. D'après certains soldats, des centaines d'entre eux ont été tués et les blessés graves ont été tout simplement abandonnés, parce qu'il n'y avait pas moyen de les ramener en zone sécurisée.

Andriy, un médecin du service de traumatologie de l'hôpital de la ville a dit à VICE News qu'ils traitaient des vingtaines de blessés. « Les blessures de ces soldats guériront, mais le cauchemar de Debaltseve restera à jamais avec eux, » a-t-il dit. « On ne reçoit aucun soutien de l'État. L'hôpital est entièrement dépendant des ressources apportées par des volontaires, c'est comme ça depuis des semaines. C'est l'accueil réservé par notre gouvernement aux hommes qui défendent notre terre. »

Lors de la conférence de presse qui s'est tenue à Kiev jeudi, le porte-parole de l'armée ukrainienne Andriy Lysenko a déclaré que Debaltseve, où les forces séparatistes ont hissé le drapeau de Novorossia (La Nouvelle-Russie), « ressemblait à la surface de la lune. » Il a aussi affirmé que les séparatistes avaient tiré l'équivalent de « 584 kilos de mort et de métal » sur chacun des soldats basés dans cette poche stratégiquement importante. « On ne peut plus dire que [Debaltseve] est encore une ville. C'est un territoire détruit, » a ajouté Lysenko.

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La perte de ce carrefour de transports est un coup sévère porté aux autorités de Kiev qui ont été critiquées pour leur mauvaise gestion de ce qu'ils ont appelé une « opération anti-terreur » dans l'est du pays, après que les militaires ukrainiens ont essuyé deux défaites cuisantes à Ilovaisk et à l'aéroport de Donetsk. Semyon Semenchenko, député ukrainien et chef de bataillon, qui a combattu à Ilovaisk a fait une critique acerbe de l'opération de Debaltseve. « On avait suffisamment de forces et de moyens. Le problème, c'est le commandement et la coordination, » a-t-il écrit sur sa page Facebook. « Ils sont très mauvais. »

Jeudi matin, un entretien téléphonique entre les dirigeants français, allemand, ukrainien et russe s'est terminé par une promesse que l'accord de paix signé à Minsk serait mis en place de façon « stricte et entière. » La nuit d'avant, Porochenko a reçu l'approbation du conseil national de sécurité et de défense ukrainien pour qu'il en appelle à des casques bleus pour qu'ils viennent surveiller la ligne de front.

Cette décision n'a pas encore été approuvée par le Parlement mais Porochenko a déclaré après la réunion que « la meilleure solution serait une mission de police de l'Union Européenne ». Sur son site Internet, Porochenko a également exhorté la chancelière Angela Merkel et le président François Hollande à « ne pas faire semblant que ce qu'il s'est passé à Debaltseve était conforme aux accords de Minsk. »

Jeudi, les responsables militaires ukrainiens à Kiev faisaient état d'autres attaques sur des positions du gouvernement à différents endroits, Pesky, Avdiivka, et Shyrokyne. Shyrokyne est à une vingtaine de kilomètres seulement de Mariupol une ville portuaire d'un demi-million d'habitants stratégiquement importante, et dont beaucoup craignent qu'elle soit la prochaine cible des séparatistes. Lysenko a dit que les soldats ukrainiens stationnés à Shyrokyne avaient été attaqués « par la terre et par la mer », avec des « obus et des armes automatiques ».

Suivez Harriet Salem sur Twitter: @HarrietSalem