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Russie vs USA : le retour de la course aux sous-marins

Avec l'arrivée de deux petits nouveaux, les profondeurs des océans post-guerre froide ressemblent beaucoup à celles de la guerre froide.
Photo via Sevmash

Le K-560 Severodvinsk est le premier sous-marin nucléaire d'attaque russe, de type vraiment nouveau, à être mis en service depuis la fin de la guerre froide, et il attire l'attention des décideurs de la marine américaine.

Cette dernière occupe une position dominante en termes de puissance globale, mais cela ne veut pas dire qu'elle domine tous les domaines de la guerre navale. Et la force sous-marine russe est - ou du moins, était durant la guerre froide - une sérieuse rivale de la marine américaine.

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Les sous-marins utilisés aujourd'hui sont classés selon quatre types. Les sous-marins nucléaires lanceurs d'engins (SNLE) sont dotés de missiles nucléaires et forment l'essentiel de la force nucléaire américaine et russe. Il y a les sous-marins nucléaires lanceurs de missiles de croisière (SSGN), qui possèdent une grosse quantité de missiles de croisière visant à frapper navires et cibles conventionnelles, et qui peuvent accueillir des têtes nucléaires. Il y a aussi les sous-marins diesels d'attaque (SSK), prévus pour combattre d'autres sous-marins et navires. Ces sous-marins peuvent être plus silencieux et furtifs que leurs cousins nucléaires, mais ils sont plus petits, plus lents, et ne s'éloignent généralement pas des rivages. Les États-Unis n'utilisent plus de sous-marins diesels pour leurs opérations, mais la Russie, la Chine, le Japon et plusieurs pays européens en produisent des modèles très perfectionnés.

La Suède traque un sous-marin inconnu. À lire ici

Et enfin, il y a les sous-marins nucléaires d'attaque (SSN). La mission offensive de ces sous-marins est, comme pour leurs comparses diesels, de localiser, traquer, et éliminer des cibles. Cependant, à la différence des sous-marins d'attaque diesels, les sous-marins nucléaires d'attaque s'aventurent loin et profond dans les océans pour traquer leurs proies.

Comme les sous-marins passent leur temps, même en période de paix, à chasser et à se cacher des sous-marins ennemis - exactement comme ils le feraient en temps de guerre - l'état de guerre et l'état de paix sont, pour un sous-marin, moins différents de ce que l'on pourrait penser. L'entraînement et l'expérimentation sont constants pour ces bâtiments, ce qui montre que les deux pays mènent des opérations militaires sous-marines avec un niveau d'expérience équivalent. C'est une course à l'armement pure et dure. Chacun des deux camps s'efforce continuellement de surpasser l'autre en stratégie, manoeuvre ou matériel.

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Historiquement, les Soviétiques étaient assez nuls pour fabriquer des sous-marins silencieux, ce qui les a plutôt fait opter pour la performance. Leurs sous-marins étaient plus rapides, pouvaient plonger plus profond, et écumer les océans. L'espion de la guerre froide John Walker (qui est mort en prison le 28 août) a vendu, façon Edward Snowden, quantité de renseignements top secret sur les sous-marins américains à l'Union soviétique pour l'aider à améliorer sa tactique et ses équipements. Cela, combiné à la vente par le Japon d'outils de production sophistiqués aux Soviétiques fait que leurs sous-marins se sont rapidement améliorés. À la fin des années 1980, l'Akula II, sous-marin nucléaire soviétique le plus avancé, était tout aussi silencieux que le sous-marin nucléaire américain le plus récent, de classe Los Angeles améliorée. L'URSS avait toujours des sonars pourris, mais l'époque de la suprématie américaine en matière de furtivité était terminée.

Les États-Unis se sont alors préparés à reprendre l'avantage avec une nouvelle classe, Seawolf, dont les appareils étaient censés être plus grands, silencieux, rapides et dangereux que n'importe quel autre sous-marin déjà à l'eau. Divers rapports affirmaient que le Seawolf était dix fois plus rapide que le Los Angeles, et qu'un Seawolf évoluant à 25 noeuds était plus silencieux qu'un Los Angeles à quai. Il avait été conçu pour rétablir de manière décisive la supériorité militaire navale américaine - jusqu'à ce que son prix monstrueux ne se fasse torpiller par la « Peace Dividend » [ndlr : ligne politique partagée par Bush sénior et Margaret Thatcher, soutenant une réduction des dépenses militaires] des années 1990. Seuls trois sous-marins de classe Seawolf furent construits.

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Dans le même temps, la Russie tentait de faire mieux que l'Akula II et d'égaler ou de surpasser le nouvel effort américain; la construction du premier sous-marin de classe Yasen débuta en 1993. Alors que la production du Seawolf avait souffert de son coût énorme ce qui conduit à son arrêt, le Yasen a souffert d'un problème similaire : l'effondrement de l'économie russe.

Aujourd'hui, plus de vingt ans après le lancement de sa construction, le sous-marin d'attaque Yasen K-560 Severodvinsk a été mis à l'eau, a réussi ses essais, et sa prochaine mise en service a été confirmée. Voyez-ça comme la reprise officielle de la course à l'armement États-Unis-Russie.

Vladimir Poutine s'est lancé dans un ambitieux projet de reconstruction de la marine russe, pour la rendre aussi puissante et influente qu'au temps de l'Armée rouge. Le réarmement des sous-marins russes - la clé de la reconstruction militaire globale - est centré autour de quatre programmes : le Yasen, le Lada, le Borei, et le Bulava.

De nouveaux sous-marins d'attaque de classe Yasen entreront en service, à raison d'un par an à partir de 2016. Les appareils de classe Lada sont les derniers nés russes des sous-marins d'attaque diesels. Les Borei sont les nouveaux sous-marins lanceurs de missiles balistiques, ils doivent redynamiser la dissuasion nucléaire sous-marine. Le Bulava est le tout dernier modèle de missile dont les Borei seront équipés. Avec des têtes nucléaires manoeuvrables multiples, il a été pensé pour mettre en déroute n'importe quel missile défensif de contre-mesure.

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Alors que le lancement du Severodvinsk est révélateur de la renaissance de l'armé russe, le lancement américain cette semaine du dernier sous-marin USS North Dakota, de classe Virginia, est lui révélateur de l'opiniâtreté des Américains après l'échec du Seawolf.

Pensé pour être une alternative moins encombrante et moins chère que le Seawolf, le Virginia est apparemment tout aussi silencieux, mais fait des concessions en termes de performances par rapport à son coûteux prédécesseur. Et les analystes occidentaux se demandent à quel point les ingénieurs de la marine russes ont été capables de perfectionner et d'ajouter de nouvelles technologies au Severodvinsk pendant les deux décennies qu'a duré sa construction. Le résultat ? Difficile de savoir si le Severodvinsk et le North Dakota seront à la hauteur l'un de l'autre.

La guerre froide s'est achevée sur une égalité presque parfaite en termes de furtivité. La question est maintenant de savoir si la capacité des Russes à insérer de nouvelles technologies dans l'appareil durant sa construction a été à la hauteur des choix de fabrication américains faits dans un monde post-guerre froide, qui commence pourtant à beaucoup ressembler à un monde en pleine guerre froide. Du moins sous l'eau.

Suivez Ryan Faith sur Twitter : @Operation_Ryan

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