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Crime

Souvenirs d'enfance et accord de paix : le leader des FARC a donné une interview rare

Le leader des FARC assure que le groupe rebelle est totalement engagé dans le processus de paix et s'imagine retourner dans sa ville natale 40 ans après l'avoir quitté pour s'engager dans les FARC.
Screenshot via YouTube

Le leader des Forces armées révolutionnaires colombiennes (FARC) a répété son engagement dans le processus de paix engagé en Colombie, lors d'une rare interview télévisée diffusée ce mardi soir. Il a certifié que tous les combattants du groupe rebelle étaient déterminés à parvenir à la paix. Le chef des FARC a aussi songé à la possibilité de visiter la tombe de ses parents une fois la guerre finie.

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« Je peux vous assurer qu'aucun membre des FARC, que ce soit un combattant ou un commandant, n'a exprimé de désaccord sur le processus de paix, » a déclaré Rodrigo Londono, lors de l'interview diffusée par la chaine vénézuélienne TeleSur. Un accord de paix mettrait fin à l'un des plus vieux conflits du monde. FARC et gouvernement colombien s'affrontent depuis plus de 50 ans.

À lire : Les FARC et le gouvernement colombien annoncent la paix pour dans 6 mois

Cette interview est intervenue une semaine après l'apparition surprise de Londono à La Havane. Dans la capitale cubaine, le président colombien, Juan Manuel Santos, et le chef de FARC se sont serrés la main pour sceller un accord historique sur la juridiction exceptionnelle d'après-guerre — une étape indispensable pour parvenir à un accord de paix définitif, qui pourrait être signé dans les 6 prochains mois.

Il a été prévu à La Havane que les belligérants — des deux camps — qui acceptent d'être reconnus coupables de violation des droits de l'homme et de crimes de guerre seront emprisonnés entre 5 et 8 ans dans des prisons dites « ordinaires ». Ceux qui n'accepteraient pas de reconnaître leur culpabilité pourraient encourir jusqu'à 20 ans d'emprisonnement.

Mieux connu sous le surnom de « Timochenko, » le leader de la plus longue insurrection d'Amérique Latine apparaissait peu devant les caméras. Il se contentait de vidéos tournées dans des camps rebelles perdus au milieu de la jungle, habillé en tenue militaire.

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Pour l'interview de ce mardi, Timochenko a mis de côté son image belliqueuse, arborant une guayabera (une chemise populaire en Amérique Latine, composée de quatre poches devant) et un grand sourire. Il a répondu aux questions assis sur un canapé de cuir marron pour le début de l'interview, puis à une petite table de jardin pour la suite.

La guerre civile colombienne a fait plus de 220 000 victimes et a contraint des millions de personnes à quitter leurs maisons. Toutes les parties prenantes du conflit — notamment les groupes militaires et paramilitaires — sont accusées de violences contre la population civile.

L'accord juridique signé à La Havane s'inscrit à la suite d'autres signatures d'accords sur la participation à la vie politique, les droits des terres et les cultures illicites. L'accord cubain est particulièrement important, puisqu'il ouvre la possibilité que les combattants soient jugés devant des tribunaux spéciaux — ce que les FARC avaient toujours refusé.

Si Timochenko était plutôt détendu au cours de l'interview, il s'est raidi quand le journaliste lui a demandé s'il devait s'excuser pour les crimes commis par ses hommes. « Si vous demandez le pardon, c'est que vous regrettez quelque chose, » a répondu Timochenko. « Je ne regrette rien. »

Le leader des FARC a ensuite sorti un petit fascicule, dans lequel est expliqué, selon lui, le système juridique interne aux FARC. Il a expliqué que les FARC avaient déjà mis en place des tribunaux spéciaux pour juger leurs hommes accusés de viol ou de meurtre.

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Il a cependant reconnu que des « erreurs » ont été commises dans « la dynamique de la guerre, » tout en insistant sur le fait que les FARC accepteraient « leurs responsabilités dans le conflit. »

Au cours de l'interview, Timochenko n'a cessé de mettre en avant la volonté de FARC à parvenir à un accord de paix. Il a aussi semblé mettre en question la sincérité du président colombien quant au projet d'aboutir à un accord dans les 6 mois.

« S'il y avait la volonté politique, on pourrait le signer plus tôt, » a expliqué Timochenko, « mais en même temps, 6 mois pourraient ne pas suffire. »

Timochenko s'est aussi imaginé ce que la paix pourrait signifier pour lui, d'un point de vue personnel.

Il s'est remémoré devant la caméra ses souvenirs d'enfant, notamment quand il a appris à lire à l'âge de 5 ans pour se plonger dans les textes de Marx que son père communiste possédait. Le père de Timochenko était un paysan qui avait appris à lire seul. Mais le premier livre que le leader des FARC a lu en entier, c'est la Bible que lui avait achetée sa croyante de mère.

« J'aimerais marcher dans les rues de la ville où j'ai grandi et aller visiter les tombes de mes parents et de mon frère qui a été assassiné, » a confié Timochenko, à propos de la petite ville championne de la production de café qu'il avait dû quitter il y a 40 ans pour rejoindre les FARC, alors qu'il était encore adolescent. « Cela serait l'un de mes premiers désirs. »

Suivez Jo Tuckman sur Twitter : @jotuckman