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Tout ce qu'il faut savoir sur le programme de Benoît Hamon

Retour sur les principales propositions du candidat, ainsi que son équipe, son parti, sa marotte et sa pire idée de communication.
REUTERS/Regis Duvignau

Benoît Hamon, âgé de 49 ans, est le candidat du Parti Socialiste, classé à gauche. Il a été plébiscité par les électeurs de sa mouvance, à l'issue d'une primaire houleuse au sein de laquelle peu le voyaient s'imposer. Au second tour, l'outsider a finalement effacé Manuel Valls, Premier ministre sortant.

Hamon a fait à peu près toute sa carrière au Parti socialiste. Originaire de Bretagne, il a commencé par diriger le Mouvement des Jeunes Socialistes (1993-1995), puis a rejoint la branche progressiste Nouvelle Gauche (avec Vincent Peillon et Arnaud Montebourg), qui voulait renouveler le PS. Entre temps, il a siégé au parlement européen pendant cinq ans. Il a ensuite accédé à deux ministères, l'Économie sociale et solidaire et l'Éducation, sur deux courtes périodes. Il quittera le deuxième en 2014, en désaccord avec la politique libérale et social-démocrate de François Hollande et Manuel Valls.

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Comme Jean-Luc Mélenchon, l'autre candidat majeur à gauche dans cette campagne, il entend s'inspirer de la dynamique du socialiste américain Bernie Sanders, candidat à la présidentielle américaine en 2016. Une alliance entre Mélenchon et Hamon avait été un temps pressentie. Malgré l'ultime main tendue par Hamon en mars, les différences idéologiques sur certaines questions (L'Europe, le revenu universel) auront eu raison de leur embryon d'union. Les deux candidats feront donc bande à part.

TOP 5 DES PROPOSITIONS

  • Revenu universel. Depuis sa révision, il n'est plus vraiment universel. Réservé aux actifs qui touchent moins de 2 200 euros net, ce revenu de 600 euros par mois sera étendu à chaque Français de plus de 18 ans, toute sa vie. Critiqué car supposé impossible à financer, ou favorisant l'oisiveté, Hamon a répondu en mettant à disposition un outil de calcul personnalisé pour chacun.

  • Légalisation du cannabis. Pour lutter contre les trafics, ses conséquences et la nocivité de la drogue, Hamon souhaite – comme Mélenchon et Poutou – faire encadrer la vente du cannabis.

  • 49-3 citoyen. On connaissait l'article 49-3 de la Constitution, utilisé plusieurs fois par Manuel Valls pour se passer du vote du Parlement lors de l'examen de la loi Travail. Ce 49-3 inversé permettra à 1 pour cent du corps électoral de proposer une loi au Parlement, ou de soumettre une loi à un référendum.

  • Création d'un « statut de l'actif ». L'idée est de protéger les travailleurs de l' « ubérisation », en leur permettant d'accéder à un socle de protection sociale (code du travail, sécurité sociale) adapté.

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  • Reconnaissance de l'État palestinien. Pour « favoriser la coexistence de deux États vivant en paix et en sécurité ». Hamon avait déjà été à l'initiative d'une loi en ce sens en 2014, adoptée par l'Assemblée nationale et le Sénat.

SA MAROTTE

Le burn-out. Depuis des années, Hamon lutte pour que ce syndrome d'épuisement puisse être reconnu comme maladie professionnelle. Il a déjà déposé plusieurs amendements pour permettre la reconnaissance des maladies psychiques et du burn-out en 2016, au grand dam des patrons (qui jugent la proposition coûteuse) et des médecins (qui y voient une maladie difficile à soigner, car les causes leur échappent).

SON PROGRAMME

Société

Dans le programme de Benoît Hamon, plusieurs réformes visent à impliquer davantage le peuple dans les décisions politiques. Au 49-3 citoyen, s'ajoutent la mise en place de la VIème République, la reconnaissance du vote blanc et du droit de vote aux étrangers pour les élections locales.

Hamon inscrit son projet dans une gauche « progressiste ». Parmi les évolutions sociales majeures proposées par le candidat socialiste, le droit à mourir dans la dignité, la création d'un corps de contrôle anti-discriminations, l'ouverture de la PMA aux femmes. Plus original (et unique dans cette campagne) : la possibilité pour les personnes trans de changer la mention de leur sexe à l'état civil.

Comme Jean-Luc Mélenchon, il place l'écologie au centre de son programme. Un de ses marottes favorites ? L'interdiction des perturbateurs endocriniens. En chiffres, son programme écolo c'est : 50 pour cent d'énergies renouvelables, la sortie du nucléaire d'ici 25 ans et celle du diesel en 2025.

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Économie

Comme Arnaud Montebourg, Hamon défend le « made in France ». Il ne signera ni CETA, ni TAFTA. Et remplacera la loi Travail par une autre loi, plus à l'écoute des partenaires sociaux, et qui encouragera la poursuite de la réduction collective du temps de travail.

Hamon est également l'un des rares candidats à évoquer la future robotisation des emplois. Son idée ? Taxer les robots. Et « créer autant d'emplois nouveaux que ceux qui disparaîtront ». Par ailleurs, il augmentera le SMIC. Sans préciser de combien. Le minimum vieillesse sera réhaussé de 10 pour cent, et 150 000 logements sociaux seront construits par an.

International

Si le programme de Benoît Hamon partage de nombreux points communs avec celui de Jean-Luc Mélenchon, l'Europe reste un sujet qui fâche. Quand Mélenchon envisage d'en sortir à moins de renégocier la plupart des traités, Hamon souhaite seulement signer un traité de la démocratisation de la gouvernance de la zone euro, et revoir la directive des travailleurs détachés.

Hamon souhaite augmenter le budget de la défense jusqu'à 2 pour cent du PIB. Dans son programme, il aborde le domaine militaire à travers le prisme social, en proposant l'amélioration de la reconversion et de la couverture sociale des militaires, et une aide sociale des veufs et veuves des soldats. Enfin, Hamon réserverait un « visa humanitaire » aux réfugiés.

Éducation

Elle commencerait dès trois ans. Les classes de CP/CE1/CE2 seraient limitées à 25 élèves, et 20 dans les écoles les plus en difficulté (ZEP, territoires ruraux et outre-mer). Voire encore moins, en fonction du nombre d'élèves en situation de handicap dans la classe. Le handicap, thème majeur du programme du candidat socialiste, qui propose notamment des mesures de simplification de la vie des salariés handicapés dans l'entreprise, et une revalorisation de l'allocation adulte handicapé de 10 pour cent.

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Les enseignants sont choyés par Hamon, qui entend en recruter 40 000 en cinq ans, et revaloriser leurs salaires. Le candidat souhaite investir un milliard d'euros dans l'enseignement supérieur et la recherche. Et créera 60 000 logements pour les jeunes et les étudiants. À l'image d'autres candidats, il réintroduit le service civique, au lycée et à l'université.

Sécurité

Hamon fait le constat d'une détérioration de la relation entre la police et les citoyens. Pour y remédier, il souhaite rétablir la police de proximité. Tout comme Mélenchon et Macron. Mais il y ajoute une prime en zone de sécurité prioritaire et le récépissé de contrôle d'identité pour lutter contre le contrôle au faciès.

Accusé de ne pas assez aborder la problématique terroriste dans son discours, Hamon revient en long et en large sur ce thème dans son programme. Le candidat souhaite déployer un arsenal de moyens humains et financiers : création de 9 000 postes de policiers et de gendarmes, interdiction du territoire des suspects candidats au djihad, création d'un délit d'entreprise terroriste individuelle, ou encore fermeture des lieux de culte au sein desquels sont tenus des propos constituant une provocation à la haine ou à la violence.

SON PARTI

Le Parti socialiste est sûrement le parti le plus déchiré de cette présidentielle, résultat d'une primaire clivante, au sortir de cinq ans de quinquennat agités. Sous le mandat de François Hollande, une partie du parti socialiste s'est désolidarisée progressivement de son action, la jugeant trop libérale et pas assez « à gauche » selon eux. Ce sont les « frondeurs », auxquels appartenait Benoît Hamon ces trois dernières années. Lors de la primaire de gauche, deux lignes idéologiques s'affrontaient clairement : celle de Benoît Hamon, progressiste social classé à gauche du parti, et Manuel Valls, social-libéral classé à droite. Résultat : Hamon sort grand vainqueur, et Valls annonce son vote pour Emmanuel Macron, en désaccord quasi total avec la politique du candidat PS. À l'image de Valls, les éléphants du PS désertent le parti, siphonnés par En Marche!. Pour Benoît Hamon, la priorité n'est donc pas forcément de « faire battre le coeur de la France », comme l'indique son slogan, mais surtout de faire battre celui du Parti socialiste, qui menace de s'effondrer.

SON ÉQUIPE

Julia Cagé et son compagnon à la ville Thomas Piketty (auteur du best-seller Le Capital au XXIème siècle) sont les économistes qui chiffrent le programme de Benoît Hamon. Ce sont eux qui sont à l'origine du revirement sur le revenu universel, réévalué de façon plus crédible. Un autre « couple » sort du lot dans l'équipe de Benoît Hamon : Elisa Lewis et Romain Slitine, co-auteurs de Coup d'Etat citoyen, plaidant pour la démocratie participative et les innovations démocratiques inspirées des Indignés espagnols. Plus connus, les politiques Anne Hidalgo, Aurélie Filippetti, Axelle Lemaire et Mathias Fekl figurent parmi les soutiens de Benoît Hamon. Ces spécialistes seront assistés d'un « conseil citoyen », composé de quarante personnes tirées au sort. Elles « se réuniront à plusieurs reprises […] pour à la fois évaluer et juger les propositions et proposer des projets », a précisé le candidat.

SA PIRE IDÉE DE COM'

Le 29 mars, le vent de la campagne a quelque peu tourné. Après un débat réussi, Mélenchon a gagné des points. Il fait un bond fulgurant dans les sondages, tandis qu'Hamon sent que la dynamique n'est plus forcément de son côté. Après avoir tenté à maintes reprises de négocier une alliance avec Mélenchon, le socialiste lui lance un ultime appel public à le rejoindre. Sans succès. Mélenchon déclinera la proposition dans un meeting au Havre le jour même. Depuis, Hamon a plongé dans les intentions de vote.


Suivez Bartolomé Simon sur Twitter : @iLometto