Trump fait pencher la Cour suprême du côté des conservateurs

Le président américain Donald Trump a annoncé ce mardi qu'il nommait le juge Neil Gorsuch à la Cour suprême des États-Unis.

Âgé de 49 ans, Gorsuch est actuellement juge à la Cour d'appel des États-Unis pour le dixième circuit. Il admire celui qu'il remplace : Antonin Scalia, membre de la Cour suprême jusqu'à son décès en février 2016.

Il manquait un membre à la Cour depuis le décès de Scalia l'année dernière. Le président Obama avait alors nommé le juge Merrick Garland, mais la majorité républicaine au Sénat avait refusé de confirmer sa nomination. Les républicains avançaient qu'il revenait au successeur d'Obama à la Maison blanche de choisir celui qui remplirait le siège vacant.

Gorsuch s'est tenu debout aux côtés de Donald Trump tout au long de l'annonce de celui-ci, qui a récité l'impressionnant CV du juge : université de Columbia, Harvard, Oxford et d'autres occupations prestigieuses. « Je n'ai jamais vu des expériences académiques aussi bonnes », a dit Trump.

Après l'introduction du président, Gorsuch a pris la parole et a promis d'être un membre qui se contentera d'interpréter la loi, au lieu de légiférer sur son siège. « Un juge qui aime chaque décision rendue par la cour est probablement un mauvais juge », a-t-il dit dans une critique à peine voilée de ses collègues plus progressistes. Il a qualifié la Constitution américaine de la meilleure « charte des libertés que le monde ait connu. »

Il s'est également adressé directement à la veuve et fils de Scalia, assis au premier rang. Il a qualifié l'ancien membre de la Cour de « lion de la loi », en rajoutant « il me manque ». Lors d'un discours prononcé le printemps dernier, Gorsuch disait avoir pleuré lorsqu'il a appris la mort soudaine de Scalia en février dernier.

Les milieux conservateurs ont largement salué le message prononcé par Trump et le choix de Gorsuch. Pour la National Rifle Association (NRA), cette nomination est « remarquable » ; la Federalist Society a qualifié Gorsuch d'« exceptionnel » et Ramesh Ponnuru, du magazine très conservateurNational Review, l'a qualifié de « juge minutieux et attentionné dont la jurisprudence est pleinement dans le coeur du conservatisme juridique. »

Le leader de la majorité sénatoriale Mitch McConnell avait bataillé dur pour empêcher Obama de remplacer Scalia. Car la nomination d'un juge progressiste aurait changé la balance idéologique de la Cour vers la gauche. Obama avait nommé Garland, considéré par tous les bords comme un centriste et même loué par les républicains par le passé, mais McConnell et ses collègues au Sénat ont bloqué cette décision jusqu'à l'élection présidentielle.

Pour le moment et avant la confirmation de Gorsuch, la Cour suprême compte quatre membres conservateurs et quatre membres progressistes. Si la nomination de Trump est confirmée par le Sénat, le nouveau membre va rétablir la majorité conservatrice de cette juridiction, qui s'occupe d'affaires délicates comme l'avortement, le droit de vote et l'immigration. Il va probablement rester y pendant un bon moment, également, car il s'agit d'un poste à vie et Gorsuch est le plus jeune juge nommé depuis 25 ans.

Gorsuch avait loué l'approche originale de Scalia, qui favorisait une interprétation à la lettre de la Constitution et de la loi. La décision la plus connue de Gorsuch concerne les magasins d'ameublement Hobby Lobby. Ceux-ci avaient refusé de fournir des méthodes de contraception aux employés soumis à l'Affordable Care Act (surnommé Obamacare), cela à cause de croyances religieuses. Comme le reste de la majorité, Gorsuch a voté en faveur de Hobby Lobby et donc en faveur d'une « clause de conscience ». Puis, la Cour suprême est allé dans le même sens : des entreprises peuvent refuser de fournir des méthodes contraceptives au nom de leurs croyances religieuses.

Le choix de Gorsuch a été salué par quelques démocrates, surtout ceux qui le connaissent personnellement. « Le juge Gorsuch est l'un des juges les plus attentionnés et brillants à avoir servi notre nation au cours de ce siècle. », a dit dans un communiqué Neal Katyal, ancien solliciteur général d'Obama. « Pour commencer, et ceux qui ont travaillé avec lui peuvent en attester, Gorsuch est une personne magnifiquement décente et humaine. »

Mais la confirmation de Gorsuch n'est pas encore assurée. Certes, dans le passé, le Sénat soutenait largement les choix présidentiels pour la Cour suprême, et un homme comme Gorsuch aurait probablement reçu un soutien des deux partis. Scalia, par exemple, a été confirmé à l'unanimité (98 votes pour et 2 abstentions).

Mais ce n'est pas une période comme les autres. Les démocrates n'ont toujours pas accepté l'obstruction des républicains concernant la nomination de Garland, et plusieurs d'entre eux voudraient faire la même chose pour Gorsuch. Juste après l'annonce, certains sénateurs démocrates ont immédiatement exprimé leur opposition au juge.

Pour éviter tout blocage législatif, il faut 60 voix, alors que les républicains n'en ont que 52. Ce qui veut dire qu'ils doivent négocier pour avoir le soutien de certains démocrates. Les républicains pourraient aussi se passer des démocrates en changeant la loi relative au blocage législatif, puis confirmer ensuite le choix de Gorsuch avec une majorité simple.

Donald Trump a indiqué qu'il penchait pour cette dernière option, lors d'une interview à la chaîne Fox News la semaine dernière.

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