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Etat Islamique

Un montage photo de l’EI met en scène neuf des membres des attaques de Paris

On retrouve sur ce photo-montage deux djihadistes présentés comme des ressortissants irakiens et qui pourraient être les deux kamikazes encore non-identifiés du Stade de France.
Pierre Longeray
Paris, FR
VICE News / Etienne Rouillon

Trois mois après les attaques de Paris, le dernier numéro de la revue de propagande de l'organisation État islamique (EI), Dabiq, se conclut en avant dernière page avec un photomontage qui met en scène neuf des assaillants du 13 novembre dernier, dont deux individus qui pourraient être les kamikazes encore non-identifiés du Stade de France. Sur l'image on retrouve une vue aérienne composée de bouts de Paris, un plan de métro inversé qui n'est pas un plan parisien, et diverses images des massacres du 13 novembre qui ont fait 130 morts.

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L'image est accompagnée du titre « Just Terror » (soit « Une terreur juste » ou « Juste la terreur » selon les traductions), un slogan qu'ils avaient déjà associé aux attaques de novembre sur un précédent numéro. Sous les portraits des assaillants, un message en lettres capitales jaunes est inscrit : « Que Paris soit une leçon pour les nations qui souhaitent en prendre note… ».

Parmi les neuf individus présentés avec leur « kunya » (nom de guerre), sept avaient déjà été formellement identifiés par les services de police. En revanche, deux individus désignés dans Dabiq comme « Ali Al-Iraqi » et « Ukashah Al-Iraqi » étaient jusqu'ici inconnus. Comme le précise leur kunya, il s'agirait de deux ressortissants irakiens — « al-Iraqi » signifiant « l'Irakien » en arabe.

Attentats de — Jean-Charles Brisard (@JcBrisard)January 19, 2016

Des kamikazes irakiens au Stade de France ?

Ces deux hommes pourraient bien être les deux kamikazes qui se sont fait exploser à proximité du Stade de France le soir du 13 novembre. « Les photos des deux individus collent avec celles diffusées par la police, » estime Wassim Nasr, journaliste à France 24 et spécialiste des mouvements djihadistes, contacté par VICE News ce mercredi matin.

Une dizaine de jours après les attentats, les autorités françaises avaient effectivement diffusé les photos des deux kamikazes du Stade de France, après avoir établi que le passeport syrien retrouvé à proximité d'un des corps déchiqueté le 13 novembre, avait été contrôlé à Léros en Grèce, le 3 octobre 2015.

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Ainsi, lors du contrôle en Grèce — une des portes d'entrée privilégiées par les migrants — le propriétaire du passeport (qui aurait sans doute été volé sur un cadavre de soldat syrien et dont la photo a été changée d'après Nasr) avait été photographié avec son compagnon de route.

Les deux individus avaient ainsi été enregistrés sous les noms d'« Ahmad Al-Mohammad » et de « Mohammad Al-Mahmod » — soit les noms notés sur les passeports. Al-Mohammad et Al-Mahmod pourraient bien donc être respectivement ceux qui sont ici appelés Ukashah Al-Iraqi et Ali Al-Iraqi.

Pour Romain Caillet, un autre spécialiste français des mouvements djihadistes, la ressemblance entre la photo diffusée par la police et celui qu'on présente comme « Ukusha Al-Iraqi » n'est pas frappante.

En se basant sur le seul présumé syrien restant, difficile de voir une ressemblance avec Ukasha al-Iraqi dans Dabiq — Romain Caillet (@RomainCaillet)January 19, 2016

Pas de Salah Abdeslam

En plus des deux potentiels kamikazes non-identifiés du Stade de France, on retrouve sur le photomontage, les trois assaillants du Bataclan : Samy Amimour (Abu Qital Al-Faransi), Ismaël Omar Mostefai (Aby Rayyan Al-Faransi) et Foued Mohamed-Aggad (Abu Fuad Al -Faransi), qui sont tous les trois Français.

Le troisième kamikaze français du Stade de France, Bilal Hadfi (Dhul-Qarnyan Al-Faransi), est aussi présenté en treillis militaires et brandissant un couteau.

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Enfin, les portraits des trois membres du commando franco-belge « des terrasses » viennent compléter le tableau : Abdelhamid Abaaoud (Abu Omar Al-Baljiki), Chakib Akrouh (Abu Mujahid Al-Baljiki) et Brahim Abdeslam (Abul-Qa Qa Al-Baljiki). Contrairement à ce que pourrait laisser penser sa khouna, Abdeslam est bien Français et non Belge (comme Abaaoud et Akrouh), mais comme nous l'explique Nasr, « la kunya peut simplement faire référence au lieu de résidence ».

Contrairement au premier communiqué de l'EI diffusé le lendemain de l'attentat qui faisait état de huit assaillants, le photomontage présente neuf individus, sans compter Salah Abdeslam (toujours recherché par toutes les polices européennes).

« Cela veut sans doute dire que les frères Abdeslam ont été intégrés au dernier moment à l'opération, » indique Wassim Nasr, qui précise que Salah n'est pas présent sur l'image parce qu'il est principalement question pour l'EI « de rendre hommage aux martyrs », donc aux morts.

Une vidéo de revendication à prévoir ?

Tous (sauf Brahim Abdeslam qui ne s'est jamais rendu en Syrie, comme son frère) sont en tenue de combat, et certains comme Ukashah Al-Iraqi portent un micro. « Les photos ont été récupérées sur des vidéos [de propagande], » indique Nasr. Ainsi, une vidéo de revendication des attaques de Paris peut être à prévoir. Ces portraits peuvent aussi avoir été sortis d'autres vidéos de propagande qui n'ont rien à voir avec la France, prévient Nasr.

Seule la dernière page de ce treizième numéro du magazine de propagande de l'EI traite de la France, ce qui est significatif pour Nasr, « C'est comme une dernière page de pub. On a l'impression qu'ils traitent cela comme si ce n'était pas très important. » Le spécialiste indique notamment que dans le dernier enregistrement audio attribué à Abou Bakr Al-Baghdadi (enregistré après les attaques de Paris) le leader ne fait pas référence au 13 novembre

Dans le reste du magazine de propagande de l'EI, l'organisation confirme notamment la mort de « Jihadi John » (un Britannique qui est apparu dans plusieurs vidéos de décapitation d'otages), tué en novembre 2015 par une frappe aérienne. Mohammed Emwazi de son vrai nom est notamment félicité pour avoir offert une esclave à un djihadiste célibataire blessé. Dabiq félicite aussi les assaillants de l'attaque de San Bernardino en Californie, notamment Tashfeen Malik qui a décidé de combattre bien que « cela n'était pas obligatoire » pour elle, puisque c'est une femme.


Suivez Pierre Longeray sur Twitter : @PLongeray