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Un rapport dénonce des violences policières contre les migrants à Calais

Humans Rights Watch a recueilli les témoignages de migrants faisant état d’exactions commises par les forces de l’ordre de la ville de Calais.
VICE News

Dans un rapport rendu public mardi, Human Rights Watch (HRW) dénonce les violences policières dont les migrants et demandeurs d'asile de Calais sont l'objet selon l'organisation internationale dédiée à la défense des droits humains. L'enquête est basée sur les témoignages de 44 personnes, recueillis en novembre et décembre 2014 par l'ONG.

« Les abus décrits à HRW comprennent des passages à tabac et des attaques au gaz lacrymogène alors que les migrants et demandeurs d'asile marchaient dans la rue ou se cachaient dans des camions dans l'espoir de se rendre au Royaume-Uni, » accuse HRW dans le document , qui dénonce également les conditions dans lesquelles vivent les quelque 2 400 migrants qui se trouvent actuellement à Calais dans l'attente d'une opportunité de rejoindre illégalement le Royaume-Uni.

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Salamou, 28 ans, originaire d'Érythrée, que l'on peut voir témoigner dans la vidéo, des blessures sur le nez, raconte que ces marques sont les conséquences d'un passage à tabac par trois policiers un soir de novembre, à proximité d'une station essence. « Je marchais, normalement », déclare-t-il. « Quatre policiers sont sortis de leur camionnette et m'ont frappé à coups de bottes et de matraque. Après m'avoir frappé, un policier a dirigé une lampe sur moi et m'a ri au nez. 'Aidez-moi', ai-je supplié, mais il a ri. Ils m'ont donné des coups de pieds alors que j'étais à terre, comme un chien. »

Jointe par VICE News, la préfecture du Nord-Pas-de-Calais a répondu par la voix de son conseiller en communication qui explique que « Le préfet aborde ce rapport avec prudence et réserve parce qu'il y a des inexactitudes. Certains témoignages sont non circonstanciés, il n'y a pas de preuve tangible. » Une enquête sur les témoignages présents dans le document d'HRW est en cours, a-t-on confirmé à VICE News.

Interrogée par VICE News, Clémence Gautier-Pongelard est juriste à la Plateforme de Service aux migrants (PSM), un réseau associatif qui vient en aide aux exilés notamment dans le nord de la France. Elle affirme qu'on lui rapporte plus de violences policières que d'habitude depuis le printemps 2014. « Ça a toujours lieu dans des endroits où il n'y a pas de bénévole, pas de témoin, en général la nuit, » affirme-t-elle.

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Clémence Gautier-Pongelard espère que ces témoignages pourront alerter l'opinion publique, et que le défenseur des droits se saisira de ce dossier, comme ça avait été le cas en 2011, ce qui avait contribué, semble-t-il, à diminuer les violences.

La juriste estime que le statut de demandeur d'asile des victimes les dissuade de porter plainte : « Quand les gens arrivent au commissariat pour porter plainte, on leur demande leur carte d'identité, et s'ils n'en ont pas, ils peuvent être mis en rétention et risquer une obligation de sortie du territoire. Et quand on parle de ces violences, on nous rétorque toujours qu'on n'a pas de preuve. C'est parole contre parole, parole de migrant contre parole de policier, » déplore-t-elle.

C'est ce manque de preuves dans le rapport que le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve a mis en avant dans un communiqué publié mardi. Il a dit « regrette[r] que l'association Human Rights Watch n'ait pas pris la peine de vérifier les allégations de violences policières dont elle fait état. »

La chercheuse Izza Leghtas, à l'origine du rapport, conteste cette accusation de faiblesse, et indique qu'il s'agit là de la méthode même de HRW. Elle nous précise : « À HRW, on a une approche qualitative, basée sur les témoignages. Ça m'a frappé, à quel point les gens m'en parlaient spontanément [des violences dont ils avaient été victimes], on a parlé à de nombreuses personnes. » Elle affirme avoir toutefois rencontré les conseillers police et immigration de Bernard Cazeneuve, ainsi que le préfet du Pas-de-Calais, lors de ses recherches.

Suivez Mélodie Bouchaud sur Twitter @Meloboucho