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LE NUMÉRO FICTION 2015

Comment préparer une tournée de lectures

L'auteure Sarah Gerard nous a expliqué comment faire la promotion d'un livre que personne ne lira.

Photo publiée avec l'aimable autorisation de l'auteure. Son livre en est à sa troisième réimpression et est disponible aux éditions Two Dollar Radio.

Je suis à Los Angeles, alors que ma tournée de promotion pour Binary Star – mon premier roman qui narre l'histoire d'une étudiante anorexique et sa relation longue distance avec son copain alcoolique – se termine. Il y a deux semaines, je faisais une lecture dans une librairie de Toronto, avant de partir pour l'Ouest du pays. Hier, j'ai traversé la Pacific Coast Highway pour arriver à Los Angeles. De là, j'irai à Austin en passant par La Nouvelle-Orléans, avant de mettre le cap vers ma ville natale, Largo, en Floride.

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Quand j'ai appris que Two Dollar Radio voulait publier Binary Star, j'ai d'abord réfléchi à tout ce que je pourrais faire pour promouvoir l'ouvrage. Two Dollar Radio est une petite équipe : un couple seul gère les opérations depuis sa maison de Colombus.

Je suis ravie de travailler avec eux, qui ont publié les œuvres de fiction les plus innovantes de ces dernières années. Néanmoins, je savais sans même avoir à le demander qu'il n'y aurait pas de budget pour ma tournée promo. En tant qu'ancienne libraire, je savais aussi à quel point les librairies indépendantes sont importantes pour les auteurs et les petites maisons d'édition. Il fallait que je voyage de sorte à rassembler un public qui, sinon, n'aurait jamais entendu parler de mon livre.

La date de publication était prévue pour janvier 2015. En août, j'envoyais déjà des mails aux librairies de tout le pays – ce fut assez intimidant, ne disposant d'aucun moyen de leur garantir un public. Beaucoup de mails n'ont jamais reçu de réponse, et j'ai relancé à de nombreuses reprises. Je savais que je devrais voyager en voiture car les coûts des vols étaient trop élevés. Je savais aussi que je ne pourrais m'absenter qu'un mois loin de mon job.

Peu avant moi, mon collègue D. Foy avait lancé une campagne de crowdfunding pour financer sa tournée suite à la sortie de son bouquin, Made to Break. J'ai décidé de faire la même chose. J'ai évalué un budget pour la tournée, calculant le coût de l'essence, de la nourriture et des chambres d'hôtel dans les villes où je ne pouvais pas loger chez des amis. Ma voiture avait besoin de légères réparations. En tout, j'allais demander 9 000 dollars – c'est beaucoup, mais c'est le minimum dont j'avais besoin.

Je me suis longtemps interrogée sur le site de crowdfunding que j'allais utiliser, avant de finalement me tourner vers Kickstarter. J'avais des amis prêts à m'aider pour la présentation de la campagne et mon mari, qui est réalisateur, m'a confectionné plusieurs vidéos. J'ai aussi pensé à des récompenses pour les donateurs. Dès le début de la campagne, j'ai envoyé un mail à tout le monde – y compris aux librairies dans lesquelles j'allais passer – en leur demandant d'en faire le relais. Cette campagne est devenue une sorte de troisième boulot pour mon mari et moi. Je mettais notre page à jour chaque soir et je relançais deux fois par semaine ceux qui n'y avaient pas encore participé. Au final, on a réussi à récolter 197 dollars de plus que le montant espéré.

Je suis maintenant en tournée depuis trois semaines. J'ai dormi sur le canapé d'amis à de nombreuses reprises, toujours prête à reprendre la route tôt le lendemain matin. À Brooklyn, j'ai fait une lecture en compagnie de quatre autres auteurs devant une centaine de personnes ; à Tacoma, j'ai lu devant cinq personnes – dont mon mari, le libraire, un homme qui m'a interrompu pour me demander de lire plus lentement et un autre qui est parti avant la fin. Après la rencontre, une femme m'a pris à part. Étant anorexique, elle m'a expliqué qu'elle essayait de se soigner et m'a demandé si ça allait mieux de mon côté. S'il y avait eu plus de monde, je n'aurais jamais pu parler avec elle.