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Drogue

Les drogues que l’on trouve en Europe sont de plus en plus pures

Un rapport de l’Observatoire européen des drogues et des toxicomanies pointe la hausse sensible de la pureté des drogues, notamment de la substance illicite la plus consommée en Europe : le cannabis.
Pierre Longeray
Paris, FR
Image via Flickr / West Midlands Police

L'Observatoire européen des drogues et des toxicomanies (OEDT) a rendu son rapport annuel ce jeudi, et s'inquiète de la « hausse sensible » de la pureté des drogues, notamment du cannabis — la substance la plus consommée dans les pays de l'Union européenne, derrière la cocaïne. Le rapport pointe aussi une baisse de la consommation d'héroïne, le développement des « euphorisants légaux » (deux nouvelles substances découvertes par semaine) et l'essor de la vente de drogues via Internet. Il présente d'autres éléments plus étonnants comme la concentration des résidus de cocaïne dans les eaux usées.

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Carte extraite du rapport de l'OEDT.

Selon les chiffres de l'OEDT, 19,3 millions d'adultes européens (de 15 à 64 ans) ont consommé du cannabis au cours de l'année passée. Pendant leur vie, près d'un quart de la population adulte de l'UE (75,1 millions de personnes) en a consommé. La consommation du cannabis — substance qui représente 80 pour cent des saisies de drogues — est en hausse dans plusieurs pays (Danemark, Finlande, Suède, France et Bulgarie). 24 pour cent des élèves scolarisés de l'UE, âgés de 15 et 16 ans, disent en avoir déjà consommé — avec un pic à 42 pour cent pour les lycéens tchèques.

La teneur en THC de la weed a doublé en 5 ans

L'OEDT alerte sur la hausse majeure de la teneur en principe actif (tétrahydrocannabinol, THC) dans le cannabis : elle a doublé en 5 ans pour l'herbe (marijuana) et en 10 ans pour la résine de cannabis (haschisch). Selon l'observatoire, la concurrence accrue pourrait expliquer ce phénomène — une substance plus forte pourrait permettre de se démarquer pour les producteurs. On note aussi une augmentation du nombre de consommateurs de cannabis admis dans des centres de traitement pour se défaire de leur addiction (45 000 en 2006 contre 61 000 en 2013).

Wolfgang Götz, le président de l'OEDT, a pris la parole ce jeudi à Lisbonne, au siège de l'observatoire européen, pour commenter les divers résultats publiés dans le rapport, notamment ceux consacrés au cannabis. Il en a profité pour déclarer qu'il ne croyait pas à une légalisation du cannabis dans les pays de l'UE — comme cela peut être le cas dans 23 États américains. « Je ne connais aucun gouvernement européen qui est en train de discuter sérieusement de la légalisation du cannabis, » a déclaré Götz.

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La cocaïne — qui peut être soit sniffée, injectée ou fumée (sous forme de crack) — est le stimulant le plus consommé en Europe : 14,9 millions de ressortissants de l'UE déclarent avoir déjà consommé la poudre blanche. En réalité, la prise de cocaïne est concentrée dans quelques pays : en Espagne, en Irlande, en France, au Danemark et au Royaume-Uni où 9,5 pour cent des adultes en ont déjà consommé. On apprend dans le rapport que Londres a la plus forte concentration en Europe de résidus de cocaïne dans ses eaux usées. La cocaïne est aussi largement consommée par les habitués des boîtes de nuit : 22 pour cent des fêtards réguliers déclarent en consommer (contre 2,4 pour cent pour la population totale). Contrairement aux addicts au cannabis, la demande de traitement pour la dépendance à la cocaïne est toujours en baisse.

L'héroïne est l'opiacé le plus consommé en Europe, mais aussi la drogue la plus addictive. La demande stagne alors que les quantités saisies déclinent — des évolutions « relativement positives » selon le rapport. Cette drogue représente encore la majorité des coûts sociaux et de santé. Les demandes de traitement sont en recul, mais l'héroïne est la drogue majoritaire dans les décès par surdose. Sa forme la plus courante — la brune — vient d'Afghanistan, alors que la blanche, plus rare, arrive principalement d'Asie du Sud-Est. La « route des Balkans » (de l'Afghanistan par la Turquie puis les Balkans) reste la route privilégiée des trafiquants d'héroïne. Mais la « route du Sud » (de l'Iran ou du Pakistan en passant par l'Afrique ou la péninsule arabique) est de plus en plus utilisée selon l'OEDT. L'observatoire révèle aussi l'ouverture de laboratoires en Europe pour confectionner l'héroïne à partir de l'opium reçu d'Afghanistan.

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Les deux autres stimulants largement consommés sont les amphétamines et la MDMA. Ces deux drogues ont déjà été essayées par, respectivement 11,7 et 11,5 millions d'Européens. On observe une réelle logique de « commercialisation » de la MDMA selon l'OEDT, avec l'apparition de substances toujours plus pures et marquées de divers logos. La production de la MDMA est principalement concentrée en Belgique et au Pays-Bas.

Le rapport de l'OEDT met aussi l'accent sur l'apparition et le développement rapide de nouvelles substances. L'organisme a repéré 101 nouvelles substances psychoaffectives en 2014. Nombre de ces produits sont des « euphorisants légaux ». Le quotidien Le Figaro note que la France figure en tête du tableau des usagers récents, avec 8 % de jeunes ayant essayé une de ces substances au cours de l'année dernière. Ces nouvelles drogues qui flirtent avec la légalité existent sous forme de poudre, cristaux, herbes ou encore médicaments. Si ces substances s'échangent parfois dans la rue, elles sont principalement vendues sur Internet — le nouveau champ de bataille de la lutte antidrogue. Le rapport précise que 651 sites Internet vendant ces euphorisants légaux ont été répertoriés.

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Internet est aussi un point d'accès privilégié pour l'achat de drogues illicites — notamment sur des plateformes du « deep web » comme Evolution, Agora ou encore Silk Road — dont le fondateur Ross Ulbricht a été condamné, fin mai, à la prison à vie. La lutte va devoir « s''adapter à un contexte mondial et virtuel » explique le rapport. Il est aussi précisé que les réseaux sociaux et autres applications mobiles sont autant de possibilités pour s'approvisionner en drogues.

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Image via Flickr / West Midlands Police